Être ou ne pas être une patronne

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Accoudée au balcon de mon bureau, je surveille l'arrivée du camion de livraison. J'ai commandé de nouveaux rideaux ainsi que des draps avec toute sa panoplie. Les travaux sont presque terminés maintenant, il ne me reste plus qu'à choisir quelques meubles dans l'atelier de mon designer qui crée des meubles magnifiques. Tout cela représente un investissement important que j'espère fructif.

J'aperçois enfin le camion longer l'allée de peuplier menant à l'auberge. Je quittai mon bureau en vitesse pour m'assurer qu'il se stationne devant l'entrée de service. Je me precipai dehors me félicitant d'avoir opté pour des Vans ce matin au lieu des bottes à talon qui me faisaient de l'œil. Je descendis l'escalier pour me retrouver dans le hall d'entrée vide à cette heure de la journée. À part un client qui réglait la note de son séjour avant de s'en aller. Lui et Caroline me regardèrent passer avec perplexité. Je leur fis un signe amical de la main puis sortir sur la cour. Le chauffeur était un livreur habituel qui s'occupait déjà de décharger le camion aidé de son assistant.

- Salut Gary!

- Bonjour Mlle Néard!

Je fis un signe de la main à son assistant qui est muet. Il me répondit avec la main en souriant. Ils s'occupèrent de mettre les cartons par terre avec la plus grande des précautions comme s'ils portaient de la porcelaine puis je signai l'accusé de réception et ils repartirent illico, les pneus du camion crissant sur le gravier de la cour.

Je contemplait la pile de cartons m'efforçant de paraitre optimiste quand à leurs poids. Le personnel réduit, je me retrouvai à court de bras pour transporter tout cela à la réserve. Que faisait Mamie Rosa dans ces cas-là? J'imagine mal une vieille de plus de 80 ans soulevant des cartons pleins de draps et d'objets divers. << Pourquoi n'as tu donc pas laissé de manuels d'instructions Mamie Rosa?>> Où est donc passé Bobby quand on a besoin de lui?

Je pris mon téléphone pour appeler mon lâcheur de frère de plus en plus absent.

- Belle? Qu'est-ce qui se passe?

- Où donc es-tu passé abruti? Il n'est pas question que tu me laisses tout gérer toute seule. On est une équipe au cas où tu l'aurais oublié.

Je l'entendis soupiré... d'exaspération je dirais.

- Je t'avais prévenu que je devais aider une amie à faire un buiseness plan pour son salon de coiffure. On en a parlé hier soir au dîner.

Quelle cruche! J'avais complètement zappé.

- J'avais oublié! Laisse tomber, je vais me débrouiller.

- Non, dis-moi de quoi tu as besoin?

- De muscle voilà ce dont j'ai besoin, soupirai-je avec lassitude.

- Ah, le camion de livraison est arrivé! Où sont les serveurs?

- En plein service, c'est quand même l'heure du déjeuner gros bêta.

- Et Ed?

Ça, j'y avais pas pensé.

- Que ferais-je sans toi? Tu n'as pas besoin de repondre, c'était une question purement rhétorique. Bon je te laisse, amuse toi bien avec ton... amie.

- Je te vois venir avec tes gros sabots Belle, c'est juste une amie.

- Je n'ai rien dit, rétorquai-je en souriant. Travaille bien, on se voit tout à l'heure.

- À plus p'tite soeur.

Je raccrochai le sourire aux lèvres, revigorée par ma conversation avec mon frère.

Je longeai l'allée bordée de parterre de delphiniums, de zinnias, de lys blancs et de marguerites, un mélange de couleurs tout à fait charmant. Ayant renoncé à l'idée d'engager un nouveau jardinier, j'ai fini par promouvoir Gigi à ce poste. Elle a de l'expérience et c'est une employée exemplaire. En parlant d'elle, je l'aperçus dans son bleu de travail dans la serre en train de faire des bouturages de lauriers. Ses cheveux blonds sont amassés en un chignon brouillon sur sa tête dégageant son visage aux traits délicats et fins.

RasinOù les histoires vivent. Découvrez maintenant