Interlude

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La fin des vacances d'été approchait à grand pas et Sam était de plus en plus anxieux à l'idée d'intégrer une nouvelle école. Je m'étais déjà occupée de l'inscription et projetait de prendre une journée pour lui acheter ses affaires de cours. Plus les jours passaient et plus je me rendais compte d'à quel point il s'épanouissait. On jouait à une partie de foot avec son oncle dans la cour de la maison de grand-mère et je ne pouvais m'empêcher d'être en admiration devant son sourire. Il riait aux éclats alors que Bobby courait avec lui sur pour mettre un touch down. Je leur courais après faisant le pitre au lieu d'essayer de les rattraper. Les moments avec lui sont encore plus privilégiés maintenant que je dois le partager avec son père. Père devant qui il est en admiration, surtout depuis qu'il a passé une matinée avec lui dans son cabinet. Il n'arrête pas de dire à qui veut l'entendre qu'il veut être un docteur comme son père quand il sera grand. Non mais quel ingratitude!

Je dis ça en plaisantant quand j'en parle avec Bobby mais au fond, c'est vrai que ça m'agace cette admiration pour son père. C'est pas son père qui a passé les six dernières années à l'élever que je sache. Alors pour me venger bien entendu, je le garde avec moi cette journée à la place d'aller voir son père comme c'était prévu. Ne me le dites pas je sais que c'est puérile. Mais j'ai cette peur irrationnelle au fond de moi qu'il vient à aimer son père plus que moi. Je ne l'ai dit à personne mais Sam est devenu mon point d'ancrage depuis sa naissance, son amour et sa présence ont donné un sens à ma vie. Je ne supporterai pas que Caleb me l'enlève. Sam, c'est une partie de mon âme, je suis incomplète sans lui. J'ai conscience que ma vie est trop centrée sur lui certes mais c'est mon fils...

- Maman, t'es nulle! T'essaie même pas de nous rattraper.

Il me sortit de mes pensées avec sa petite voix fluette et je le vis debout les poings sur les hanches et une moue boudeuse au visage.

- Oh... Mais j'essaie c'est que tu es trop fort, rétorquai je en faisant semblant d'être au bout du rouleau prête à m'effronder par terre.

Pour continuer ma p'tite comédie, je mis mes mains sur ma poitrine pour calmer ma prétendue respiration erratique. Puis je me laissai tomber dans l'herbe.

- Je rends les armes... Tu es le plus fort. Tu as gagné, fis je d'un air dramatique.

Mon fils me regarda d'un air sceptique alors que Bobby se retint d'éclater de rire. Les moments avec mon fils sont ce qu'il y a de plus précieux à mes yeux alors qu'importe que ça ne plaise pas à son père. Cette matinée il est tout à moi. L'auberge n'a pas besoin de moi pour le moment et mes employés sont assez compétents pour faire leurs jobs sans que je sois sur leurs dos. Des fois je n'arrive pas à comprendre pourquoi Mamie Rosa m'a choisi moi lieu de Bobby pour être à la tête de l'auberge. Bien sûr j'ai un diplôme en hôtellerie mais Bobby lui est celui qui a toujours été à ses côtés pour gérer les comptes. Quelque part, je trouve cette décision injuste.

Je revins à la réalité quand Sam vint s'allonger contre moi. Il posa sa tête sur ma poitrine et me regarda de ses grands yeux bruns. Je ne pourrai jamais me passer de ce regard-là. Il me regarde comme si j'étais la chose la plus cool de ce monde. Et pendant une fraction de seconde, j'ai cru que ça avait changé. Peut importe que son père soit là, il m'aimera toujours. Je serai toujours importante à ses yeux.

- Je t'aime, chuchota t-il à mon oreille en venant se réfugier dans mes bras.

Les larmes me montèrent aux yeux et je me maudis d'être aussi sensible.

- Moi aussi, je t'aime mon p'tit prince. Plus que tout au monde.

- Et moi, vous ne m'aimez pas? S'enquit Bobby en venant s'allonger à côté de nous.

RasinOù les histoires vivent. Découvrez maintenant