Chapitre 39

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Megumi ne sut combien de temps elle resta ainsi, dans le jardin à faire les cent pas, et à le traverser de long en large.
Son cerveau était en ébullition.

Elle était tantôt folle de rage, tantôt profondément triste.

"Bon sang, je n'arrive pas à me calmer !"

Elle était épuisée. Il était plus sage d'aller dormir un peu et de ne pas agir sur le coup de la colère, mais comment pourrait-elle dormir alors que son corps tout entier vibrait encore de rage et d'indignation ?

"Je n'y peux rien si elle allume les gens..."

"Bon sang !"

"J'aurai dû le frapper !"

" J'aurais dû le massacrer, sur le moment !"

Fondre en larmes et sortir, était la pire chose à faire.
C'était comme lui donner raison.

Pourquoi s'était-elle écrasée de la sorte devant lui ?! Pourquoi ne cessait-elle de s'écraser depuis le premier jour de son existence ?

Elle se voyait encore, pitoyable et en larmes, regarder son petit ami Motoharu la tromper sans réagir.
Sans le mettre face à ses fourberies.

Elle n'avait jamais cessé de se comporter ainsi !
Mais pourquoi ?

N'avait-elle pas droit aussi au respect ?

S'était-elle déjà montrer impolie envers les autres ?

- Pas que je sache !! Grinça-t-elle entre ses dents en donnant un coup de pied contre un innocent caillou

Comment ce type pouvait donc oser l'insulter de la sorte ?

Elle, qui s'était attendue à le voir tout paniqué et honteux en la retrouvant...

Elle qui aurait mérité des excuses dignes de ce nom pour cette mésaventure qu'il lui avait fait vivre...

Comment osait-il la rabaisser de la sorte avec son indifférence et ses insultes ?

Non, elle ne parvenait pas à se calmer, elle était bien trop hors d'elle.
Les yeux larmoyants de rage, Megumi tourna les talons et s'apprêtait à retourner dans la salle principale, lorsqu'elle le vit soudain sortir de la maison, en direction des jardins, d'un pas nonchalant.

"Tu tombes très bien !"

Sans parvenir à écouter la petite voix en elle qui lui criait qu'elle valait mieux que cela, elle s'élança à sa rencontre, d'un pas rapide, le regard déchaîné.

Hayate leva la tête vers elle et s'arrêta, intrigué.
Megumi se retrouva à peine à son niveau qu'elle lui assenait déjà une gifle retentissante.

Sa tête se renversa sur le côté, et Megumi se sentit étrangement beaucoup mieux.

La gifle lui avait brulée la main, mais c'était une douleur réconfortante.

- C'est la dernière fois, que tu me traites d'allumeuse... le menaça-t-elle d'une voix glaciale, Tu m'as bien entendu?

Hayate haussa un sourcil et tourna la tête vers elle en massant sa joue endolorie.

- Pourtant, c'est exactement ce que tu viens de faire, Megu chan, railla-t-il comme si la gifle l'avait émoustillé

Il la provoquait. Comme toujours.

Et Megumi dût faire appel à toute sa force mentale pour ne pas lui faire ravaler son sourire.

- Tu sais quoi ? Va juste mourir, dit-elle en tentant de le contourner
- Ça, ce n'est pas très gentil, ricana-t-il en lui barrant la route, je te fais sortir un peu, et c'est comme ça que tu me remercies ?

Megumi déglutit. Il était beaucoup trop près d'elle, et son regard écrasant aurait fait fuir n'importe qui, pourtant elle s'accrocha et se retint de reculer.
Préférant l'affronter du regard, sans flancher.

- Tu m'as lâché au milieu de la soirée, grinça-t-elle entre ses dents
- Je ne t'ai pas lâché, se défendit-il avec nonchalance, comme j'ai vu que tu t'amusais bien... je me suis dis que si je m'éclipsais un petit moment, tu ne t'en rendrais pas compte.
- Un petit moment ? Répéta-t-elle en plissant les yeux de colère, je ne t'ai pas revu de la nuit, Hayate !

