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NOAM

C'était encore et toujours le même couloir. Les murs, le plafond, le sol, tout étaient immaculés. Pas de portes, pas de fenêtres. Je me sentais comme perdu dans une grande étendue de blanc. J'avançai depuis des heures mais n'arrivais nulle part. Quand je tentai de me téléporter, je revenais toujours dans ce même couloir. A croire que mes pouvoirs étaient en panne.

- Décidément, ce laboratoire pharmaceutique est très étrange...

Absence de personnes, absence de bruit... Pour un établissement en bord de route, c'était pour le moins étonnant.

Finalement, je repris mon chemin en sens inverse. En sortant dehors, j'eus la curieuse impression que le temps avait repris son cours. Achillia n'allait pas en revenir quand j'allais lui raconter tout ça.

Clignant des yeux, je me retrouvai devant chez elle. Poing en l'air, je frappai trois coups à la porte. Mon sourire s'effaça quand je vis Priam ouvrir.

- Salut, Priam. Je peux voir ta sœur ?

- Elle est sortie, répondit-il, mâchoires serrées.

Ils avaient dû se disputer après mon départ...

- Où est-elle ?

- Je n'en sais rien.

- Je peux entrer et l'attendre ?

Son regard noir me glaça le sang. Pourtant, il me laissa passer.

Je m'assis sur le canapé, mal à l'aise. Priam s'assit dans le fauteuil à côté sans me lâcher des yeux. Je me tordis les doigts, gêné.

- Achillia n'a pas dit à quelle heure elle rentrait ?

- Non.

Je hochai la tête, évitant son regard.

- Tu tournes beaucoup autour de ma sœur en ce moment.

Je levai les yeux. Ce n'était ni une question ni une accusation. Juste un constat.

- C'est vrai, acquiesçai-je. Nous sommes amis.

Il se leva et alluma la radio sur la commode en bois derrière lui. Le refrain de Kryptonite des 3 Doors Down emplit le salon.

- Les poèmes sur le bord de sa fenêtre, c'était toi, n'est-ce pas ?

Je le fixai sans rien dire pendant trois bonnes minutes.

- Oui, avouai-je finalement. Tu es perspicace, Priam.

- Non. Seulement observateur. Tu l'as regardes comme si elle était la huitième merveille du monde.

Je sentis ma figure virer au cramoisi.

- Tu vas lui dire que c'est moi qui lui écris en secret ?

Il secoua la tête.

- Votre histoire ne me concerne pas. Pas encore du moins.

- Pas encore ?

- Si tu lui brises le cœur, je t'arrache le tien.

J'acquiesçai lentement et le silence retomba. Je prenais l'avertissement de Priam au pied de la lettre. Je savais qu'il n'hésiterait pas et je voyais bien qu'il tenait à elle. Presque autant que moi.

Il se leva une nouvelle fois pour prendre la télécommande sur le téléviseur pour l'allumer.

Il zappa de chaîne en chaîne en soupirant... jusqu'à ce que son portable sonne dans l'autre pièce. En une enjambée, il était dans la cuisine. Je tournai légèrement la tête pour le regarder.

- Ouais ? fit-il en décrochant.

Il fronça les sourcils.

- Qu'avez-vous fait d'elle ? gronda-t-il.

Je me levai aussitôt pressentant le pire. Priam leva la main, m'indiquant de ne pas faire un pas de plus. Puis, il frappa du poing contre la table. Je m'étonnais qu'elle ne soit pas fendue en deux.

- Vous ne deviez pas la mêler à ça ! J'avais votre parole !

En entendant la réponse de son interlocuteur, il donna un coup de pied à l'une des chaises en bois qui se renversa.

- J'ai ce que vous m'avez demandé alors relâchez-les !

Les ?

- J'arrive.

Il referma le clapet de son portable, rageur.

- Je dois y aller.

Il passa devant moi comme une flèche et enfila ses baskets et sa veste.

- Attends, Priam ! Que se passe-t-il ??

- Rentre chez toi, Chance.

- Non !

Il me regarda droit dans les yeux. Je ne flanchai pas.

- Dis-moi ce qui se passe. Où allons-nous ? Je connais un moyen de nous rendre là où tu veux en moins de temps qu'il ne faut pour le dire !

- Tu sais voler ? Railla-t-il.

- Presque. Maintenant, réponds-moi !

Il me balança une enveloppe Kraft à la figure, je l'attrapais au vol.

- Qu'est-ce que c'est ?

- Arrête tes questions, Chance. Contente-toi de regarder à l'intérieur.

Le dossier contenait toutes les informations possibles sur la famille Chevalier.

- Bon sang...

Priam haussa les épaules.

- Voilà la vérité. Je suis le gardien de ce dossier.

- Tu as tiré sur mon père ! aboyai-je.

Incontrôlable, mon poing s'abattit sur sa figure. Sans broncher, il essuya sa bouche où perlait une goutte de sang.

- Estime-toi heureux qu'il soit encore en vie. Je ne rate jamais ma cible, en principe...

- Achillia est courant de ce que tu fais ?

- Seulement depuis quelques heures. Nous continuerons cette discussion plus tard, ma sœur est en danger là...

Il allait ouvrir la porte mais je le retins par l'épaule.

- Où est-elle ?

- Laboratoire pharmaceutique Chevalier.

- O.K.

Lorsque le bâtiment se matérialisa autour de nous, Priam bondit en arrière.

- Comment t'as fait ça, mec ?

- Ce n'est pas le plus important.

Encore une fois, je me retrouvai dans un couloir blanc et sans fin. Je soupirai.

- Comment allons-nous retrouver Achillia, ici ?

- Comme ceci.

Sur ces mots, il sortit quelque chose de la poche intérieure de sa veste. Sans en être sûr, il me semblait s'agir d'un couteau de lancer. Je devais avoir vu juste car il le lança sur le mur à notre droite. Mes yeux s'arrondirent de surprise lorsqu'il tourna seul dans le mur et qu'un déclic suivit. Le mur s'ouvrit sur une porte métallique.

- Qu'est-ce que c'est que cet endroit ? murmurai-je pour moi-même.

- Attention au comité d'accueil, me prévint Priam.


Rien que nousOù les histoires vivent. Découvrez maintenant