#110

9.3K 378 137
                                    

DE SON POINT DE VUE À ELLE

Je tends l'oreille.

Est-ce que...

Non. Je n'ai pas rêvé, il y a bien une voix qui m'appelle.

Elle est lointaine, presque trop faible pour être entendue, mais elle est là, elle perce les ténèbres pour parvenir à mes oreilles.

Au début, je ne comprends pas ce qu'elle dit, puis son intensité augmente crescendo :

"A...
Att...
Attra...
Attrape m... 
Attrape ma m....
ATTRAPE MA MAIN !"

C'est une voix d'adolescent.

Il crie. Il hurle.

"ATTRAPE MA MAIN !"

La panique fait vibrer sa voix. Il est désespéré.

"Ouvre la bouche..."

Se mêlant à la première, une seconde voix s'élève.

Celle-ci n'a rien d'alarmé.

Elle est plus douce, beaucoup plus grave, c'est celle d'un homme mûr.

Ses paroles se mêlent à celles de l'adolescent :

"Attrape ma main ! Aller, fais-le ou je vais tomber aussi !

Ouvre la bouche...

Ma main, vite ! Prends-la !

Plus grand, idiote, et reste droite...

Dépêche-toi ! Les bretelles de ton sac vont lâcher !

C'est bien, avale maintenant...

Au secours ! Aidez-moi au lieu de rester plantés là !

Merde, tu me plais..."

Mon sommeil est devenu trop léger.

Je réalise subitement que je suis en train de dormir, et les voix s'évanouissent aussitôt, laissant place à un sifflement désagréable.

Mes paupières sont encore trop lourdes pour être ouvertes, mais mes sens se remettent doucement à fonctionner.

Mon dieu, que j'ai chaud.

Beaucoup trop chaud.

Pour une raison que j'ignore, mon torse et mon visage me brûlent...

Et puis, j'ai envie d'éternuer.

Quelque chose est en train de me chatouiller les narines.

Je veux secouer la tête pour m'en débarrasser, mais mon cou me fait aussitôt souffrir.

Aïe...

Je grimace légèrement, et me rends compte que mes lèvres et le haut de mon menton sont humides.

Mince... j'ai bavé dans mon sommeil.

M'efforçant non sans mal d'ignorer mon torticolis, je tourne la tête de gauche à droite, pour essuyer ma peau contre la surface douce qui se trouve juste devant mon visage.

C'est mieux comme ça.

D'autant plus, que le sifflement dans mes oreilles s'estompe enfin.

Le silence aurait dû le remplacer, mais de légers ronflements me parviennent. 

Je réalise alors que ma poitrine se soulève au rythme d'une respiration qui n'est pas la mienne.

LE LIVREUR [TOME 1/BTS, V, LEMON]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant