34. Transfert

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Lorsque les autres nous rejoignent dans la chambre, une fois l'interrogatoire terminé et les policiers repartis, le premier regard qui se pose sur moi est celui de Mathias, et il se fait moqueur. Il s'approche, bras croisés, et se laisse tomber dans le fauteuil qu'il occupait un peu plus tôt avec un air mutin.

— Il a dû croire qu'il s'était retrouvé face à une vegan pro-écologie, ricane-t-il.

J'esquisse une petite moue désabusée et hausse les épaules.

— Tu oublies l'anti-chasse hystérique, ironisais-je.

— Au moins, ça a eu le mérite de détourner leur attention. Vous vous en êtes bien sortis, on devrait pouvoir laisser tout ça derrière nous très vite, juge Taylor.

— Ouais, enfin, on est pas encore de retour au chalet, tempère Simon avec un soupçon de colère dans la voix.

— Où est Jenifael ? demandent alors Louka et Florian dans un même élan.

Ils s'observent avec curiosité, mais Nadya secoue la main en répondant rapidement.

— Elle arrive. Ne vous en faites pas pour elle, c'est une grande fille.

Je me laisse retomber mollement dans l'oreiller et soupire en posant mes mains sur mon visage. Mathias, toujours sur ses gardes, attrape rapidement mon bras pour me le faire relever et m'observe, sourcils froncés.

— Ça va. C'est la pression qui redescend, assurais-je.

— Ne me fais plus jamais un truc pareil, marmonne-t-il.

D'abord surprise par sa réflexion, je finis par sourire et glisse ma main sur sa joue.

— Désolée de t'avoir inquiété. Mais tu vois, je suis plus robuste que j'en ai l'air, murmurais-je.

— Arrête de jouer l'invincible, ça ne marche pas avec moi, réplique-t-il.

Je ravale un léger soupir. Après tout, ils ont dû se faire un sang d'encre et je sais ce que ça fait de se savoir impuissant. Alors je ne peux pas leur en vouloir... Mais tout de même, la colère qui émane de lui m'inquiète. Est-ce à cause de l'agression de son père ? Du fait qu'il n'ait pas eu le temps de profiter de sa vengeance, ou au contraire qu'il n'ait pas eu le temps de poser des questions qui resteront à jamais sans réponse ? Il est sûrement furieux aussi que nous nous soyons laissé capturer aussi facilement. Il est toujours énervé quand je ne parviens pas à éviter les coups. Mais il faut reconnaître à la meute du Nord qu'elle a clairement l'avantage du nombre.

Sans doute aussi qu'il a raison. Personne n'est invincible.

Nous nous tournons tous vers la porte dans un sursaut lorsque la poignée est tournée depuis l'extérieur. Mais c'est Jenifael qui entre, un sac sur le dos et un sac de courses bien rempli au bras. Elle repousse ses longueurs de feu derrière son épaule et nous observe avec surprise avant de désigner la porte restée entrouverte.

— Il va nous falloir des fauteuils, quelqu'un peut réussir à en trouver ?

— Des fauteuils ? hésite Simon.

— Elles ne peuvent pas vraiment marcher pour le moment, explique la plus jeune en nous désignant, Jia et moi.

C'est vrai que je n'ai pas essayé, mais avec l'attelle, je dois en tout cas être handicapée et ne pourrait pas me déplacer rapidement en cas de besoin. Et puis, c'est plus crédible si je suis dans un fauteuil roulant. Quant à Jia, à cause de sa blessure à la cuisse, je ne sais pas si elle est en état non plus... Il faut croire que la jeune femme a tout prévu. Je m'étonne qu'elle soit aussi méticuleuse et précise, d'ailleurs...

Heart of Wolf - Tome IOù les histoires vivent. Découvrez maintenant