Chapitre 10 - Le lourd secret

283 31 8
                                    

/ FLASH BACK /

J'étais assise dans ma chambre.

Cette chambre...

Je la haïssais.

Je haïssais l'odeur, la température ambiante, la couleur des murs tous blancs, les petits faisceaux de lumière qui entraient par la fenêtre, le parquet clair sur le sol, les meubles, le silence de cette chambre.

Je haïssais tout ce qui pouvait se trouver dans cette pièce.

Je décidais d'essayer de sortir .
J'avais faim.
Je me vis, une petite fille pas plus haute que trois pommes, j'avais six ans à l"époque, sauter du lit. Mes longs cheveux noirs retombants en boucles anglaises suivirent mon mouvement avec souplesse et j'essayais de rester calme alors que doucement j'ouvrai la porte de la chambre.

Je sortis ma tête de l'encadrement de la porte et regardais autour de moi.
Il y avait personne.
Je courais vers la cuisine, le plus vite que je pouvais.
J'étais morte de peur, je savais que si quelqu'un voyait que j'étais sortie de ma chambre, j'allais me faire châtier.
J'arrivais enfin dans la cuisine.

Je sortis le plus vite que je pouvais mes céréales et mon lait.

Je m'assis à la table et commençais à manger. J'étais affamée, elle m'interdisait de manger.

Soudain j'entendis des pas approcher de la salle à manger.

J'arrêtais de mâcher la nourriture dans ma bouche pour mieux prêter attention aux bruits qui approchaient. Je reconnus les pas très vite.

C'était Marine.

J'avalais ma bouchée très vite et me levais, pensant pendant une fraction de seconde que je pouvais m'enfuir. Mais elle était déjà devant moi.
Marine c'était la femme de l'homme qui m'avait élevé. Elle me détestait et lorsque j'étais petite, elle me terrorisait.
Elle me fixa d'un air dégouté, comme si en venant à la cuisine, elle n'y avait pas trouvé une fillette de six ans mais un énorme rat repoussant.
Elle vit le bol que je tenais dans les mains.

Elle me gifla tellement fort que le bol échappa de mes mains et que je tombai sur le sol.

- Sale petite peste ! Je t'ai déjà dit que je ne voulais pas te voir hors de ta chambre !

Elle me saisit par la peau du cou, me souleva et me jeta par terre. Elle commença à m'insulter. Ses yeux étaient enflammés par la haine et la colère qui la possédait.
Je pleurais, et gardais le visage collé contre le sol. J'étais épouvantée.
Elle se jeta sur moi et continua à me frapper. Elle était furieuse contre moi et et continuait à m'injurier. Je criais.

Annie, la domestique, et aussi ma nourrice, entra dans la pièce et sépara Marine de moi.
Tandis qu'elle la retenait, elle me cria :
- Luci ! Cours dans ta chambre, maintenant !

J'obéis et courais jusqu'à ma chambre toujours en pleurant.
J'entendais Marine crier :
- Annie lâche-moi ! Lâche-moi je vais la tuer cette petite bâtarde ! Je te jure que je vais la tuer !

J'ouvris la porte de ma chambre, entrai, fermai la porte et m'écroulai instantanément par terre.
J'avais tellement peur que, très vite, je sentis mon corps m'abandonner et je vomis tout mon déjeuner.
Je ne savais pas pourquoi elle m'en voulait tant que ça. Je ne lui avais pourtant rien fait de mal. Alors que je me posais toute ces questions je restais assise là, sur le sol froid je pleurais, seule et tremblante de peur.

/ FIN DU FLASH BACK /

- Tu ne t'appelles pas Moon Spencer. Tu t'appelles Lucinda Joxe. Tu es française, tu es née en France, à Paris il y a 21 ans. dit Michael en s'approchant dangereusement de moi.
Il était furax. Complètement incontrôlable.

Le visage de Marine me revint en mémoire et un frisson me parcourut l'échine.

- C'est vrai. dis-je sans le regarder.
- Alors tu m'as menti depuis le début ?
- Oui.
Je priais pour qu'il ne se pose pas plus de questions.
- Pourquoi ?

« Encore raté... Michael par pitié ne m'oblige pas à te le dire, je n'y arriverais pas. »

Je soupirais, toujours en train de regarder le sol.
Il me pris le menton, me contraignant à le regarder dans les yeux.
Il était vraiment en colère.
Il m'effrayait.

- Dis-moi Lucinda. dit-il entre ses dents.

Des larmes commencèrent à couler sur mes joues.

- Parce qu'en venant aux États-Unis, il m'a fallu changer d'identité pour que personne ne me reconnaisse.
- Pourquoi ?

Je fermai les yeux, je ne voulais pas lui dire.
Pas maintenant.

- Pourquoi ? cria-t-il cette fois.
- Michael... Je n'ai rien fait de mal s'il te plaît lâche moi. dis-je d'une voix faible.

Le sentiment d'anéantissement contenu dans ma voix le surpris tant qu'il desserra la prise qu'il avait sur mon menton. Je m'assis à terre et cachai ma tête dans mes genoux. Je n'avais plus le choix je devais lui dire.

- Mon père... était un homme politique très important.
C'était un ministre.
Un jour, je ne sais pas comment, il a rencontré une femme. Il a eu une relation avec elle alors qu'il était marié et je suis née de leur union.
Ma belle-mère était tellement furieuse qu'elle a envoyé des hommes pour tuer ma mère.
Elle a voulu me tuer aussi, mais mon père savait que c'était très mauvais pour sa réputation d'avoir le sang d'un bambin sur les mains alors ils m'ont gardé mais j'étais une énorme proie pour les médias, alors dès que j'ai atteint ma majorité, j'ai changé d'identité et je me suis enfuie.
J'avais tout dit d'un coup, pour éviter de sangloter.

Il resta interdit pendant plusieurs minutes.
- Pourquoi tu ne me l'as simplement pas dit ?
- Michael... Tu ne sais pas à quel point ça me donne envie de vomir quand on m'appelle Lucinda. Ce prénom représente la plus sombre et sinistre partie de moi. Je ne veux plus jamais l'entendre. Je le hais.

Encore un long silence.

- Je vois. dit-il enfin.
De nouveau, l'atmosphère devint silencieuse. J'avais envie de pleurer, mais je me retenais, avec une force que je ne pensais même pas posséder en moi. Je luttais contre l'envie de replonger dans mes souvenirs de petite fille. Ce serait beaucoup trop douloureux. J'avais l'impression que tous mes problèmes que je pensais enterrés étaient remontés à la surface pour me hanter.

Michael finit par se lever.

Sans un mot il sortit de la chambre, me laissant seule, assise à même le sol.

Dès que j'entendis la porte se fermer, je laissais mes sanglots me submerger. J'avais besoin de pleurer.
Pleurer pour cette petite fille qui avait vomi ses céréales dans sa chambre.
Pleurer pour cette jeune femme qui avait pris conscience ce soir à quoi cela ressemblait d'avoir des parents aimants.
Pleurer pour cette pauvre fille déplorable, maudite par les Dieux, et qui continuait de se battre pour survivre alors que maintes fois déjà elle s'était sentie tellement pitoyable et lamentable qu'elle avait tenté de mettre fin à ses jours.

Il y avait des moments où elle regrettait de ne pas avoir réussi à mener à bien ce projet.

Des moments comme maintenant.

« Mais pourquoi suis-je encore en vie ? Pourquoi ne pas m'avoir laissé mourir ? Pourquoi m'obliger à vivre avec ce passé minable enfouit en moi ? Pourquoi...? »

¤ ~ La Lune Resplendit ~ ∞Où les histoires vivent. Découvrez maintenant