Détesté Newt

9 Mars

Tommy, 

J'ai passé la semaine la plus étrange de ma vie. Pendant ces cinq jours de cours, j'ai eu l'impression de flotter dans un rêve comme si je n'étais pas bien réveillé. Les évènements sont arrivés comme un serpent vicieux, s'enroulant autour de mes jambes et remontant le long de mon buste pour me faire prisonnier de son corps, m'étreignant dans une pression infernale. Tout est arrivé avec lenteur, progressivement. Je ne m'en suis d'abord pas vraiment méfié, je n'avais pas de raison. 

Cette situation étrange a débuté dès le commencement de la semaine. Je suis arrivé ce lundi matin, pas très réveillé en cette reprise des cours. Mes paupières lourdes et mon cerveau embrumé n'ont pourtant pas raté ce changement chez toi. J'ai tout de suite remarqué les cernes immenses sous tes yeux. Tu semblais éreinté, plus seul que d'habitude. Tu avais l'esprit ailleurs et tu te rongeais les ongles. Tu étais assis, seul dans ton coin et Gally m'a dit que tu lui répondais à côté de la plaque. Tu étais dans ton monde, lointain. Tu regardais partout autour de toi avec crainte et j'aurais presque pu voir une aura de peur autour de toi tant tu te méfiais de tout ce qui t'entourait. Ca se voyait à des kilomètres Tommy. Je me suis approché de toi et je t'ai tiré la manche, inquiet. Je n'aime pas te voir si mal, si perturbé. J'ai mon cœur qui se serre dans ces moments et je veux t'aider. Tu t'es tourné vers moi et tu as eu cette lueur dans les yeux, celle que tu as quand tu me vois. Un mélange de mélancolie, de tristesse et d'amour comme j'ai pu l'apprendre. 

" - Ca va Tommy ?

- Oui ça va. Laisse moi s'il te plaît.

- Tu es ailleurs et tu as l'air fatigué et inquiet... 

- Retournes avec les autres."

Tu ne me regardais pas et ta nervosité aurait presque pu me contaminer, bien que je n'ai aucune raison d'être en proie au stress à ce moment. Ta réponse n'était pas sèche comme souvent. C'était plutôt une supplique d'un blessé grave qui voit la mort approcher. Ca n'a fait que m'inquiéter un peu plus à ton sujet. Ca se voit que tu ne vas pas bien et par moment je me demande si tes pensées ne sont pas morbides. Je pourrais t'aider, je veux t'aider ! Mais tu ne me dis rien et ces dernier temps je ne peux que te regarder flétrir lentement. C'est douloureux. Et encore une fois tu refusais mon aide. Tu t'es levé et tu as disparu dans les couloirs rapidement, la tête baissée. J'ai poussé un soupir contrarié d'être impuissant face à ta peine et j'ai été retrouvé mes amis, l'esprit tourné vers toi. J'ai gardé un œil soucieux sur toi le restant de la journée.

Le lendemain tu avais cette même tête de déterré. Toujours seul, une goutte de sang tombant d'un doigt que tu avais trop mordu. Je commençais à vraiment m'inquiéter pour toi. Tu me faisais peur dans cet état. Je m'imaginais le pire et à cet instant, je savais que tu aurais pu être capable de tout. Alors je ne t'ai pas lâché du regard. Dès que je finissais de copier une phrase en cours, je te lançais un regard pour m'assurer que tu étais toujours là, entier. Aux récréations, je m'arrangeais pour que tu sois toujours dans mon champ de vision et à midi je m'étais précipité sur la table derrière Gally qui mangeait face à toi. J'ai demandé à Minho de se décaler alors qu'il posait son plateau face à moi. Il m'a jeté un regard interrogateur et s'est assis face à Brenda, laissant mon regard se poser sur toi sans obstacles. Et puis il s'est finalement passé un truc en maths.

Alors qu'on corrigeait le dernier exercice de ce cours, tu observais l'extérieur avec attention, la jambe droite agitée de tics nerveux. C'est Minho qui m'a tiré de mon observation inquiète. Il a fait glisser un carnet marron entre nous. Il avait l'air plein à craquer, des papiers et diverses choses entre les pages. J'ai eu une impression de déjà vu et j'ai froncé les sourcils à l'adresse de Minho. Il ne me regardait pas et copiait la bonne réponse de l'exercice, jouant à la merveille l'élève attentif.