Chapitre 37

17 6 10
                                    

Alors que le violon chantait de toute son âme, nous avancions à pas de loup. Nous sommes passés rapidement dans le couloir pour échapper à son champ de vision. La maison lugubre, probablement esclave de notre géniteur, comme une extension de sa personne avait du lui souffler notre présence car la musique s'est stoppée, ne manquant pas de nous faire sursauter. 

- Venez là, aboya notre géniteur sévèrement.

Nous nous rendîmes dans le salon, face à face avec son air cruel et rude. Il nous dévisageait comme un chasseur se préparant à abattre sa proie.

- Vous avez vu l'heure qu'il est ? demanda-t-il énervé. Il est quelle heure Noah ?

Il savait pertinemment que mon frère ne savait pas lire l'heure. Il cherchait juste un prétexte pour se défouler sur nous une nouvelle fois. Noah était complètement déboussolé, il regardait sa petite montre offerte par nos grands-parents, suant de peur. Je lui ai soufflé la réponse, je crus par chance que notre père était trop bourré pour entendre notre tricherie. Il fit mine de rien dans un premier temps.

- Dix-huit heures, déclara Noah doucement.

Notre géniteur prit une grande inspiration et se laissa tomber dans son fauteuil, nous regardant toujours de la même façon. Il tendit sa main et fit signe à Noah de s'avancer.

- Donne-moi ta montre, ordonna-t-il la main tendue.

J'eus un pincement au cœur en voyant mon frère s'avancer, tremblotant, en défaisant son bracelet. Mon père saisit la montre et la fracassa contre le sol, faisant sangloter mon petit frère. Noah avait été tellement fier quand nos grands-parents lui avaient offert. Il la portait tout le temps, il dormait même avec pour être sûr de ne jamais la perdre.

- Quand on ne sait pas lire l'heure on n'a pas besoin de montre, cracha notre géniteur.

Il la ramassa puis la rendit à Noah, toute cassée. J'étais estomaquée devant ce geste, il ne voulait que le détruire, comment pouvait-il se délecter des larmes de son fils ? 

- A quelle heure vous êtes supposés rentrés ? me questionna mon père, jouant avec un couteau entre ses mains.

- Je... Je ne sais pas, tu ne nous as pas donné d'heure, bégayais-je.

- Pardon ? me fit-il répéter.

- Tu ...

Je fus interrompue par le couteau qui frôla mon bras avant de se planter dans le mur faisant hérisser mes poils. Cette fois nous tremblions de peur. La sonnerie du téléphone nous ramena à la réalité. 

Sauvés par le gong. Mon père, partit répondre en nous menaçant du doigt auparavant. Il nous avait silencieusement indiqué de ne pas bouger. Alors qu'il répondit, nous avons couru dans ma chambre. J'ai raté une marche des escaliers et me suis violemment cognée le genou mais l'adrénaline ne laissa aucune place à la douleur. Aussitôt que notre père entendit le bruit sourd causé par ma chute, il raccrocha le combiné et se lança à notre poursuite. 

J'ai bloqué la porte de ma chambre à l'aide d'une chaise. Il hurlait de rage derrière, hors de lui. Nous pleurions en assistant à la porte qui manquait de céder à chaque coup d'épaule qu'il devait donner. Il proférait des menaces, nous promettant de nous tuer. Quand il était secoué par une telle rage, on aurait pu croire qu'il était possédé. J'ouvris la fenêtre de ma chambre et sans réfléchir, j'ai sauté, suivie par mon petit frère. 

Nous avons atterri sur le tas de bois, détruisant un peu plus nos articulations.Puis il fallut à nouveau sauter, ignorant tous les dangers, guidés par la peur pour s'enfuir dans les bois. Il ne mit pas longtemps à fracasser la porte de ma chambre et à nous imiter pour se lancer à nos trousses. Nous avons couru à travers les bois, traversant la rivière gelée et la plaine.

 Nous avons fini par atteindre la maison de nos grands-parents, après une course effrénée. Nous tambourinions à la porte, les suppliant de nous ouvrir car on savait que notre père ne tarderait pas à rappliquer. Notre grand-père ouvrit et n'eut pas le temps de dire quoi que ce soit car nous l'avions déjà bousculé pour rentrer se mettre en sécurité. Nous reprenions notre respiration, mais des pneus crissèrent dans le jardin parfaitement entretenu de la chaleureuse maison. Nous eûmes à peine le temps de constater que notre mère était déjà partie. 

Mon grand père saisit le fusil de chasse qu'il gardait dans le porte parapluie à côté de la porte d'entrée. Il ouvrit la porte d'un coup sec et alluma les grandes lumières du porche. Nous sortîmes derrière lui, voulant connaître le dénouement de la situation. Notre géniteur était déjà sorti de la voiture, et mon grand-père le mit en joue.

- Rentre chez toi ! hurla-t-il de sa voix grave et usée.

- Michel, tu sais comment sont les gosses, je ne sais pas ce qu'ils t'ont dit mais on s'inquiétait, expliqua notre père, feignant un air extrêmement sympathique.

- Tu fais un pas de plus je te flingue ! répliqua mon grand-père toujours sur le même ton.

Mon géniteur fit alors tomber son masque de gentil, même s'il était assez loin, nous avons vu son regard changer.

- Espèce de bâtard, tu paies rien pour attendre ! cria notre géniteur. Je te conseille de ne fermer qu'un œil la nuit parce que je viendrai vous buter dans votre sommeil, toi et ta salope ! Après je brûlerai votre putain de baraque de merde ! cracha-t-il fou de rage en gesticulant dans tous les sens pour appuyer ses menaces.

Il avait l'air sénile, on aurait dit le diable en personne, aucune once de gentillesse, d'humanité n'émanait de sa personne. Mon grand père arma son fusil, ne se laissant pas impressionner. Mon père, dans sa folie attrapa un nain de jardin de ma grand-mère et le jeta contre une vitre de la maison, provoquant un fracas monstre. Il se dirigea ensuite vers sa voiture avant de cracher à nouveau son venin.

- C'est une promesse Michel, tu es un homme mort, et j'irai pisser sur ta tombe !  

✎ ✎ ✎ ✎ ✎ ✎✎✎✎✎✎

Voilà qui en révèle davantage sur l'enfance de Laureen, et surtout sur l'autre monde ! 

A demain pour la suite ^^

Ne Ferme Pas Les YeuxOù les histoires vivent. Découvrez maintenant