Il se balança de droite à gauche en regardant ailleurs, feignant un malaise qu'il ne ressentait visiblement pas du tout.

- Oui bon, peut-être... qu'il se pourrait que je me sois un peu endormi... avoua-t-il en souriant, comme si la situation l'amusait

Megumi en resta sans voix pendant un bon moment.
Elle cligna des yeux, espérant sincèrement avoir mal compris.

- Tu t'es endormi...? Tu te fiches de moi ?

Il se mordit la lèvre inférieure, comme s'il se retenait de rire, et Megumi sentit tout à coup une immense tristesse prendre la place de sa colère.

- Je t'ai attendu dehors... pendant des heures avant de finalement me décider à rentrer seule, dit-elle en le dévisageant d'un air offensé, j'avais froid, j'étais terrifiée...
- Mais qu'est-ce que tu fichais dehors, toi, aussi ? S'enquit-il en haussant les épaules, il te suffisait d'envoyer un de mes camarades me chercher et je serais revenu.
- C'est l'un de tes potes qui m'a agressé, imbécile ! Comment pouvais-je retourner à l'intérieur après ça ?! Tu étais le seul à qui je pouvais me fier, alors je me suis caché en t'attendant ! J'avais trop peur de parlé à qui que ce soit d'autre !

Il secoua la tête et regarda ailleurs en pouffant de rire.
Il tentait visiblement de garder son air détaché mais, Megumi avait la sensation de voir son masque se fissurer légèrement.

- Et toi, pendant ce temps là, tu ronflais tranquillement... soupira-t-elle en le toisant du regard, je n'y crois pas...

Il leva les yeux au ciel avant de la regarder de nouveau avec une lassitude morne.

Son regard s'arrêta ensuite sur sa blessure à la mâchoire, avant de se poser sur son bandage au niveau du poignet.

Elle aurait espéré voir le masque se fissurer un peu plus, mais au lieu de cela, son visage se ferma. Brusquement.
Comme dans un claquement.

- Et sinon... c'était lequel ? Demanda-t-il après un silence, en relevant les yeux vers elle
- Qu'est-ce que ça change ? De toute façon, il n'a pas eu le temps de me faire grand chose, il est reparti dès qu'il a compris que j'étais une "femelle"...

Megumi ne sut si elle avait rêvé, mais elle avait presque l'impression qu'il était... soulagé.

- C'est bon, je vois lequel c'est, marmonna-t-il en détournant les yeux
- Bref, on s'en fous de ton pote ! Ce qui est fait est fait, et pour l'heure, je me moque bien de lui ! C'est toi qui m'a réellement déçu cette nuit !

Il la regarda de nouveau tandis qu'elle le contournait pour repartir.

- Je ne sais pas quel était ton but en m'embarquant avec toi, mais sache que j'ai passé la pire nuit de toute ma vie, et de loin ! Mais merci pour la leçon, ça m'apprendra à suivre n'importe qui...
- Pourtant... railla-t-il en dressant son bras devant elle pour l'arrêter de nouveau, je t'ai vu te marrer à t'en décrocher la mâchoire, du début à la fin.
- Oui, mais ça c'était jusqu'au moment où tu es allé faire tes cochonneries avec ta serveuse crasseuse ! Gronda-t-elle, les yeux noirs plongés dans les siens

Hayate haussa les sourcils, puis il la dévisagea pendant un instant, avant de se mettre doucement à rire.

- Ah... Ça y est. J'ai compris, s'amusa-t-il

Elle fronça les sourcils sans comprendre.

Il se mit à rire de nouveau, un brin moqueur et Megumi décela une telle froideur dans ses prunelles, qu'elle comprit qu'elle allait devoir le contredire, quoi qu'il lui dise.

- C'est ça le problème, en vrai...Tu es jalouse, dit-il en plissant ses yeux dangereux, ça t'a emmerdé de me voir partir avec elle...

À suivre...

Akai Ito ( Le Fil Rouge Du Destin) Livre 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant