Deux heures avant l'alerte
Dante
Je balade tranquillement mon regard sur la cour. Mon cours de SVT est ouvert devant moi, à la même page depuis quarante-cinq minutes. Le vent froid apporte l'odeur de l'hiver alors que je profite du calme ambiant. Mieux encore que le calme, je ne me lasse pas d'admirer l'insouciance peinte sur le visage des lycéens. Ici, la chose la plus grave qui puisse leur arriver à leur yeux est une rumeur péjorative, une rupture ou un examen raté. Je leur envierais presque cette normalité. Chez moi, on risque bien plus qu'une mauvaise note ou une insulte mais pour autant, je n'échangerais ma vie contre rien au monde.
— Laisse-moi deviner... Toi, tu n'as pas eu le temps de réviser une nouvelle fois.
Je m'arrache à ma contemplation et tourne la tête vers une des raisons pour laquelle je trouverai toujours mon quotidien beau, malgré le sang et la violence qui le peuplent. Lana me jauge de haut en bas, le regard moqueur, un livre de poésie en main. Un sourire vient de lui-même s'imprimer sur mes lèvres. Je me relève afin d'être à sa hauteur et profiter de mes quelques centimètres en plus. Je ferme les yeux et me compose l'expression la plus malheureuse possible.
— Lana, j'ai pas envie d'y aller... Cette fois, j'ai vraiment pas eu le temps de réviser... gémis-je, avec une mine de cocker battu.
— À qui la faute ? me demande-t-elle en haussant les sourcils.
Je ne réponds rien. La mienne, bien entendu. Je sais depuis longtemps que je vais avoir un devoir en biologie, mais j'ai retardé le plus possible le moment de réviser. Mieux vaut tard que jamais, non ? Je la regarde, les yeux larmoyants, espérant la faire craquer et qu'elle me propose de sécher tous les deux cette après-midi. Je sais que c'est peine perdue.
— Arrête de me regarder comme ça, tu sais bien que ça ne prend pas.
Je soupire. Pour ma défense, j'ai été très occupé ces derniers jours, mais par des affaires qui n'ont aucun rapport avec les cours...
Je passe mes mains autour de sa taille pour la rapprocher de moi. Elle se débat légèrement en riant, mais je la retiens et plonge alors dans ses yeux vert émeraude. Je pourrais me perdre pendant des heures dans ce beau dégradé de couleur. Lana a toujours eu un regard très expressif et j'adore y lire l'amour, la tendresse qu'elle éprouve pour moi. Nous sommes si près que mes lèvres frôlent les siennes. Elle frissonne, ce qui me fait sourire. Même après deux ans ensemble, elle réagit toujours de la même manière. Son parfum me chatouille les narines en même temps que quelques mèches flammes rebelles alors qu'elle blottit son visage dans mon cou. Vanille. Je souris. Lana vient de marquer le passage en hiver. En été, c'est une senteur fruitée ou de jasmin qui la précède et en saison froide, elle alterne entre amande et celui qu'elle porte aujourd'hui. Je dois dire que le jasmin reste mon favori suivi par la vanille. Je sursaute brutalement lorsqu'une main vicieuse s'infiltre sous mon tee-shirt et me chatouille les côtes. Je me tortille alors que la traitresse rit en affirmant sa prise tortueuse. Je finis par attraper ses mains dans les miennes et la coince contre mon torse. Son regard espiègle pétille. N'y tenant plus, je comble les derniers millimètres qui nous séparent et l'embrasse. Mais avant que je ne puisse approfondir le baiser, elle s'écarte doucement.
— Dante, tu vas être en retard, me prévient-elle.
— C'est pas grave, de toute manière, je veux pas y aller, répliqué-je, frustré qu'elle se soit éloignée.
Seulement, avant que je ne puisse y remédier, Lana recule, un sourire en coin. Le parfum s'éloigne en même temps qu'elle comme pour me narguer. Elle remet son sac sur son dos et passe la main dans ses cheveux roux feu que j'ai légèrement décoiffés. Je soupire une nouvelle fois, comprenant qu'elle n'en démordrait pas.
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Alementa I - Braise [TERMINÉE]
ParanormalLa fuite. Du haut de ses dix-neuf ans, Lanaya n'a jamais rien connu d'autre. Fuir le Conseil des Anciens, fuir les Alementas mercenaires, fuir cette magie qui, tel un incendie, ne laisse que des cendres sur son passage. Elle sait qu'un jour, elle hé...