11 Mars

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Je suis rentré chez moi après manger. Je ne me sentais pas capable de me présenter en cours. Je ne voulais pas affronter le regard des autres parce que j'étais sûr qu'ils avaient tous été mis au courant par Minho. J'allais passer pour le faible et je ne voulais pas de tous leurs regards dégoûtés et moqueurs. Je ne voulais pas qu'on me juge. Je ne tenais pas à être exposer. 

J'ai fermé la porte de l'appartement familial avec une pointe de remord. Mes parents allaient encore me chercher des noises. Mes notes chutaient en ce moment. Je n'avais pas de but et je trouvais ça inutile de continuer d'étudier sans savoir où ça me mènerait. Je n'avais même plus envie de faire de la physique alors que c'est sûrement ce qui me plaît le plus. Je laissais tout tomber, ça ne servait à rien. Un soir, mes parents finiraient par me prendre à part pour me faire la morale et me remonter les bretelles. Viendrait alors le temps des révélations et je ne suis pas sûr qu'ils soient prêts à entendre que je suis certainement dépressif en plus d'être amoureux de toi. Ils ont déjà eu du mal à se faire au fait que je puisse aimer les garçons...  

Je suis entré dans ma chambre en serrant toujours tes lettres contre moi. Je ne les avais pas lâché pendant tout le trajet. J'avais l'intuition qu'elles contenaient des mots importants alors pour rien au monde je n'en aurais laissé tomber une. J'ai posé les deux liasses de lettres sur mon bureau avec délicatesse, comme des parchemins précieux, vieux et poussiéreux qui menaçaient de tomber en poussière au moindre mouvement trop brusque. Je me suis ensuite assis sur ma chaise de bureau, tout près d'elles. Pendant un long moment je les ai fixé. Je ne saurais dire pourquoi exactement mais j'appréhendais leur lecture. Je les fixais intensément, espérant peut-être déchiffrer leur contenu sans avoir besoin de les ouvrir. Mais je n'avais pas de rayons X à la place des yeux alors j'ai tendu une main hésitante et j'en ai saisi une au hasard. 

Sur l'enveloppe, il y avait mon nom et mon adresse écrits de ta main. J'ai admiré ton écriture cursive et les lettres tracées au stylo noir élégant. Puis j'ai décollé l'enveloppe, lentement, précautionneusement. J'ai retenu ma respiration quand j'en ai sorti un papier blanc, celui qu'on met dans les imprimantes. Il était plié en trois parties égales, les plis marqués soigneusement. Je l'ai déplié en retenant mon souffle sans trop savoir pourquoi. J'ai découvert à nouveau ta belle écriture, traçant des lettres légèrement penchées vers l'avant. Les lignes étaient parfaitement droites, préalablement tracées au crayon à papier comme le témoignaient certaines traces mal effacées. J'ai commencé ma lecture le cœur battant. Mes mains tremblaient et gênaient ma lecture alors j'ai fini par poser la lettre à plat sur mon bureau. Le doux surnom que tu me donnes marquait l'entête et m'a poussé à approfondir ma lecture. J'ai parcouru avec attention chacune de tes lignes, déchiffré chacun de tes mots et choyé chacune de tes lettres. 

Malgré quelques fautes d'orthographe, tes mots étaient magiques. Tu retranscrivais tout. Absolument tout. J'ai vu quel connard j'avais était les années précédentes et bien que je sache déjà à quel point j'avais été méchant, je me suis choqué moi même. Les choses avaient été bien pire à supporter pour toi que ce que je n'avais imaginé. Je me suis senti coupable, horrible. Les larmes dévalaient à nouveau mes joues quand je suis arrivé à la fin. Je l'ai relu parce que je n'arrivais pas à croire que tu puisses vouloir de moi après toute cette douleur que je t'avais fait subir. Je tombais des nues parce que je prenais conscience de toute l'ampleur de la chose, parce que, si je savais être un démon, je ne pensais pas être le pire que l'enfer puisse porter. Mais aussi parce que c'était ton journal à toi. Tu m'écrivais des lettres. Celle que je venais de lire datait de l'année dernière. Tu me racontais ta journée, plus précisément les horreurs que je t'avais fait subir. J'ai compris ta démarche, tu faisais en sorte qu'on soit à égalité. Mais Newt, ce n'est pas à toi de te racheter. Surtout pas après ce que je viens de lire. J'ai été tenté de m'arrêter puisque définitivement, j'étais loin devant toi niveau bêtises et horreurs. Mais sans doute comme toi, la curiosité a gagné rapidement et je me suis emparé d'une seconde lettre avec cette culpabilité qui ne me lâche plus.

Détesté NewtOù les histoires vivent. Découvrez maintenant