Chapitre 28

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Trigger Warning : Présence de viols et de violences psychologiques et physiques en début de chapitre, n'hésitez pas à lire à partir du point de vue d'Harry si cela vous dérange.






Louis

Depuis combien de temps était-il là, les yeux perdus dans le vague, ses courts ongles plantés dans la chaire de ses paumes ? Il ne le savait pas, cela pouvait aussi bien faire deux jours qu'un mois.

Il ne sentait plus rien, ni la faim, ni la soif, ni la douleur... son esprit s'était comme dissocié de son corps.

Mais cela, cette sensation, cette impression de vide, de néant, elle lui était désormais familière. Cela faisait quatre ans que son corps ne lui appartenait plus. Cela faisait quatre ans que son corps était meurtri, dominé, ravagé, souillé, humilié.

Oui, l'humiliation, ce mot qui lui brûlait la gorge.

L'humiliation d'avoir laissé un malade abuser de son corps depuis ses douze ans.

L'humiliation d'avoir parfois prétendu aimer ce qu'il lui faisait pour ne pas se prendre de coups.

L'humiliation d'avoir chaque jour vu les yeux de son meilleur ami briller d'admiration pour ce même homme.

L'humiliation de voir le piège se refermer sur Tiago un peu plus à chaque fois tout en sachant qu'il n'avait rien fait pour l'aider à se sortir de là.

L'humiliation d'être lui, tout simplement.

"Qui voudrait de toi ? Qui voudrait d'une petite pute ayant perdu sa virginité à douze ans ?"

La psychologie avait à maintes reprises prouvé que le cerveau était capable de faire oublier à un individu, du moins consciemment, les moments les plus traumatiques de sa vie afin de le protéger, de l'empêcher de basculer dans la folie.

Pour Louis, cela n'avait pas été le cas. Il se souvenait de chacun de ses soupirs de satisfaction contre sa peau, de la dureté de ses gestes, de la cruauté présente dans son regard, comme si voir la vie le quitter un peu plus à chaque coup de rein l'excitait.

Il se souvenait de la première nuit où il l'avait déshabillé. Il se souvenait de cette fois où il l'avait attaché toute la nuit aux barreaux de son lit, nu, complètement exposé et grelotant de froid, juste pour « plaisanter ». Il se souvenait du poids de son corps sur lui, lui donnant l'impression qu'il ne pourrait jamais s'échapper, qu'il resterait coincé sous lui pour toujours.

"Tu m'appartiens, Louis. Quoi qu'il arrive, je serai toujours en toi. J'ai été ton premier, rien ne pourra changer ça."

Louis ne cligna pas des yeux lorsqu'une goutte de pluie vint s'écraser contre la seule fenêtre présente dans sa chambre. Cette même fenêtre qu'il fixait déjà depuis tant de temps qu'elle était désormais gravée à l'intérieur de ses paupières.

Il l'aurait probablement franchi, cette fichue fenêtre, s'écrasant au sol avec la même violence que cette goutte d'eau. Oui, s'il l'avait pu, il l'aurait fait. Mais des barreaux le séparaient de cette délivrance.

Des barreaux, oui, parce que même dans le choix de sa propre mort, Louis n'avait pas son mot à dire.

"Gémis mon nom, Louis. Je veux t'entendre le dire encore et encore, afin que tu ne l'oublies jamais."

Il avait traité son beau-père de pantin, mais c'était lui, au fond, qui avait perdu tout libre-arbitre.

On lui avait tout pris... Et ça l'avait changé.

We Made It [L.S.]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant