II. 47.

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Lorsqu'ils entrèrent dans la pièce, toutes les conversations cessèrent d'un coup, au point qu'Astrée jugea bon de lancer un « Quoi ? » des plus aimables, babines retroussées. Rien, visiblement, ou rien qu'ils ne soient en mesure de lui confier puisque aucun n'entrouvrit les lèvres. Pas même Pâris qui se contenta de suivre sa sœur du regard, jusqu'à ce qu'elle revienne s'établir dans le fauteuil d'un vert très moche, juste à ses côtés. Les respirations semblaient suspendues, comme si tous se trouvaient dans l'attente de quelque chose. D'ordinaire, c'était Syssoï qui attirait tous les regards, mais, une fois n'est pas coutume, c'était après elle que ces paires d'yeux semblaient en avoir. D'ailleurs, le russe était partit s'installer sur le rebord de fenêtre, étalant ses longues jambes sur toute la largeur de celle-ci. Elle le savait, bien que la fenêtre se trouve dans son dos, simplement parce qu'elle venait de se tourner vers lui, cherchant, dans son regard, une réponse à tout ce silence, toute cette attention.

- Ils attendent ta décision. Lui souffla-t-il dans un haussement de sourcil.

- Oh...

Sa décision à elle. Ce n'était pas inhabituel de la part de Pâris et Benjamin, mais ça l'était concernant le Frère Michel. Depuis leur rencontre quelques heures plus tôt, il n'avait pas caché sa nette préférence pour Syssoï. Elle, elle l'agaçait, elle le décevait même, tandis qu'il semblait vouer un véritable culte au danseur. Cela dit, leur attente avait du sens pour un simple observateur. N'était-elle pas celle qui s'opposait à tout depuis le début ? Celle qui coupait court à la conversation pour s'entretenir en privé avec le russe ? Le conciliabule venant de s'achever, ils étaient en droit d'en attendre la conclusion. Une conclusion qui ne pouvait émaner que d'elle.

- Je ne suis pas encore totalement décidée, j'ai des questions d'abord. 

- Je vous écoute.

Voilà, il avait encore l'air agacé ! Poli, mais agacé.

- Si on va là-bas, dans votre truc-là, est-ce qu'on pourra en partir n'importe quand ?

- Bien sûr. Cet endroit n'est pas une prison, c'est un refuge. Cela dit, ce lieu étant protégé, vous ne pourrez pas aller et venir n'importe comment, ni n'importe quand, il faudra être prudent.

- Ok. Et comment vous savez tout ça, sur nous ? 

- Les registres.

- Les registres ? Répéta-t-elle sans comprendre. 

- Des registres contenant toutes les informations vous concernant jusqu'à présent.

- Qui a rédigé ces registres ?

- C'est vous.

Elle ? Comment ça, elle ? Elle s'en souviendrait si elle avait rédigé quelque chose de ce style.

- Vous deux. Précisa-t-il devant l'air hagard de la jeune femme. Durant vos différentes vies, vous avez annexés, consignés chaque information, chaque détail afin de permettre à vos futurs vous de perdre le moins de temps possible. 

- Vous voulez dire que vous avez en votre possession le détail précis de toute notre histoire ? Du coup, vous savez pourquoi ? Vous savez pourquoi on est là, pourquoi on vit ça, pourquoi on revient, et pourquoi on veut nous tuer ? Vous auriez pas pu commencer par ça ?

Elle s'énervait, pas de frustration cela dit, plutôt d'excitation à l'idée que, quelque part, il existait un ou des recueils pouvant répondre à toutes ses questions.

- Oula, doucement ! Non, ces registres ne recèlent rien de tel, malheureusement. Ils détaillent l'avancée de vos précédentes recherches pour, justement, répondre au plus vite à toutes ces questions. 

nāphîlOù les histoires vivent. Découvrez maintenant