Prologue

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J'étais un électron libre. Un petit électron, minuscule, virevoltant autour du noyau de l'atome sans jamais s'en approcher. J'étais un petit moucheron noir, tantôt rose framboise, tantôt vert comme les arbres dans les vallées en montagne, qui voltigeait vers où le vent et son cœur le portaient.

J'étais libre. J'aimais la liberté.


Un jour, lorsque j'étais plus jeune, je m'étais posé une question. En fait... c'était quoi, aimer ?

J'avais aimé ma mère. J'avais aimé mon enfance bien que difficile. J'avais aimé mes amis, mes proches, mes études, mes passions, mes voyages, mes rêves. Surtout mes rêves.

Mais quelle était la différence entre « aimer » et « aimer » ? Quelle était la différence entre le rose bonbon et le rose si sombre qu'il ressemblait au sang ?

Que signifiait réellement un « Je t'aime » ? En quoi était-il différent d'une personne à l'autre ? Pourquoi est-ce que celui que l'on adresserait à une personne serait différent de celui que l'on adresserait à une autre ? Ou au contraire, pourquoi devrait-on tous les considérer comme identiques ?


Certaines personnes avaient les sentiments et les mots faciles. Trop faciles. Ces mots ne voulaient pas toujours dire ce qu'ils étaient censés dire. Ils pouvaient même avoir un sens caché.

Grâce à ces mots, certaines personnes avaient le don de te faire te sentir bien ou de te détruire. Ou bien les deux ? En quelques secondes, tout pouvait changer. Tu pouvais te retrouver à voler dans le ciel ou enterré dix pieds sous terre.


J'avais toujours préféré le bruit du crayon gris ou du fusain lorsque j'esquissais un paysage ou un visage, sans trop me poser de questions, les nuances de noir et de gris occupant mon esprit et mes sentiments tandis que mes yeux guidaient ma main sans que mon cerveau ne s'en rende compte. Pourtant, petit à petit, je m'étais mis à la couleur. Je m'étais attelé à d'autres techniques. Et lorsque mon pinceau était passé sur ma toile de lin ce matin-là, tout s'était arrêté. Mon cerveau ne s'était pas laissé influencer, et je m'étais posé cette autre question, mon cœur se remettant à saigner :

Et si certaines personnes, comme moi, avaient ce dangereux don consistant à choisir celles qui les détruiraient à coup sûr après les avoir rendues heureuses pendant un temps ?


En ravageant cette toile et en recouvrant les murs de ma chambre de toutes ces teintes de rose, je m'étais promis que jamais ça ne recommencerait. Je m'étais promis que plus jamais je ne tomberais amoureux, que plus jamais je ne montrerais mes faiblesses, que plus jamais je ne laisserais quiconque me détruire.

Mais cet imbécile heureux est entré dans ma vie.

「 ʟᴇ ᴛʀᴏɪꜱɪᴇ̀ᴍᴇ ᴇᴛ ʟᴇ ᴅᴇʀɴɪᴇʀ 」Où les histoires vivent. Découvrez maintenant