C H A P I T R E 66

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PDV KHADIJA


Psychiatre: dites-moi ce que vous évoque l'abandon, Khadija? *en attrapant son stylo*

Je regarde le plafond sans lui répondre. J'en ai marre qu'on me force à parler, ça fait presque six mois que je suis dans ce fichu hôpital avec tous ces infirmiers, médecins et psychiatriques qui me parlent comme si j'étais folle.

En même temps je ne peux pas leur en vouloir, j'ai été folle.

Pendant plusieurs mois, je faisais des crises d'angoisse, de panique, je faisais des cauchemars, je tremblais, hurlais, passais mon temps à me tirer les cheveux et à m'écorcher la peau avec mes ongles. J'avais des envies suicidaires... Dieu merci que j'ai rencontré cet homme sur ma route ce soir là car je crois bien que j'aurai fais une connerie si il n'avait pas appelé les pompiers .

J'étais prête à passer sous un camion, à me jeter dans la Seine. Je voulais mourir. J'étais prête à quitter ce monde. J'avais des idées sombres... Je revivais chaque soir les scènes de mon viol, les scènes de violence où Mehdi me battait puis je revoyais aussi la violence verbale des gens envers moi, l'harcèlement sur Internet de tout ces gens qui me traitaient de salope et de pute. Je repensais aussi à la tentative de viol de Robert ce vieux schnok, ce papi, mon propriétaire ... Je me demandais sans cesse comment il avait pu me faire ça? Comment il avait osé s'en prendre à moi? Pourquoi l'histoire se répétait à chaque fois? J'avais si mal...

Entre temps, durant ces six mois, j'ai appris que ma plainte contre Walid a été classé sans suite par la police. Une assistante sociale est venu me voir à l'hôpital pour m'expliquer que la police considérait qu'il n'y avait aucunes preuves et que les faits remontaient d'il y a trop longtemps pour vérifier si c'était vrai. Alors ils ont décidé de classer l'affaire comme si de rien était comme si rien ne s'était jamais passé!

Comment vous dire qu'après cette nouvelle j'étais plus bas que terre. Déjà que j'étais dans un profond mal-être voilà que la police ne me croyait pas et remettait ma parole en doute, c'était trop pour moi.

J'ai sombré dans une dépression, je passais mon temps à broyer du noir, je refusais de m'alimenter, j'ai perdu énormément de poids. Les infirmières m'ont bourrés de médicaments qui m'ont encore plus défoncé l'intestin (vu que j'ai l'estomac fragile depuis ma tentative de suicide) bref j'ai passé les six pires mois de ma vie.

C'était une descente aux enfers.

J'ai jamais pensé pouvoir en arriver là, me retrouver seule, sans personne, sans rien.

Durant ces six mois, j'ai regretté d'avoir parlé de mes viols à ma mère, j'ai regretté de lui avoir dit, la vérité et d'avoir gâché notre relation. Je me suis dis que j'aurai mieux fait de ne rien lui dire. J'aurai dû faire semblant d'être heureuse pour son mariage et me taire à jamais. Si je n'avais pas parlé du viol et de Walid, tout ce qui m'arrive, ne me serait jamais arrivé. Je parlerai toujours à ma mère, j'habiterai encore avec elle, je n'aurai pas eu à déménager, à rencontrer Robert et à vivre le pire...

J'ai encore le goût des médicaments dans ma bouche. Ici à l'hôpital, ils me bourrent de médicaments. J'ai l'impression d'être lobotomisé. Je ne ressemble plus à rien. J'ai perdu du poids, j'ai les joues creusées, le regard vide, j'ai troqué mes habits de luxe pour des robes de chambre, des robes blanches d'hôpital et des chaussons. Je passe ma journée en robe de chambre et chausson comme une grand-mère de 90 ans.

Je passe mon temps dans ma chambre car je n'ai pas envie de parler avec les autres. Je réponds à peine aux infirmières. Je suis dans ma bulle.

A cause du stress et de mes crises d'angoisses, j'ai perdu beaucoup de cheveux. Oui moi qui prenait soin de mes cheveux comme de la prunelle de mes yeux et bien j'ai perdu des masses entières de cheveux, j'ai les tempes dégarni et j'ai perdu du volume.... c'est un cauchemar ... mais c'est pas le plus triste. Le plus triste c'est mon cœur meurtri, j'ai mal au cœur et je n'ai plus goût à la vie. Je suis à bout et j'ai l'impression que je remonterai jamais la pente.

- Khadija & Farès 🌹-Où les histoires vivent. Découvrez maintenant