Chapitre 33 - Prise d'otages

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Monsieur Moreau se raidit en suspendant son geste de cogner encore contre la porte en tentant de l'ouvrir depuis déjà plusieurs minutes alors que l'écho du coup de feu résonnait à ses oreilles.
En découvrant la porte fermée à son arrivée, légèrement en retard ce matin, il avait immédiatement comprit que quelque chose d'anormal se passait mais il avait d'abord soupçonné une plaisanterie, ce ne serait pas la première fois qu'Irwan ou un autre s'amusait à ses dépends, mais il avait commencé à redouter quelque chose de plus grave lorsque personne ne lui avait encore répondu après plusieurs minutes.
L'angoisse l'avait réellement étreint lorsque Lavande avait appelé à l'aide mais, après ce tire, ce n'était plus seulement de l'inquiétude fondée sur une impression mais une profonde panique basée sur un fait qu'il venait juste de constater.
Il se jeta contre la porte, épaule en avant dans l'espoir de l'ouvrir. De l'autre côté s'élevaient des cris où il identifia les timbres de ses élèves. En revanche, il ne reconnu pas la voix masculine qui les couvrit pour leur ordonner de se taire et il devait avoir un moyen de pression puissant car tous se turent instantanément, certainement l'arme qui avait produit le coup de feu.
Des dizaines d'hypothèses et de questionnements se succédaient dans l'esprit du professeur d'Histoire mais une chose était certaine : ses élèves étaient en danger et l'un d'entre eux était probablement blessé.
Il insista encore, jusqu'à ce que son épaule soit si douloureuse qu'il craignait la fracture, ce qui était bien secondaire, et qu'il soit forcé de reconnaître qu'il était impuissant. Sans compter qu'il ne pourrait pas grand chose pour ses élèves si il réussissait à entrer. Le premier réflexe d'aller immédiatement les secourir passé, il prit quelques secondes pour réfléchir et admettre que, seul face à un homme armé dont il ignorait tout des motivations, il serait parfaitement inutile. Au contraire, il risquerait plus d'aggraver la situation, qui semblait déjà critique, que d'apporter l'aide dont il y avait besoin mais il pouvait aller prévenir d'autres personnes plus aptes à la fournir.L'institut était justement sous la surveillance de la police.
Sans perdre de temps, il s'élança dans le couloir en tenant son épaule douloureuse. Montant les escaliers en courant, il manqua de chuter mais ne s'en soucia pas et continua jusqu'au troisième étage où, dans son empressement, il bouscula un gestionnaire auprès de qui il ne s'excusa pas pour plutôt se précipiter dans le bureau du directeur où il entrer sans s'annoncer.
Surpris de cette brusque intrusion, Monsieur Belforde releva les yeux pour les poser sur le professeur. Il savait que ce n'était pas normal qu'il soit ici, qu'il aurait dû être en classe, à dispenser son cours aux plus âgés de l'établissement et que son attitude trahissait son état de panique pourtant, il ne parut nullement s'inquiéter, comme si cela ne l'atteignait pas, qu'il s'en moquait.
Trop préoccupé par la situation de ses élèves pour le remarquer vraiment, Monsieur Moreau déclara, le souffle court et peinant à être cohérent à cause de l'inquiétude :

« Aaron, les...les élèves...ils sont...en danger ! Il faut...les inspecteurs...où sont-ils ?
- Clément, pourquoi tant de panique ?

Ce fut à cette réponse que Monsieur Moreau s'aperçut que le directeur ne semblait pas plus préoccupé que si il avait renversé sa tasse de thé.
Se reprenant quelques instants, il observa Monsieur Belforde qui paraissait effectivement parfaitement détaché, pourtant, rien que l'état dans lequel le professeur était arrivé aurait dû l'alerter et il aurait normalement dû s'affoler à la seule mention d'un danger pesant sur ses élèves.
L'homme que Monsieur Moreau connaissait, dans l'établissement de qui il travaillait depuis plusieurs années, n'aurait eu besoin d'aucune précision, ni de comprendre clairement la situation pour agir. Le simple fait qu'on l'avertisse d'un problème aurait normalement dû suffire. Il serait lui-même descendu à la salle de classe pour tenter d'ouvrir la porte en se jetant contre or, il demeurait là, assis à son bureau,le regard comme vide, exempt de toute inquiétude.
Pourquoi ne se comportait-il plus comme celui qu'il était, pourquoi semblait-il avoir changé ?
Ce n'était pas la première fois qu'on remarquait que le directeur paraissait différent de la personne que beaucoup appréciaient mais cela n'avait jamais été aussi flagrant aux yeux de Monsieur Moreau.
Cependant, il avait bien plus urgent à songer que de s'interroger sur ce changement de personnalité. Ses élèves étaient actuellement sous la menace d'une arme, ils avaient besoin d'aide. Cette indifférence de la part d'Aaron eut seulement pour effet de le plonger dans une violente rage.
Comment pouvait-il se montrer si détendu alors que plusieurs de ses pensionnaires encouraient un tel danger ?
Pour le moment, il se moquait pas mal de la réponse. Il souhaitait uniquement secourir et protéger ses élèves.
Furieux et angoissé, il saisit Monsieur Belforde parle col de sa chemise en le tirant vers lui, l'allongeant de moitié contre son bureau, tout le respect qu'il avait envers lui effacé à cause de l'empressement et de sa colère, et siffla :

Les Yeux du Pouvoir - Tome 1 : Rouge Sang  [Terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant