La vie vaut d'être vécue

Chapitre 39

PDV MIA

Je n'entend plus rien autour de moi. J'ai l'impression de repasser trois mois de ma vie dans mon esprit en l'espace de dix secondes. Ma tête va exploser. J'ai forcément loupé quelque chose, un détail, n'importe quoi qui aurait pu me mettre la puce à l'oreille.

Il a le virus. Ca change tout. Ou ca ne change rien. Je ne sais plus.

Il ne m'a pas répondu pendant cinq jour au début de notre rencontre. Il lui etait arrivé quelque chose ?

Il n'a jamais voulu s'attacher a une fille avant moi.

Il a toujours vécu sa vie a fond sans faire attention autour de lui.

Son père a vécu autre chose d'horrible que le décès de sa femme, il me l'a dit mais je n'y est pas prête attention. Je pensais qu'un jour il pourrait se confier sur ca, quand il sera prêt.

Mon chien est couché devant ses pieds comme pour mes prévenir durant les séances au centre.

Je repasse tous ses détails en essayant d'assimiler l'information. Il m'a menti durant tout ce temps. Mais moi aussi.

Je n'entends plus rien, que se passe-t-il autour de moi ? Je ne veux pas le faire souffrir a cause de ma maladie, mais lui aussi a la maladie. Non. Ce n'est pas possible. Charlie ne peut pas vivre ce que je vis. Pas lui. Ne me prenait pas ce que j'aime le plus s'il vous plait.

Non. Je ne l'aime pas. Je ne peux pas. Il va me faire souffrir. Comme moi je pourrais le faire souffrir. Nous serions fou de rester ensemble alors que du jour au lendemain l'un de nous pourrait mourrir. Je ne peux pas m'imaginer lui faire subir une nouvelle perte, ou encore pire, que se soit lui qui me laisse seul.

Depuis quand je pense a moi avant les autres ? Suis-je assez égoïste pour me séparer de lui et me protéger ? Je ne crois pas.

Mais depuis quand il a le virus ? Est-il plus avancé sur la liste d'attente pour le sérum ? Je l'espère.

Quelqu'un vient de parler. J'entends sa voix mais je ne comprend pas. J'entends un chien aussi. Mon chien. Celui qui m'a dit que mon copain avait le virus. Honey. Je comprend mieux ses réactions face a Charlie. Depuis le début il voulait me prévenir. Il voulait faire le travail que je lui ai appris. Mais je ne le laissais pas faire.

C'est moi qui est appris a mon chien a savoir quand une personne avait le virus. Sans ca, je n'aurait peut etre jamais su. Ma vie aurait pu continuer comme avant. Est ce que je vais toujours etre heureuse malgré ca ? Est ce que je vais toujours etre avec Charlie malgré ca ?

Quelqu'un me secoue en me prenant pas les épaules. Je reviens a moi et voit le visage de Charlie tout proche du miens. Il est inquiet, ca se voit a son expression.

-Mia ! Tu m'entends ?

Il crie, dans tous ses etats.

-Oui. Je t'entends.

Il souffle, comme soulagé.

-Mon dieux tu m'as fais peur.

Il me prend dans ses bras et pose ses lèvres sur mon front.

Peur ? Pourquoi a-t-il eu peur pour moi ? Il a le virus. Mais il ne sais pas que moi je l'ai. Sait-il que je sais qu'il a le virus ? A-t-il peur pour lui ? Et surtout, sait-il qu'il a le virus ? Je ne me sent pas capable de lui annoncer moi meme.

Trop de question passe dans ma tete. J'ai besoin d'espace, de réfléchir. Je me dégage de ses bras. Il me regarde comme si il ne comprenait pas. J'ai quand meme besoin de lui poser des questions, de lui en parler.

-Tu as le virus Charlie ?

Il blanchit directement et ouvre les yeux comme des soucoupes. Il me lache et fait les cents pas dans le champs. Il passe sa mains dans ses cheveux. Il ne sait pas quoi pensé. Je le connais depuis assez longtemps maintenant pour comprendre quand quelque chose ne va pas. Il sait qu'il est malade mais ne pensait pas devoir me l'annoncer si tot. Pensait-il me le dire un jour ?

