Chapitre 24

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Les trois chasseurs et la guérisseuse m'entraînent à l'intérieur de la maison, si on peut réellement appeler cela une maison. J'ai l'impression que le bâtiment sert de place du gouvernement en plus de fournir un logement au chef de la tribu. Je suis les Sauvages qui me guident vers des escaliers qui plongent jusqu'au sous-sol d'où une forte odeur de terre provient. C'est la gorge nouée et les mains moites que je descends les marches à la suite du géant. L'idée de me retrouver sous terre, moi qui ai passé ma vie dans des gratte-ciels, est loin de me rassurer. Je combats un nouveau sentiment de panique tandis que je m'enfonce dans les profondeurs, suivie de Val.

Une fois en bas des escaliers, j'observe la pièce dans laquelle nous nous trouvons. Évidemment, celle-ci n'a pas de fenêtres, mais elle n'a pas de portes non plus. C'est une immense salle, illuminée par les bâtons en feu accrochés aux murs, dans laquelle de nombreux objets poussiéreux de toutes sortes y sont entreposées. Des piliers construits ici et là permettent de maintenir le plafond et d'éviter que le bâtiment ne s'écroule sur nous. Au fond de la cave, je peux apercevoir Tor et un autre homme discuter à côté d'une une quantité impressionnante de livres qui atteint presque le plafond.

Encore une fois, Val perd patience. Elle enfonce le côté contondant de son arme entre mes omoplates pour m'ordonner d'avancer à la suite de Lam et Kil, mais elle le fait avec moins de force que la nuit de notre rencontre et la douleur ne tarde pas à disparaître. Alors que j'essaie de garder mon équilibre, j'entends un bruit sourd suivi d'un grognement dans mon dos. Je me retourne et vois la blonde se frotter le bras en regardant Ash d'un air contrarié. Celle-ci maintient le contact visuel, le menton relevé, sa main gauche masse son poing serré. Vient-elle de prendre ma défense ? Et si oui, pour quelle raison ?

Je n'ai pas le temps de me pencher sur la question. Tor m'attend et je dois faire bonne impression auprès du dirigeant des Sauvages, ma survie en dépend. J'avance donc dans la direction des deux hommes. Lorsque le chef m'aperçoit, un sourire s'affiche au milieu de sa toison noire et grise, l'inconnu quant à lui est imberbe. Il me semble familier et plus je m'approche, plus j'ai l'impression de l'avoir déjà rencontré. Lorsqu'il se gratte la mâchoire avec sa main, j'arrive enfin à le reconnaître.

Alex semble différent désormais. Il a rasé sa barbe, ce qui me permet de voir la partie inférieure de son visage. C'est étrange comme la pilosité faciale d'un homme change son apparence, il a l'air plus civilisé, moins « sauvage ». Sans que je ne puisse en expliquer la raison, le voir me soulage et je ne peux empêcher un léger sourire d'étirer mes lèvres.

— Te voilà enfin ! s'exclame Tor. Bien dormi ? En tout cas, t'as l'air d'avoir repris du poil de la bête, c'est bien.

Tandis que j'essaie de comprendre le lien entre mon sommeil et la fourrure des animaux, Tor se retourne et ouvre les bras devant l'énorme pile de livres.

— Tada ! Voilà tous nos... comment ça s'appelle, déjà ? Je crois pas te l'avoir demandé hier.

— Des livres, répondé-je sans oser élever la voix.

J'observe le tas de livres avec un pincement au cœur. Ils ont été entreposés les uns sur les autres, sans aucune délicatesse. La plupart des pages que j'arrive à apercevoir sont gondolées par l'humidité et certains ouvrages sont même recouvertes d'une mousse verdâtre. Maintenant que je vois comment ils sont rangés, je devine que Tor a dû choisir les trois qui étaient dans le meilleur état lorsqu'il me les a amenés afin de me tester.

— Bref, on va te laisser travailler tranquillement, annonce Tor. T'as du pain sur la planche pour nous trouver du savoir utile. Mais t'inquiète pas, je te laisse Alex pour te surveiller et te donner un coup de main. Après tout, ça doit pas être facile de porter des trucs avec tes béquilles.

Sans émotions Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant