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NOAM

Cette fille avait le don de me prendre au dépourvu, pensais-je, tandis que les élèves sortaient en trombe de la classe. Comme à chaque fois, Achillia et moi étions bons derniers. Je n'avais pas vu passer l'après-midi passer, trop occupé à rêvasser, à me demander ce que pouvait bien signifier le timide baiser de la fille de mes rêves. J'étouffai un bâillement.

- Fatigué, Noam ? sourit mon amie en arrivant derrière moi.

- Un peu, admis-je. Et toi ?

Elle soupira.

- Je n'ai pas suivi un traitre mot du cours. Je suis inquiète, j'espère que Kensei va bien... Tu sais Noam, Adrien m'a avoué qu'il savait qui il était mais il n'a rien voulu me dire. Je suis certaine qu'il avait une très bonne raison de rater notre rendez-vous.

Nerveux, je me passai la main dans les cheveux.

- Je peux essayer de lui faire cracher le morceau, si tu veux ?

- Tu ferais ça ?

Je hochai la tête.

Puis, me rappelant subitement la promesse faite à Adrien ce week-end, j'ajoutai :

- Il est peut-être plus proche que tu ne le crois.

Je retins mon souffle en guettant sa réaction. Elle écarquilla les yeux et se retourna, alerte. J'ai bien cru que mon cœur allait cesser de battre.

- Tu as raison, Noam. Peut-être même qu'il m'observe en ce moment...

Elle jeta des coups d'œil dans le couloir à droite et à gauche et en long et en large.

Désespéré, je baissai la tête. Je n'aurais jamais le courage de la prendre par les épaules et de lui dire « C'est moi, Kensei ! », je le savais parfaitement.

- Noam, tu es inquiet pour ton père ? Tu as l'air malheureux...

Ma tendre Achillia était d'une naïveté...

- Oui, mentis-je.

Elle acquiesça, lèvres pincées et je l'accompagnai en silence jusqu'à son arrêt de bus. Alors que nous étions sur le point de nous quitter, je me surpris à lui confier :

- Mon père est avocat à Amnesty International.

Un point d'interrogation passa dans les yeux de mon amie.

- Tu... Tu penses que c'est pour ça qu'on lui a tiré dessus ?

- Possible. J'ai essayé d'en parler avec ma mère mais c'est confidentiel. Tout ce que je sais, c'est qu'il travaille sur une affaire délicate et que c'est sûrement lié à ça. Elle a refusé de m'en dire plus. Pour me protéger, paraît-il.

- Nous pourrions utiliser notre temps libre pour mener l'enquête ?

Elle avait l'air parfaitement disposée à le faire, la lueur déterminée dans son regard le prouvait. L'idée m'avait effleuré bien que je ne trouvais pas cela très réalisable.

Au loin, le bus pointa le bout de ses phares.

- Noam, où se trouve le bureau de ton père ? Je suppose qu'il ne travaille pas sur ses dossiers chez lui...

- Non, c'est exact. Son bureau est en face du Oki' où je...

Je me tue brusquement réalisant que j'étais à deux doigts de me trahir.

- Où tu... ? continua Achillia, intriguée.

- Où je devais manger avec ma famille.

Elle hocha lentement la tête.

- Demain, si nous réussissons à trouver le dossier sur lequel il travaille en ce moment, nous remonterons peut-être jusqu'à la personne qui a tenté de l'assassiner. Sans avoir besoin de remonter le temps.

J'acquiesçai, beaucoup moins enthousiaste qu'elle.

Rien que nousOù les histoires vivent. Découvrez maintenant