II. 10.

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- Nathanael. L'entendit-elle dire depuis son dos.

- Monsieur. Répondit l'autre qu'elle ne pouvait voir.

- C'est pour moi, pousse-toi. Annonça-t-elle en passant sous le bras masculin qui maintenait la porte ouverte.

Alors elle pu faire face au concierge les bras encombrés d'un énorme sachet kraft, et plusieurs caissettes pleines trônant à ses pieds.

- Comment ça c'est pour toi ? Je...

- C'est mon goûté ? Demanda-t-elle en se hissant sur la pointe des pieds pour fouiller le sac que l'homme tenait toujours.

- Burger et frites maison de chez Hand.

- Vous êtes un ange, Nathanael ! S'exclama-t-elle en récupérant son bien pour réintégrer l'intérieur délaissant les caissettes au passage.

- Tu t'es fait livrer ? Elle s'est fait livrer ? Répétait-il incrédule, d'abord à son attention, puis décidant de se renseigner directement auprès du concierge.

- Il faut bien qu'elle se nourrisse.

- Bah oui, faut bien que je me nourrisse, enfin ! Reprit-elle en sortant une frite du paquet avant de disparaître dans le couloir menant à la cuisine pendant qu'ils débattaient dans son dos.

- Et tout ça, c'est quoi ? Disait l'un, résigné.

- Le reste des courses puisqu'il est question que vous vous nourrissiez également, je le crains. Répondait l'autre armé de cette pointe de flegme si British.

Tranquillement installée sur la table, et non à la table, les deux pieds sur une chaise et les doigts plein de cette sauce qui dégoulinait dessus, elle observa les aller-retours des deux hommes rapportant caisse après caisse qu'ils empilaient juste à côté d'elle. Lorsqu'ils vinrent à bout de leur corvée, Syssoï fouilla son sac pour en tirer un billet qu'il glissa dans la main du concierge sur le départ. Ce dernier salua la jeune femme d'un pompeux "mademoiselle" le tout accompagné d'un petit piqué du nez, puis les abandonna à leur inévitable confrontation. Il fallait qu'ils se parlent, qu'ils parlent vraiment, sans hurlement ni menace, elle était restée pour ça, et pourtant le silence n'en finissait pas de se prolonger. Il s'occupait à fouiller les courses, elle à dévorer son Burger sans en mettre partout.

- Il est à quoi ? Demanda-t-il, finalement, jetant un regard en biais à son bien.

- Poulet, je crois. Lui répondit-elle en déglutissant péniblement. Tu veux goûter ?

- J'ai le droit ? S'étonna-t-il en approchant timidement.

- Puisque je te le propose...

Il vint s'asseoir à ses côtés, sur la table, tandis qu'elle reposait l'hamburger à moitié entamé dans sa boîte, pour la lui tendre.

- Pourquoi tu fais tout ça ? Reprit-il après un moment consacré à la dégustation.

- Tout ça ?

- Oui, venir me sortir de mon lit, me forcer à sauver mon job, ranger l'appart, faire les courses, partager ton repas avec moi... Je doute que ce soit pour faire plaisir à Charlotte, alors pourquoi tu t'y es sentie obligée ?

- Me sentir obligée ? Non, pas du tout. Et ce n'est pas de la pitié non plus. Préféra-t-elle préciser avant qu'il n'émette cette possibilité de lui-même.

- Alors pourquoi ? Insista-t-il en lui rendant sa junk-food après en avoir englouti une grande partie.

- Fini-le.

nāphîlOù les histoires vivent. Découvrez maintenant