Tous les regards convergèrent vers la porte qui venait de s'ouvrir sans que personne ne s'annonce en frappant alors que Monsieur Moreau interrompait, une fois de plus son cours, et tous fixèrent Salim,son sac sur l'épaule, alors qu'il remontait l'allée de la classe pour s'installer à sa place au fond de la salle sans un mot ou un regard pour personne.
Il ne semblait pas particulièrement différent de d'habitude pourtant, rester en garde-à-vue deux jours devait marquer, du moins, c'était ce que pensait Eléa. La seule trace de perturbation laissée par cette épreuve paraissait être ses mâchoires légèrement plus contractées qu'à l'ordinaire, mais rien de plus.
S'en moquait-il à ce point ?
Il serait alors bien le seul car, autour de lui, alors qu'il sortait tranquillement ses affaires, tous échangeaient des regards surpris, inquiets, emplis de doute ou d'interrogations, tous ignoraient que penser, peinant à se forger une opinion sur la culpabilité possible de Salim.
Le seul qui ne participait pas à ce grand questionnement général était Raphaël, déjà persuadé de l'innocence de Salim. Évidemment, toute la classe était au courant des lourds soupçons pesant sur Salim, non seulement pour avoir fouillé dans les rapports des deux inspecteurs et également pour avoir assisté à son arrestation en pleine nuit, ayant mit leur nez dans une affaire dangereuse qui ne les concernait pas, bande de jeunes inconscients, comme les avait sermonné l'inspecteur Carmody, paniqué à l'idée que quelque chose ait pu leur arriver.
De toute manière, même si ils n'avaient pas été présents à ce moment là, ils l'auraient tout de même rapidement su, la rumeur s'étant rependu en quelques heures dans tout l'établissement. Il n'avait pas été nécessaire qu'un membre de la classe parle. Les informations diffusés par plusieurs médias avaient suffit à faire le rapprochement avec l'élève absent.
Autant dire que le jeune homme avait affronté quantité de regards en plus de ceux de ses camarades. Cependant, il n'était pas revenu sur sa décision prise en cellule, celle où il refusait de s'enfermer dans sa chambre pour s'y cacher, préférant affronter les événements pour éviter de donner l'impression de se cacher, de se terrer comme un coupable.
Alors, il feignait de ne rien remarquer en s'asseyant sur sa chaise pendant que tous poursuivaient cet échange de questions et de doutes silencieux.
Monsieur Moreau se racla la gorge pour tenter de recentrer l'attention de ses élèves sur la leçon du cours mais, même si ils semblèrent reprendre leurs prises de notes et l'écouter, leurs pensées revenaient sans cesse à Salim, sur ce qu'ils savaient, sur sa possible implication dans ces meurtres et tout le reste.
Et Salim, lui, qu'en pensait-il exactement ?
Impossible de le deviner et inutile d'espérer qu'il l'explique, la garde-à-vue n'ayant certainement pas fait disparaître son comportement agressif, au contraire.
Eléa ne supporta pas longtemps toutes ces réflexions et ses doutes qui la torturaient, l'entraînaient toujours vers plus d'interrogations, de soupçons et d'idées qu'elle ne souhaitait pas avoir.
Craquant, la jeune fille jeta son stylo sur sa feuille, faisant sursauter Roxanne à côté d'elle, qui s'était replongé dans sa somnolence comateuse du lundi matin, et faisant tourner la tête à Alana. La jeune fille aux yeux roses posa sa main sur celle d'Eléa, tentant de l'apaiser et de la soulager, bien qu'elle-même soit fortement tendue.
Eléa baissa le regard sur leurs mains jointes avec un sourcil arqué, à la fois surprise et gênée par ce geste de soutiens et de proximité amicale. Bien qu'elle commençait lentement à s'y habituer, elle était toujours déstabilisée et touchée par ces intentions.
Cependant, il en faudrait davantage pour se sentir mieux dans ces circonstances éprouvantes mais c'était effectivement uniquement en se soutenant mutuellement qu'ils pourraient traverser ces événements difficiles, bien que ce soit idéaliste, candide et affreusement mielleux. Quoi qu'il en était, Eléa se sentait un peu plus capable d'endurer tout cela, même si ça ne suffisait pas et qu'elle avait envie de tout oublier de cette histoire.
Comment les choses avaient-elles pu changer ainsi et passer de ce qui lui paraissait un rêve qui l'accueillait comme nul par ailleurs à ce mauvais roman policier qui l'angoissait ?
Cette question l'accompagna durant tout le reste du cours, qu'elle renonça rapidement à suivre, prise dans ces interrogations, comme le reste de ses camarades, puis la sonnerie retentit dans les classes et les couloirs.
Ce fut sans soulagement que les élèves vidèrent la salle, toujours envahis par leurs doutes et leurs questionnements, qui les rongeaient de l'intérieur. En sortant à la suite de Marianne, Eléa, en le voyant se détacher du mur pour se diriger vers elle, comprit que c'était spécialement pour elle que Gabriel attendait.
Le rouge lui monta aux joues à cette constatation et, au sourire amusée de Lison, elle comprit que c'était beaucoup trop visible.
Remontant jusqu'à elle en se faufilant entre les quelques membres de la classe, Gabriel saisit la jeune fille par le bras,faisait augmenter son rougissement et sa chaleur corporelle par cette proximité, et l'entraîna à l'écart. Du coin de l'œil, Eléa s'assura qu'aucun de ses camarades ne les observait, comme cela était assez de coutume entre eux mais, trop soucieux à cause de la situation préoccupante, il n'y eut que quelques plaisanteries échangées puis rapidement abandonnées alors qu'ils s'éloignaient,sachant parfaitement qu'Eléa les rejoindrait sans tarder et qu'elle ne risquait rien avec Gabriel, à part céder à la passion, comme lança Roxanne.
Revenant sur Gabriel, Eléa s'aperçut qu'il avait remplacé son habituel masque pour un visage grave, ce qui indiquait que la situation était inquiétante, pour autre chose que les meurtres et l'enquête car, ça, Gabriel le supportait relativement bien, ne semblant jamais s'angoisser de rien.
Face à lui, Eléa déglutit, comprenant que c'était grave, et elle posa les yeux sur lui, attendant qu'il lui annonce ce qu'il venait lui dire avec cette expression si sombre mais il ne paraissait pas oser le faire et aborder le sujet. Le rythme cardiaque d'Eléa s'accéléra alors qu'elle se demanda ce qui pouvait bien être aussi dramatique alors que les meurtres ne semblaient pas l'inquiéter davantage et ne l'empêchaient pas de se maîtriser.
Finalement, après plusieurs longues secondes de ce silence inquiétant, Gabriel prit une grande inspiration et déclara simplement :
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Les Yeux du Pouvoir - Tome 1 : Rouge Sang [Terminé]
ParanormalRepérés à la naissance à cause de leurs yeux d'une couleur inhabituelle, qui varie selon la magie pratiquée, les magiciens ont toujours eu à souffrir de discriminations à cause de leur différence. C'est le cas d'Eléanora qui doit tous les jours affr...