-Pourquoi tu dis ca ? D'un coup la ? Tu le sais depuis combien de temps ?

Je tourne le regard vers Honey, qui me regarde en secouant la queue. Il n'est plus couché devant Charlie mais je sais ce qu'il attend. Rien que de penser a le récompenser pour ce qu'il vient de faire me donne envie de vomir. Je ne pourrait pas.

-Honey, commençe-je a expliquer. C'est un chien pisteur de Mannay. Il se couche devant les gens qui ont le virus. Je l'ai dressé et nous sommes bénévole a centre du virus depuis presque deux ans. Il n'arrête pas d'aboyer quand il te voit et tu es le seul avec qui il fait ca. Il vient de se coucher devant moi et me regarde pour que je lui donne...

Je m'arrête en plein phrase incapable de le dire. J'ai l'impression d'être en plein cauchemar. Ce n'est pas possible. C'est moi qui est le virus ! Pas lui.

Je ne connais personne avec la meme maladie que moi et il a fallu que ca tombe sur lui. Pourquoi ?

-Écoute Mia, je suis désolée. Je comptais t'en parlais, je te jure ! Et si on allait chez toi pour en parler ? Ce serait plus...
-J'ai le virus Charlie.

Il se stop et me regarde. Il n'a pas l'air d'avoir fait le liens entre le fait que Honey est un chien pisteur et que moi j'ai le virus. Je lui dis donc clairement. Je ne m'imaginé pas du tout lui dire comme ca. Je pensais que nous allions avoir une vrai discution. Mais tout ne se passe pas comme prévu, comme a chaque fois.

Je sors de mes pensées et regarde Charlie. Il ne réagit plus.

-C'est moi qui est le virus Mia. Pas toi. Je sais que ca peut te perturber mais..
-Non. Tu as le virus mais moi aussi. Mon chien est pisteur pour pouvoir aidé les gens comme moi.

Je prend une grande respiration et rajoute:

-Comment toi.
-Non. Je ne te crois pas. Ce n'est pas un jeu Mia. Je ne rigole pas avec ca.

Il recule d'un pas pour s'écarter de moi. J'ai l'impression que mon coeur va explosé. Il me regarde comme si j'avais dis la pire chose qu'il pouvait attendre. J'ai soudain mal pour lui. Il a le virus. Et ca me tue (sans mauvais jeu de mot) tellement je suis triste pour lui. Alors si lui ressent la meme chose que moi, je suis encore plus triste pour lui.

-Je suis désolée. Je ne te ment pas. J'ai le virus depuis que j'ai neuf ans. Les rendez-vous toutes les deux semaines, les crises d'asthme, la tonnes de médicaments tous les jours. Je connais. Je vis pareil. Je voulais aussi te le dire. J'ai essayé plusieurs fois, mais a chaques fois quelque chose m'en empêcher, ou je n'y arrivait pas.

Il se retourne et je vois qu'il est très énervé. Pendant deux secondes j'ai peur que ce soit contre moi, mais très vite je comprend. Il est énervé contre le monde. C'est a cause de lui que nous sommes dans cette situation. Savoir que nous allons mourrir est une chose a laquelle nous sommes habitué. Mais savoir que l'autre va mourrir fait mal. Très mal.

-Putain de merde, crie-t-il en shootant dans un coquelicot.

Puis il me regarde. Je ne l'ai jamais vu aussi triste que ca. Enfaite, je réalise que j'ai toujours vu joyeux, heureux, drôle, de bonne humeur. Comment fait-il ? Il s'approche de moi et me prend dans ses bras. Je me rend compte que je me suis trompé. Je n'ai pas besoin d'espace, j'ai besoin de Charlie. Etre tout contre lui est une des seuls choses qui pourrait me réconforter. Nous restons là pendant un moment. Au milieu de jolies fleurs, alors que j'ai la sensation que le monde autour de moi s'écroule.