Chapitre 24 - Division

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Sherlock se réveilla après avoir passé quelques longues minutes sous le regard inquiet et paternel de John.
Le docteur avait disposé un gant de toilette humide sur son front et un verre d'eau sur sa table de nuit.

- Tiens. Bois. Lui ordanna-t-il en lui tendant la boisson que le détective s'empressa d'avaler.

Revenant peu à peu à lui-même il sentit que John avait déposé sa main sur son crâne et lui caressait doucement les cheveux.
Sherlock ferma à nouveau les yeux ; non pas pour se rendormir mais pour profiter pleinement de la situation et de la tendresse du médecin à son égard. Or, il savait qu'il ne le devrait pas. Il y avait au moins une caméra dans sa chambre, ils étaient surveillés, il devait s'éloigner de John, mais rien ne lui empêchait d'attendre quelques secondes.

- Tu m'as déplacé jusqu'ici ? Demanda-t-il afin de gagner du temps.

- J'ai eu un peu d'aide.

- Gavin ?

- Qui ça ?

- Gavin Lestrade.

- Greg, oui. D'ailleurs, il t'a filmé sur son téléphone. Confia John avec un petit sourire en coin.

Les caresses de son ami ainsi que son sourire angélique plaisaient énormément à Sherlock. Il sentit son cœur accélérer fortement dans sa poitrine ; il aimait John, il en était plus que sûr, plus le temps passait et plus il se rendait compte qu'il l'aimait follement, que sans lui sa vie n'aurait plus aucun goût. Pourtant il devait tout arrêter, mettre un terme à tout ce dont il avait toujours rêvé et qu'il pouvait désormais avoir. Sinon, il détruirait leur vie à tous les deux, et John deviendrait le méchant de sa propre histoire. Alors qu'il était un ange, un docteur qui sauve des vies, qui avait sauvé la sienne. Il était sacré, avait forcément un rapport avec le divin. Sherlock ne croyait en aucune religion, mais s'il y avait un Dieu, il ne pouvait avoir pour visage que celui de John.

- Je vais bien, je veux juste me reposer.

Pars, sors, il lui était impossible de prononcer de tels mots. Mais le petit homme devait comprendre qu'il n'avait d'autre choix que de s'en aller. Plus vite il partait, moins Sherlock serait tenté de renoncer, et moins ses sentiments prendraient le dessus.

- Je veux simplement m'assurer que tout aille bien.

- Tout va très bien. Laisse moi, s'il te plaît.

Habitué à de telles réactions de la part de son colocataire, John ne s'inquièta pas vraiment. Il savait que parfois Sherlock avait l'impulsion de se retrouver seul et de sortir qui que ce soit de sa vie, mais le docteur avait trouvé sa place dans cette vie aussi houleuse soit-elle et pour rien au monde il ne voudrait en sortir.

- John, je suis sérieux.

- Comment ça ?

- Dehors.

Légèrement piqué, l'ancien soldat décida tout de même d'obéir aux désirs de son ami. Il se leva en douceur du lit et se dirigea vers la porte.

- D'accord. Si tu as besoin de moi, je suis juste à côté.

- Pourquoi est-ce que j'aurais besoin de toi ?

- Je ne sais pas. Je reviens dans quelques minutes voir comment tu te portes.

- Non.

- Pardon ?

- J'ai dit non.

John qui se trouvait dans l'entrebaillement de la porte revint sur ses pas à l'intérieur de la chambre. Quelque chose ne tournait pas rond, et il voulait en avoir le cœur net.
Effectivement, un détail lui sauta aux yeux lorsqu'il regarda Sherlock bien en détails ; ses paupières étaient humides, trop humides pour quelqu'un qui disait aller bien.

- Raconte moi.

Le détective feint ne pas comprendre, même s'il avait parfaitement compris que John se doutait de quelque chose. À ses côtés le petit homme avait grandi, évolué, il avait appris à observer et non plus à simplement regarder, il voyait les détails à présent ; c'était donc devenu de plus en plus compliqué pour Sherlock de lui mentir ou de lui cacher ses états d'âme.

- Il n'y a rien à raconter.

- Je n'en suis pas si sûr.

- Très bien, que veux-tu savoir ?

John hésita. Sherlock était doué à ce jeu, bien plus que lui. Il aurait le dernier mot, c'est certain. Il en sortirait vainqueur comme à chaque fois. Et John resterait l'éternel perdant, il n'aurait jamais de réponse à ses questions. Mais tout de même, il ne perdait rien à essayer.

- Est-ce que ça va ?

Non, ça n'allait pas, pas du tout même. Sherlock savait ce qu'il était en train de faire, il connaissait la portée qu'allaient avoir ses actes. Il prévoyait les regards meurtriers de John, son air blessé, les coups d'œil qu'il lui adressera lorsqu'il essayera de l'ignorer.

- Oui. Répondit-il avec difficulté.

- Mauvaise réponse. Annonça John du tac au tac.

Les yeux de Sherlock s'embrumèrent de plus en plus. Il fallait que John parte, il ne devait pas le voir pleurer. Sinon il resterait, il poserait des questions, et Sherlock ne pourrait pas lutter.

- Va t'en.

- D'accord, je m'en vais. Je ne comprends pas pourquoi mais si c'est vraiment ce que tu veux, alors je pars.

John avait envie que Sherlock se confie, qu'il lui dise ce qui le tracassait, même si cela revenait à le blesser, peu lui importait. La seule chose qui comptait était Sherlock.

- Sache simplement que je suis là pour toi. Quoi qu'il t'arrive. C'est toi et moi contre le reste du monde, n'est-ce pas ? Dit-il en souriant et citant son ami, pensant que celui-ci allait répondre positivement.

Au contraire, le cadet des Holmes éclata en sanglots. Silencieusement, certes, mais sur ses tempes commencèrent à couler une rivière de larmes.

John s'approcha de lui, complètement inquiet cette fois-ci de ce qu'il pouvait bien se passer. Ils étaient les rois des non-dits mais présentement le docteur souhaitait plus que tout que Sherlock lui confie ce qu'il avait sur le cœur. Quelque chose le blessait, quelque chose qui avait un rapport avec eux deux, il devait le savoir.

- Sherlock...

- Sors ! Je veux juste que tu sortes ! Je n'ai pas besoin de ton aide ! Hurla le détective à plein poumons.

Lentement, John recula ne quittant pas Sherlock des yeux. Il était habitué à sa mauvaise humeur, sa rudesse, ses mots parfois blessants. Mais jamais le sociopathe n'avait été si infect et repoussant à son égard.

Il prenait son temps, laissant à Sherlock la possibilité de s'excuser et de retirer ce qu'il venait de dire. Mais rien. Le détective ne prononça pas un mot. Il regardait simplement son ami quitter sa chambre, se retenant de lui hurler de rester, de ne jamais partir, car il avait besoin de lui, plus que jamais.

Le sociopathe décida de se retourner, définitivement. Ne plus faire face à John, ne plus faire face à quoi que ce soit, au moindre sentiment. Fermer son cœur, emprisonner ses émotions. Redevenir l'homme froid qu'il avait toujours été jusqu'à ce qu'il rencontre l'homme qu'il venait de jeter à la porte.

Escape Your Deduction - JohnlockOù les histoires vivent. Découvrez maintenant