00 : PROLOGUE

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La mort apporte la vie

13 Septembre 2007, quelque part à New York

Le vent frais secouant mes cheveux, j'admirais, sans le vouloir, l'immensité du gratte-ciel bleu se tenant en face. Cela faisait maintenant 10 minutes que j'attendais du haut de l'immeuble, en observant la foule au loin qui écoutait, sans broncher, le discours du co-fondateur de G&J Corporation.
Je fronçais mes sourcils en entendant la voix rocailleuse de Flinn Huggins dans mon oreillette.

— Je viens de te transférer tes 200 000 dollars sur ton compte, comme prévu.

— J'ai vu ça oui, répondis-je. Maintenant, laisse-moi me concentrer, que je remplisse mon boulot.

— Ouais, ouais, c'est noté.

Il se trouvait à des kilomètres de ma position dans une maison à observer l'inauguration du bâtiment retransmis en direct à la télévision. C'était un très grand événement qui se passait là. Et avec mon intervention, ils n'étaient pas prêts de l'oublier.

— Montre-moi que tu vaux réellement ton titre de sniper. Que je n'ai pas gaspillé mon argent pour un amateur.

— Tu m'en diras des nouvelles, dis-je en lâchant un rire jaune.

J'étais situé en haut d'un bâtiment, à deux centaines de mètres de Grey Jefferson.
Du haut de mon perchoir, je ne le voyais qu'avec mes lunettes à zoom optique. Il gesticulait et ramenait à chaque instant ses cheveux en arrière.

Était-il en train de stresser ou était-ce une de ses habitudes ?

— Je veux un spectacle propre, Christopher.

— Admire bien le spectacle alors...Fifi.

— Je t'ai déjà dit d'arrêter de m'appeler com...

J'éteignis mon oreillette pour être sûr de ne plus être dérangé par une quelconque interruption puis me remis en position. Je restai patient devant mon fusil, me calibrai et je visais Grey Jefferson, attendant qu'il finisse son long bafouillage dont on ne comprenait rien. Il faisait face à une multitude de journalistes, de photographes, d'adolescents, de parents qui, comme tout le monde, n'attendaient qu'une chose : que son long discours se finisse pour enfin pouvoir pénétrer dans le somptueux gratte-ciel.
Ils inauguraient cette année-là, leur 10e cérémonie d'exposition sur les nouvelles technologies qui seraient bientôt mises en vente dans le marché public.

3 secondes avant l'impact...
Dire que je vais le tuer. Je me fais honte.

— La vie de rue a fait de nous de dangereux individus, soupirais-je.

Je chargeai le fusil de précision et regardai à travers le viseur, me préparant enfin à tirer. Il venait de finir tout ce qu'il avait à dire, de répondre à la dernière question posée et but la dernière gorgée de sa bouteille d'eau, qui était dès lors sa dernière.

Savoure ce moment, savoure ta gorgée. Hydrate bien ton corps, avant de plonger.

Il posa sa main sur le microphone. Il souriait de toutes ses dents tant il était aux anges. Lui et son frère Jeffrey avaient bâti cette entreprise avec presque rien et voilà où ils en étaient.

— Dommage pour lui.

2 secondes...
Si la mort apporte la vie, pourquoi est-il si mal de tuer ? C'est grâce à nous qu'il y a d'autres hommes sur terre non ? À quoi je pense en me disant tout ça ?

Arrête !!

Je pressai lentement la détente de mon arme, devenue soudainement plus lourde comme si une force invisible m'en empêchait. La balle traversa le long tunnel en métal froid de mon calibre, en un instant, puis émit un sifflement inaudible au contact du vent, telle une mélodie à laquelle seule la mort pouvait y répondre. L'air était devenu plus frais que ces dix dernières minutes. Je sentis une pression sur moi comme à chaque instant crucial.

La balle survola la foule, la narguant presque, puis continua à faire son bonhomme de chemin maintenant vers sa cible. Ce dernier avait levé la tête comme à l'attente de la mort, comme s'il savait ce qui allait lui arriver, mais sans pour autant pouvoir réagir. Un petit pli se formait peu à peu sur son front, préparant le passage de la balle.
Le soleil se reflétait alors sur son crâne dégarni, comme une forme d'ultime appel.

Une seconde...
Je me demande qui naîtra de cette mort. Me ressemblera-t-il ?
Je délire complètement.

La balle ne fit pas d'effort pour transpercer sa boîte crânienne tant la puissance était grande. Sur le coup, on ne remarqua rien, on aurait même cru que je l'avais raté, ce qui n'était pas bon pour moi. Il entrouvrit la bouche pour nous rappeler à quel point il en avait une grande.
Puis ce qui devait arriver arriva. Il tituba et s'effondra sur l'estrade en verre montée il y a quelques heures de cela. Sa tête heurta la tribune dans un fracas sans voix.

Le sang, après quelques secondes, gicla alors sans peine, et les gardes du corps présents ne surent quoi faire face à cet événement inattendu. La foule poussa dès lors des cris d'affolement, de crainte et de stupeur. Toute cette bonne pagaille avait vite fait arrêter quelques curieux en voiture, des cyclistes encore essoufflés et divers résidents du voisinage.

En moins de deux minutes, la foule, bientôt absente, se dispersa telle une centaine de fourmis à la recherche d'un abri.
Je pris sans tarder mes affaires et commençai à dévaler les escaliers quatre à quatre, en m'assurant que personne ne m'ait vu. Arrivé en bas, je pris une ruelle qui menait à une route en parallèle avec celle de l'entreprise, là où ma moto noire luisante était accostée.
Je l'enfourchai et démarrai en trombe, vers ... L'infini...































Yams

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