Je suis assise sur un fauteuil bleu, comme la couleur des murs de la chambre. Je pense que cette couleur va finir par me rendre malade. Je passe le plus clair de mon temps libre ici depuis une semaine, et je n'en peux déjà plus. Je sais que ce risque de durer encore un temps alors j'évite d'y penser au maximum. Cette dernière semaine a été très monotone. Je n'ai même pas l'impression de l'avoir vécu. J'étais soit à l'hôpital avec Charlie, soit au lycée. Je n'ai pas vu le temps passer mais en même temps j'ai l'impression que Charlie est ici depuis une éternité.
Quand je suis rentrée chez moi le samedi soir ma mère m'attendait sur le canapé. Nous avons eu une conversation sur ce qui se passait bien sûr, pendant la semaine c'est elle qui m'amenait à l'hôpital. Cela lui permettait de rester un peu avec Gabin, pour le soutenir. Mon père travaillait, mais il est venu plusieurs fois lui aussi. J'ai vu que ça faisait beaucoup de bien au père de Charlie d'avoir ses amis autour de lui. C'est une épreuve dure pour un père, encore pire s'il est seul.
Bien sûr, j'ai dû aller en cours malgré les circonstances. Les personnes autour de moi ont compris qu'il se passait quelque chose de grave dans ma vie. Mais je n'ai pas vraiment répondu aux questions alors ils ont fini par abandonner, me laissant tranquille. Heureusement, car je ne sais pas comment j'aurais fait si j'avais eu dix questions par heure. Cassiopée est restée avec moi tout le temps. Même si je ne parlais pas, le fait de la sentir près de moi était vraiment agréable. Les professeurs aussi se sont rendu compte que je n'étais pas dans mon état habituel. J'ai eu plusieurs fois des remarques sur mon manque de concentration. Mon professeur de maths a même tenté de savoir ce qui m'arrivait en me prenant à part à la fin du cours. Je n'ai pas vraiment voulu entrer dans les détails. Je lui ai juste dit que ça allait s'arranger, que j'étais juste fatigué.
Heureusement, c'est les vacances. Je vais pouvoir passer plus de temps à l'hôpital, et surtout me reposer. L'état de Charlie n'a pas vraiment évolué, ni positivement, ni négativement. Les médecins ont dit à Gabin qu'il était toujours dans un état critique, mais que ça ne s'était pas empiré, ce qu'ils craignaient de base. J'ai toujours un grand espoir que Charlie se réveille un jour. Je lui parle beaucoup, je suis sûr qu'il m'entend. Alors je l'encourage et lui dit de se battre pour revenir permis nous.
Gabin est parfois avec moi dans la chambre, quand me mère n'est pas là pour lui tenir compagnie. Nous parlons beaucoup tous les deux. Il me raconte des anecdotes sur la vie de Charlie. Il me parle de son enfance, de sa mère, de ce qu'il aimait faire. C'est agréable car parfois nous rigolons, ce qui me fait un peu oublié la gravité de la situation.
Aujourd'hui nous sommes lundi. Je suis ici depuis une bonne heure. J'ai la main de Charlie dans la mienne. Je le regarde. Il a l'air apaisé. Son visage n'est pas crispé, comme s'il n'était pas inquiet. Peut-être que lui sait s'il va revenir un jour.
-J'ai vu Charlie. Ce que tu as fait dans le hangar. Je n'y crois pas. Comment tu fais pour être aussi talentueux. Je crois vraiment que tu devrais faire quelque chose de tout ça. Tu ne peux pas dessiner seulement pour ce hangar. Je sais qu'un jour tu vas te réveiller, et à ce moment-là je te donnerai tout ce dont tu as besoin pour montrer ton art à tout le monde. Ce que tu as fait est magnifique, merci beaucoup.
Je m'essuie les yeux, me rendant compte que je suis en train de pleurer. Ça m'arrive tout le temps en ce moment. Je ne m'en rends même plus compte. Comme si mes joues étaient tellement habituées qu'elles ne sentaient même plus les larmes coulées.
Je sursaute quand j'entends la porte s'ouvrir brusquement. J'essuie vite mes joues espérant que ça ne se voie pas trop et me retourne. C'est une infirmière. Je ne l'avais jamais vu. Quand je venais pendant la semaine c'était souvent à des horaires ou l'infirmière ne venait pas. Je me lève de ma chaise et la regarde.
-Oh, bonjour. Je ne savais pas qu'il y avait quelqu'un. J'ai vu monsieur Jones dehors alors j'ai présumé que... Je peux revenir plus tard si tu veux.
-Hum. Non non, ça va. Faite ce que vous devez faire.Elle me sourit gentiment et avance vers Charlie.
-Je m'appelle Marion. Je suis l'infirmière qui s'occupe de Charlie le plus souvent. Même quand il venait pour un simple contrôle. Et toi, tu es qui pour lui ?
-Quand il vient.
-Pardon ?
-Vous avez dit « quand il venait ». Il faut dire « quand il vient ». Il n'est pas encore mort.Elle me regarde bouche bée, sans savoir quoi dire. Je sors de la chambre lui laissant faire son travail. Quand j'arrive dehors, je vois Gabin seul sur une chaise dans le couloir. Je m'assieds à côté de lui en soufflant.
-C'est qui Marion ? Vous la voyiez souvent ?
-Oui, Charlie l'adore. Elle s'occupe souvent de lui quand on vient.
-D'accord.
-Pourquoi ?Je hausse les épaules et laisse sa question en suspens. Je ne la connais pas cette fille, je ne peux pas la juger par une phrase qu'elle a dite. Si Charlie l'aimait bien, elle ne doit pas être si terrible.
-Ça va aller Mia. Tu le sais hein ?
Je tourne la tête vers lui et le regarde dans les yeux. J'y vois de la tristesse, mais aussi de l'espoir. Il y croit, et ça devrait me suffire. Mais il a y quelque chose que je n'arrive pas à extérioriser qui m'empêche d'être aussi forte que je le prétends.
-On s'est disputé le vendredi soir. Très fort.
-Oh. À propos de quoi ?
-Peu importe, ce que je veux dire c'est que...Je n'arrive même pas à expliquer ce que je ressens tellement je me sens horrible. Comment dire de telle chose au père de son copain ? C'est impossible.
-Tu peux tout me dire Mia. Je ne suis pas là pour vous juger. Je sais comme ça peut être compliqué à vos âges les relations, encore pire avec le virus au milieu. Je dis à vos âges, mais tu sais que ce ne s'améliore pas en grandissant. Quand on aime une personne, on se dispute avec, c'est normal.
-Mais je lui ai dit des choses affreuses. Je ne sais même pas comment ça a pu sortir de ma bouche.
-Si tu ne le pensais pas, il le sait. Il te connais.
-Je n'en suis pas si sur.Marion ouvre la porte et sors de la chambre. Elle referme la porte tout doucement, comme si elle risquait de réveiller Charlie et s'adresse à Gabin.
-C'est bon, j'ai fini, je reviendrais dans l'après-midi. Appelez moi s'il y a quoique ce soit.
-Bien sur.
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La vie vaut d'être vécue
Teen FictionMia et Charlie ont un point commun: tous les deux sont atteints du virus de Mannay. Ce « virus » n'est même pas contagieux mais il est apparu sur terre il y a 30 ans et a déjà tué des millions de personnes. Ils sont donc presque sûrs de mourrir pré...