Sarah

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Le bras de Mike sur mes épaules me donnait un regain d'énergie. Je n'aurais jamais pensé qu'on en serait là, lui et moi à avancer ensemble pour que je fasse ce que j'aurais dû faire depuis le début. Les quelques flaques au bord des trottoirs indiquaient qu'il s'était passé un bout de temps entre mon arrivée et notre départ.
Le SDF était toujours là, fatiguée et mort de froid. Son vieux blouson délavée était taché. D'eau, d'alcool, je ne voulais pas savoir. Il était toujours assis sur un vieux bout de carton probablement trouvé lors d'un déménagement. Son visage... était trop abîmé pour appartenir à un homme qui avait vécu un jour.
Mike s'arrêta devant lui, le toisa un instant puis fouilla dans sa poche. Il se pencha vers l'homme qui eu un mouvement de recul. Ce geste me heurta en plein cœur. Comment pouvait-on laisser des humains dans la rue ? Nous étions égoïste et mauvais en passant devant eux sans même un sourire. Nous étions les mêmes, nous pouvions donc tous être dans ce cas là un jour mais ça, beaucoup l'oubliaient. L'état n'avait pas d'argent apparement. L'état ne savait pas quoi faire. L'état avait installé des aide. L'état avait d'autres priorités...
Mon ami lui tendit trois tickets restaurant. Sa mère en bénéficiait de son patron et en donnait souvent un ou deux à Mike pour s'il avait faim après les cours. Mais, il préférait les donner aux gens qui en avaient vraiment besoin. L'homme hésita avant de prendre délicatement les morceaux de papiers. Il sourit à Mike, les yeux vitreux.

- Bonne journée, souhaita mon ami.

Puis il remis son bras autours de mes épaules. J'admirais ce garçon pour de nombreuses raisons et même si nous avions parfois des différends, nous finissions toujours par nous retrouver.

Ma maison se dessina au loin. À l'habitude, la voiture de mon père était toujours garée devant a l'arrache. J'eus un pincement au cœur en constatant que deux semaines s'étaient écoulées sans la moindre nouvelle. Pas un message. Pas un appel. Pas une lettre. Rien. Un avis de recherche avait été lancé dans la région, s'étendant même au niveau national il y a trois jours. Aucun indice de sa présence pour le moment et le pire dans tout ça était que je ne pouvais rien y faire.

J'ouvris mentalement le portail. Mike me donna un coup de coude dans l'épaule.

- Tu peux pas faire comme tout le monde ? rit-il.

- Pour quoi faire ?

Il ne dit rien, haussant les épaules. Après avoir refermé le portail ce fut à la porte d'entrée de s'ouvrir toute seule sous les soupirs amusés de Mike. Il voulait vraiment que j'utilise la poignée ?

- Bon... je suis là si ça se passe mal, chuchota-t-il.

- Je n'aurai pas besoin de toi si ça se passe mal.

Il parut blessé. Haussant les sourcils, il enleva sa veste et l'accrocha sur la rambarde. Je réalisai un peu trop tard de la tournure de ma phrase et je posais ma main sur son bras, désolée.

- C'est pas ce que je voulais dire...

- T'as toujours été maladroite avec les mots mais réfléchis bien avant de parler à Sarah. Pèses ce que tu vas dire ok ?

Je hochai la tête. J'allais tout me prendre dans la tronche. Entre Sarah, Laïla et May, j'étais dans une merde pas possible.

May: J'espère que t'as un discours bien préparé. J'ai jamais vu Sarah dans cet état... Va falloir qu'on parle toi et moi hein.

Tess: Toi et moi on parlera plus tard.

Je fonçai les sourcils en enlevant ma veste. Des pas précipités dans le couloir. Je m'attendais à voir une Sarah en pleurs, déroutée et blessée par mes mots et mes actes mais c'était encore pire que ça. La jolie brune arrivait les poings serrés, la démarche cassé, le regard tellement noir que j'en vacillai. Elle me faisait vraiment peur. Elle n'avait pas l'air de vouloir s'arrêter et accéléra son pas vers moi. Mike recula, comprenant ce qu'elle avait en tête. La main de Sarah s'abattit avec une telle violence sur ma joue que je tombai sur la marche d'escaliers avec un petit cri. Il fallait que je prenne sur moi pour ne pas me relever et riposter.
C'est de ta faute Tess, pas de la sienne.
Je l'avais entièrement méritée celle-là.

Un(lim)itedOù les histoires vivent. Découvrez maintenant