Dans un réflexe salvateur, je roule au sol. Au moment même où une douleur aiguë me traverse la clavicule. Je retiens de toutes mes forces mon hurlement, de peur de donner un indice sur mon identité mais bordel ! Ma main se porte à ma blessure et un flot de sang chaud me glisse le long des doigts. Et le meilleur dans tout ça, c'est que ma chute a réouvert ma blessure faite par Lana. Putain, ils se sont tous passés le mot pour viser cet endroit ou quoi ?
Je cherche désespérément un tant soit peu de relents du sang d'Alex mais ayant forcé dessus plutôt dans la journée, je l'ai laissé se ressourcer dans ma voiture. Lorsque j'utilise un Alementa, je suis malheureusement soumis aux mêmes règles que leurs propriétaires originaux. Soit un temps et une puissance limités sous peine de frôlées la mort. Et j'ai déjà énormément tirer sur mon pouvoir et le sien ce matin.
Mon père s'approche de moi, un sourire victorieux sur les lèvres. Il s'accroupit et observe le sang couler de la plaie et imbiber ma cape.
— Ça doit vraiment faire mal...
Je ne te le fais pas dire, enfoiré...
J'inspire profondément. J'ai l'impression qu'une épée tourne et retourne dans ma chair meurtrie. Je ne trouve pas la force de lui répondre par l'arpazos de l'Alementa de la pensée si simple pourtant, quémandeur de si peu de force. Mon paternel semble se complaire de mon silence.
— À dire vrai, j'ai envisagé d'enduire la balle d'azalée, dit-il en passant le doigt sur le liquide carmin s'échappant au sol. Car si vous pouvez utiliser un arpazos, c'est que vous en avez les gènes à défaut des dons. Et j'ai déjà vu le visage d'Alementas empoisonnés à l'azalée. Voir tant de souffrance et de peur dans leurs traits est impressionnant. On dit que l'on revit les meilleurs et pires moments de notre vie durant la léthargie précédant la mort. Seulement, personne n'en est jamais revenu pour confirmer ou infirmer cette théorie. Ça aurait pu être intéressant que vous en fassiez l'expérience, vous ne trouvez pas ?
Je souffle autant de souffrance que d'agacement. Je compresse la plaie pour endiguer l'hémorragie. Je sais parfaitement que tu n'as pas empoisonné la balle, abruti, sinon je ne serais pas dans cet état-là, alors abrège.
— Mais je me suis dit que c'était quand même beaucoup moins ennuyant si nous pouvions taper la jaquette en attendant que vous vous vidiez de votre sang.
Tu m'étonnes, Jon'... C'est vrai qu'entre deux ou trois assassinats, tu as le temps de t'ennuyer...
— J'avoue, je suis énormément tenté de soulever votre masque pour connaître enfin votre identité. J'ai même sous la main un Alementa capable de violer toute votre vie, fouiller dans votre passé et vous dépouiller de votre intimité pendant que vous êtes à terre, en train de vivre vos derniers instants. C'en est presque jouissif.
Un frisson de peur me parcourt malgré moi et descend le long de ma colonne vertébrale. Les larmes coulent sur mes joues. Je n'ai pas le droit d'échouer, pas alors que ma machine rudement huilée vient de s'enclencher. Il faut que je m'en sorte... Allez Aimazilia...
— Mais je n'en ferai rien, poursuit mon père, après avoir ménagé son suspense.
Je me fige. Quoi ?
— Eh oui, quoi que vous puissiez penser, je vous laisserai emporter ce secret dans votre tombe. Je sais ce que c'est de voir sa vie s'effondrer en même temps que tout ce qu'on s'est efforcé de protéger. Il ne vous reste de toute manière plus que quelques minutes à vivre à ce rythme-là d'hémorragie.
Il caresse le poignard qu'il conserve toujours accroché à sa ceinture, l'air songeur.
— C'est dommage... Je reste persuadé que nous aurions pu nous entendre à merveille si vous n'étiez pas si indépendant... Nous possédons des qualités très similaires, vous savez. Le sang-froid, le courage face à la mort et face au crime, cette énergie qui pousse les autres à nous craindre.
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Alementa I - Braise [TERMINÉE]
ParanormalLa fuite. Du haut de ses dix-neuf ans, Lanaya n'a jamais rien connu d'autre. Fuir le Conseil des Anciens, fuir les Alementas mercenaires, fuir cette magie qui, tel un incendie, ne laisse que des cendres sur son passage. Elle sait qu'un jour, elle hé...