La journée avait été étonnamment chaude en cette fin de printemps au cœur des montagnes. L'ardeur des rayons du soleil, d'ordinaire plutôt clément en cette saison, avait surpris tous les habitants du château et la cadence des préparatifs de la fête du Solstice s'en était ressentie.
Cependant, les couloirs et les jardins grouillaient toujours de domestiques affairés, de cuisiniers pressés, de ménestrels et acrobates espérant décrocher un contrat et de nobles invités arrivés trop tôt. Dans deux jours, la journée la plus longue de l'année serait célébrée avec faste et ferveur dans tous les recoins du Royaume de la Tétrade, comme le voulait la tradition ancestrale. Mais la chaleur humide s'infiltrait partout et ralentissait les mouvements, pesant sur l'enthousiasme de chacun.
Briam avançait d'un pas décidé à la suite de son intendant, ignorant les gouttelettes de sueur qui coulaient désagréablement le long de son dos. Quel temps infernal, maugréa-t-il en lui-même. Une chaleur pareille dans les hautes montagnes, c'était presque contre nature.
Et si dans sa jeunesse il avait envié le climat ensoleillé des duchés du Sud, aujourd'hui il regrettait les courants d'air frais et piquants qui balayaient habituellement les rues d'Horenfort. Une moiteur aussi étouffante n'avait désormais plus d'autre effet que lui taper sur les nerfs, sans parler de l'agitation et des perpétuelles allées et venues de ces derniers jours.
Briam sentait sa jeunesse lui échapper... Aurait-il pu croire, vingt ans auparavant, qu'un jour le soleil et les mondanités lui seraient aussi désagréables ? Il soupira d'agacement face à sa propre mauvaise humeur, puis leva le regard vers son intendant qui s'immobilisait devant la porte de son cabinet privé.
- Je me suis permis de le faire attendre ici, Monsieur le Duc. C'est la seule pièce du château qui ne soit pas envahie par les préparatifs du Solstice... J'espère que cela ne vous gêne pas.
- Non Sirgil, vous avez bien fait, répondit Briam.
- J'ai déjà demandé que l'on fasse monter des rafraîchissements et de quoi se restaurer. Le Sage avait l'air éprouvé par les températures inhabituelles, je l'ai invité à ne pas vous attendre pour se désaltérer.
- Parfait, je vous remercie Sirgil.
- Je vous en prie, Monsieur.
- Ah, Sirgil ! rappela le Duc alors que son intendant s'apprêtait à lui ouvrir la porte. Voudriez-vous aller trouver mon épouse et lui dire que j'aurais peut-être un peu de retard, mais que je viendrai la retrouver comme convenu ?
- Bien entendu, Monsieur le Duc.
Sirgil posa la main sur la poignée tandis que Briam tirait un mouchoir de sa manche pour s'éponger les tempes. Ses cheveux drus imprégnés de sueur lui collaient à la peau et la sensation était des plus désagréables. Aussi éprouva-t-il un soulagement manifeste en pénétrant dans son cabinet, dont les rideaux tirés avaient préservé la fraîcheur. Il soupira d'aise tandis que Sirgil refermait la porte derrière lui et attendit quelques instants que ses yeux s'habituent à l'obscurité de la pièce.
Le Sage était assis sur un petit siège rembourré, le dos droit, ses doigts noueux serrés autour d'une tasse de thé glacé qui reposait sur ses longues jambes frêles. Ses yeux clairs et ridés braqués sur lui, la bouche relevée en un petit sourire affable, il attendait que le duc se manifeste. Briam inclina doucement la tête et les épaules et le salua :
- Ismar le Sage, soyez le bienvenu au château d'Horenfort. J'espère que je ne vous ai pas fait trop attendre.
- Pas le moins du monde, mon cher Duc, répondit Ismar en reposant sa tasse sur le guéridon à côté de lui. J'ai été accueilli avec les plus grands égards, comme toujours.
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Valacturie - T1 Le Tombeau des Rois
FantasyLorsqu'Énith, fille du Duc des Montsombres, découvre un mystérieux manuscrit depuis longtemps oublié, elle ne se doute pas qu'il va l'entraîner sur les traces de civilisations inconnues et de créatures fascinantes. Quant à Léonor, jeune musicienne i...