Chapitre 5 - Regrets

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John serra ses poings plus fort. De plus en plus fort. Si bien que ses ongles commençaient à rentrer dans les paumes de ses mains. Tant pis, pensa-t-il. Il était trop énervé contre lui-même pour y porter une quelconque attention. Après tout il méritait. Il méritait d'avoir mal, ça lui apprendrait.

Pourquoi avait-il dit ça ? Pourquoi faisait-il croire à Sherlock qu'il continuait à lui reprocher la mort de Mary ? Il le blessait en disant cela ; et le pire était qu'il le savait très bien. Pourquoi cherchait-il à lui faire du mal ?

- Je... Désolé. Je ne le pense pas du tout.

Le regard du détective était fixé sur son ami. S'il était capable de lui montrer de la compassion par ce regard, il le ferait à coup sûr. Mais Sherlock n'était pas de ceux doués pour les sentiments.

Sherlock se souvenait de la première fois où John lui avait dit que, finalement, le décès de Mary n'était pas de sa faute. Le petit homme avait finit en larmes, et le sociopathe déboussolé l'avait pris dans ses bras.

Son asociabilité certaine avait rendu la tâche extrêmement compliquée. Il savait que John éprouvait une tristesse profonde, il savait qu'il était la seule personne à pouvoir faire quelque chose pour lui. Mais quoi ? Que pouvait-il bien faire au juste ? Il avait décidé de laisser parler ses sentiments les plus profonds, les seuls qu'il avait et qu'il pouvait ressentir. Il ressentait de la compassion pour le docteur, et c'était rare que cela lui arrive ; il n'avait aucun problème à annoncer à quelqu'un que son compagnon avait des aventures extraconjugales, ou de dire à une fillette qu'elle venait de perdre ses parents. Mais avec John tout était différent.

Le prendre dans ses bras avait été la solution la plus évidente ; un soutient physique valait tout autant que des mots réconfortants qu'il n'arrivait pas à trouver. Et quelques fois, les paroles ne sont pas assez puissantes.

Il n'avait jamais clairement eu l'occasion de toucher John, d'avoir un réel contact physique avec lui ; quelque chose d'amical ou du moins de gens plus proches que de simples collègues. Mis à part ce moment là, la seule fois où une telle chose s'était produite fût lorsque les deux hommes étaient attachés l'un à l'autre par des menottes et qu'ils s'étaient enfuis main dans la main afin d'éviter la douleur que créait la non-coordination de leurs corps.

Il avait senti que dans ses bras John allait mieux. Son cœur battait plus vite et son corps se réchauffait. Il avait eu besoin de ce rapprochement, besoin de ce contact. Et dire que Sherlock était resté totalement indifférent serait mentir. Le sociopathe avait ressenti un sentiment d'apaisement. Lui aussi avait été blessé et meurtri même s'il n'osait pas se l'avouer ; et avoir John dans sa vie, avoir une amitié plus forte que tout, était une réelle bénédiction.

Prenant en compte ce qu'il venait de se produire et ce souvenir, Sherlock hésita. Actuellement John ne pleurait pas, il était simplement énervé contre lui-même. D'habitude lorsque Sherlock ressentait de la colère, il voulait qu'on le laisse seul. Cependant, s'il venait à quitter le 221B pour permettre à John de respirer sans parasite, il lui donnerait l'impression d'être lui-même énervé alors qu'il ne l'était pas le moins du monde. Ou pire, John penserait que Sherlock se fiche complètement de lui ; ce qui était épouvantable car la seule personne pour qui le sociopathe avait un quelconque intérêt était bel et bien lui.

Si le petit homme avait été en train de pleurer ou de se morfondre, tout aurait été beaucoup plus facile pour Sherlock. Ayant déjà vécu une telle situation, il en connaissait déjà la solution. Mais en ce moment même ; devait-il le prendre dans ses bras ? Le réconforter ?

Hésitant, Sherlock s'approcha. Les bras ballants le long de son corps svelte. Que pouvait-il judicieusement faire d'eux ? Il en leva un tout en se disant qu'il trouverait bien. Finalement, il n'en avait aucune idée. Et il avait plutôt l'air stupide avec un bras à moitié dressé. Sans grande confiance en lui, il posa sa main sur l'épaule de John qui reprenait peu à peu sa respiration qui s'était coupée sous le coup de la colère.

Les deux hommes se regardaient à présent droit dans les yeux. La poigne de Sherlock était délicate mais se raffermissait petit à petit comme pour assurer à son ami qu'il était présent et qu'il ne le lâcherait pas, autant physiquement que moralement.

La main du détective sur son épaule diffusait une chaleur bienvenue dans le corps de John. Au fur et à mesure que sa respiration se calmait, sa colère se dissipait et laissait place à un sentiment de médiocrité puis finalement à une sérénité totale. Sherlock, quant à lui, demeurait impassible ; John était incapable de deviner ce à quoi le génie pouvait bien penser. La seule chose qu'il savait était que cet homme avait réellement le pouvoir de l'apaiser. Simplement en le touchant et en plongeant son regard dans le sien, il était capable de faire fuir toutes ses émotions négatives.

Mais lui, de quoi était-il capable ? Sherlock avait une emprise positive -lorsqu'il le voulait bien- sur lui ; en contrepartie qu'avait-il a lui offrir ? Il ne lui apportait rien de bon. Rien de mal non plus, certes ; mais les efforts, la compassion, allaient toujours dans un seul sens.

Sherlock, le sociopathe, celui qui avait des difficultés avec les sentiments et les relations sociales était celui qui montrait le plus de tendresse et de sensibilité. Était-ce son passé militaire qui empêchait John de s'adoucir autant qu'il le voudrait en compagnie de son ami ? Ou simplement n'en était-il pas capable ?

Non. La faute lui revenait. John se le répétait. Et encore une fois, les émotions et les circonstances le dépassaient.

Il se défit de la poigne de Sherlock, un peu plus violemment qu'il ne l'aurait voulu.

- Je vais me recoucher.

Escape Your Deduction - JohnlockOù les histoires vivent. Découvrez maintenant