"Comment ça nous n'irons pas à son enterrement ?", m'époumonai-je.
"Harry, tu baisses d'un ton !", m'ordonna mon père.
"Mais on ne peut pas faire ça, Victor faisait partie de notre communauté, de notre famille !", continuai-je à m'énerver, faisant fi de sa remarque.
"Parce que tu crois qu'il y pensait à notre communauté lorsqu'il a décidé de se tuer ?", s'exclama ma mère alors qu'elle enlevait ses chaussures pour mettre ses chaussons.
Sa remarque me scia. En réalité, c'était l'entièreté de cette conversation qui me sciait.
Nous étions vendredi soir, soit deux jours après la découverte de son corps. L'enterrement de Victor se déroulait demain et j'étais en train de me rendre compte que personne, absolument personne, de notre communauté ne comptait s'y rendre.
Ce matin, la sœur de Victor était passée au monastère afin de récupérer ses affaires et les adultes nous avaient interdit de sortir de nos dortoirs tant qu'elle n'était pas partie. Pour être honnête, cela m'avait horriblement frustré et mis en colère, car j'aurais réellement aimé avoir l'opportunité de lui adresser mes condoléances. Pas grand chose, juste un petit mot, mais au moins assez pour lui montrer que Victor avait compté pour moi, même si je n'avais jamais véritablement pris le temps de le connaitre.
Pour être franc, j'avais l'horrible sensation qu'à part elle, il n'y aurait personne à son enterrement, et cela me brisait de l'intérieur pour une raison qui m'échappait. Après tout, il n'était pas marié, n'avait pas d'enfants, et je n'étais même pas sûr que ses parents soient encore de ce monde...
"Mais enfin c'est-
_Il n'a que ce qu'il mérite, trancha mon père. S'il a mis fin à ses jours cela signifie que sa foi envers Dieu n'était pas assez forte pour l'aider à surmonter les épreuves de la vie. Il était faible, et tu sais bien que les faibles ne vont pas au paradis. Par conséquent, nous n'avons plus rien à voir avec lui. Et si j'étais toi je passerai à autre chose dès à présent."
J'entrouvris la bouche, croyant à une hallucination auditive.
Non, ce n'était pas possible, mon père ne pouvait pas être aussi cruel, aussi insensible. J'avais dû mal entendre :
"Papa, tu-
_Maintenant ça suffit, Harry ! tonna-t-il, me clouant sur place. Va dormir !"
Les larmes me montèrent immédiatement aux yeux, et je quittai en trombe la chambre qu'occupaient mes parents lorsque nous dormions au monastère. C'était la première fois que mon père s'adressait à moi aussi durement, et je trouvais cela si injustifié que j'étais à deux doigts de craquer. Je me précipitai donc en direction des dortoirs, sachant déjà que je serai incapable de fermer l'œil de la nuit.
Le couvre-feu commençait dans dix minutes, soit à 23h, il fallait que j'aille rejoindre mon dortoir.
Je montai alors à l'étage, la rage encore présente dans le creux de l'estomac.
Je m'apprêtais à tourner à droite en direction des chambres lorsque je repensai soudainement à l'armoire.
Ou plus précisément, à l'armoire de Louis.
Je fermai les yeux, me battant avec mes propres démons.
Il était encore tôt, ce qui signifiait qu'il était encore probable que je me fasse surprendre par l'un des adultes.
Cependant, pour la première fois de ma vie, ce n'était pas la peur qui me poussait à faire quoi que ce soit, mais bien la colère. C'était un sentiment nouveau pour moi qui avait toujours été si calme, si docile, et je n'arrivais absolument pas à gérer cette émotion. Or, s'il y avait bien quelqu'un qui était apte à la contrôler, voire à l'étouffer, c'était bien Louis.
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We Made It [L.S.]
Fanfiction« Secte : Groupement religieux, clos sur lui-même et créé en opposition à des idées et à des pratiques religieuses dominantes. » Il s'agit de la définition officielle, je n'ai pas eu mon mot à dire. Pourtant lorsque j'y pense ce sont bien d'autres t...