24 | Sous pression

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Cela faisait maintenant deux jours que Sydney avait quitté l'appartement et Sodjo Allen ne semblait pas au mieux de sa forme. En vérité, elle avait broyé du noir pendant ces dernières quarante-huit heures. C'était une femme au grand cœur et elle culpabilisait. Elle était inquiète aussi. Frustrée et en colère, autant que l'on pourrait l'être si l'on se trouvait confronté à une telle situation de crise.

Ce jeudi matin, l'avocate avait quitté son lit d'un pas blasé et lent. Elle avait descendu les marches de l'escalier difficilement. Chaque fois qu'elle posait son pied à terre, elle avait l'impression que son corps tout entier s'enfonçait dans du sable mouvant.

Puis, tandis qu'elle venait de descendre la dernière marche, elle laissait un gentil sourire illuminer les traits élégants de son visage alors qu'elle apercevait Nicky de dos et accroupi à quelques mètres d'elle.

Elle dit joyeusement ;

« Vous êtes bien matinal aujourd'hui. »

Les oreilles du détective privé s'étaient soulevées comme celles d'un lapin interpellé. Il tournait immédiatement la tête et plongeait un regard déterminé dans celui de Sodjo qui semblait égayé bien que perdu. Elle ne comprenait décidément pas ce qu'il était en train de fabriquer mais elle savait que cela risquerait de l'amuser et d'énerver Laura.

La brune avait fini par comprendre comment le duo de détectives fonctionnait. Un peu étrange comme relation mais elle n'allait pas leur jeter la pierre. Chaque relation était unique et précise. S'il fallait que Larson prenne des coups de massue au moins dix fois par jour pour qu'ils entretiennent leur harmonie alors qu'il en soit ainsi.

La femme continuait donc sa marche, voulant rejoindre son garde du corps. Et alors qu'elle commençait à lui demandé ce qu'il fabriquait les genoux à terre, il la stoppa net dans un hurlement fracassant ;

« Ne bougez plus ! Ne faites plus un pas ! Ça m'a pris toute la nuit ! »

Sodjo Allen s'arrêta après avoir sursauté.

Eh bien, qu'est-ce qui lui prend tout à coup ?, s'interrogea-t-elle en fronçant les sourcils.

Sodjo inclina le visage lorsqu'elle vit Nicky zieuter la pièce en long, en large et en travers. Alors, elle comprenait. Elle s'était senti si réconforter d'apercevoir Larson, qu'elle ne s'était même pas rendu compte de tout le bazar qu'il avait mis dans le salon.

Une quantité excessive de dominos alignés successivement d'une manière si délicate et si précise. Des dominos de couleurs différentes : des blancs, des noirs, des rouges, des beiges, des marrons... Des dominos de toutes les couleurs.

L'avocate plissa les yeux et se recula d'un pas. Puis de deux. Puis de trois. Elle reculait jusqu'à parvenir à avoir la globalité dudit chef-d'œuvre dans son champ de vision.

Alors qu'elle prenait conscience de ce que tout cela signifiait, ses sourcils se relevaient en même temps que ses yeux s'ouvraient grands. Elle se mettait à rire nerveusement, ses épaules montaient et descendaient de manière irrégulière. La brune savait que Larson était quelqu'un de talentueux et il était, pour ainsi dire, très talentueux dans la bêtise.

Cet homme est complètement suicidaire, s'était-elle dit.

Tandis que les rires de la femme s'intensifiaient, Nicky actionnait le mécanisme. Les dominos se mirent à tomber les uns sur les autres : un véritable enchaînement en cascade. L'avocate ne pouvait qu'admettre qu'il avait fait un circuit très impressionnant.

Les yeux du brun suivirent chaque domino qui venait s'écraser sur son voisin. Le visage du détective s'illuminait et un sourire aussi idiot que pervers étirait ses lèvres de plus en plus. Les poings serrés contre sa bouche, Nicky tremblait d'impatience.

Nicky Larson \/ Quel est notre lien ? | TERMINÉEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant