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ACHILLIA

J'ouvris les yeux lentement avant de m'asseoir dans mon lit et de m'étirer. Dans un premier temps, mon esprit suggéra que j'avais rêvé la nuit précédente. La béatitude que je ressentais me convainquit que non. Je n'avais pas été aussi bien depuis longtemps. Je sentais que j'existais. Vraiment.

Je touchai mes lèvres du bout des doigts.

Noam m'aime.

Je m'extirpai du lit et passai par la salle de bains avant de descendre. Je me laissai gentiment guider par des notes mélodieuses et traversai la cuisine pour rejoindre la terrasse. Noam y était, assis sur un tabouret devant une table ronde en bois. Il bougeait l'antenne de la radio de droite à gauche pour essayer de mieux capter le son. Je me mis à fredonner l'air de la chanson pour qu'il remarque ma présence. Le sourire qu'il m'offrit me donna envie de l'embrasser encore. C'était une belle journée qui commençait bien que le temps soit nuageux.

- Programme de la journée ? demandai-je en m'asseyant face à lui.

Je piochai une pomme verte dans la petite corbeille de fruits et croquai dedans à pleine dents.

- Petit déjeuner sur la terrasse, déjeuner au lycée et, si tu réussis à ne pas sécher un seul cours de la journée, dîner au restaurant ce soir. Qu'en dis-tu ?

- Je vais faire un effort, souris-je en me servant un grand verre de jus de fruits exotiques. Dis, Noam, ajoutai-je, tu pourrais me téléporter chez moi ? J'aimerais savoir si Kensei m'a écrit depuis mon... déménagement.

Il se leva et déposa un baiser sur mon épaule.

- O.K, Princesse.

Il attrapa mes doigts mais jamais je ne retrouvais les murs familiers de ma maison. Des points noirs et blancs tombèrent soudain en cascade devant mes yeux, mon cœur s'accéléra et, très vite, l'air me manqua.

- Noam ? Noam, où es-tu ? Où suis-je ? Aide-moi, je t'en prie ! suppliai-je, terrifiée. Je ne vois rien !

Je secouai la tête pour chasser mon malaise mais c'était peine perdue. Tout autour de moi était d'un blanc de porcelaine. Rien ne semblait palpable, c'était comme si mon esprit s'était vaporisé dans l'air en un milliard de particules. Je n'avais aucun repère, rien à quoi me raccrocher, je me sentais dispersée.

- Noam ? répétai-je. Qu'est-ce qui se passe ?

Un sanglot m'échappa, brisa le silence.

Rien d'autre.

Une pensée angoissante me traversa ainsi que le lointain souvenir d'un cours de français où nous avions étudié une citation d'Aimé Césaire :

« La mort expire dans une blanche mare de silence. »

Etait-il possible que la mort survienne ainsi, brusquement, juste en prenant la main d'un proche ?

L'endroit où je me trouvais n'avait rien du paradis et de l'enfer. Du moins, à l'idée que je m'en faisais, véhiculée par les livres et les films.

J'étais prisonnière du vide.

Rien que nousOù les histoires vivent. Découvrez maintenant