Chapitre 2

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Quand nous arrivâmes chez elle, un chat à la fourrure aussi noire que les ténèbres l'accueillit. Cet animal me rappela quelques images d'Épinal représentant d'étranges femmes affublées d'animaux maléfiques. Le chat passa une ou deux fois entre les jambes d'Agathe puis s'éloigna en ronronnant.

Dans le salon, nous fûmes accueillis par un délicieux fatras d'objets hétéroclites. Le seul siège libre était un canapé à deux places, sûrement centenaire. Mais là aussi, quelques pièces de lingerie étaient éparpillées sur un des accoudoirs et le dossier.

- Assieds-toi, Hugues, me dit Agathe en me désignant le canapé d'un geste gracieux du bras. Je ne serai pas longue.

Je pris place du côté de l'accoudoir dépourvu des sous-vêtements de ma cavalière. En m'asseyant, je fus étonné par l'onctuosité des cousins. Ils semblaient suivre mes formes pour m'offrir un confort maximum. Installé de la sorte, j'avais l'impression de m'être glissé dans une vieille paire de pantoufles particulièrement confortables. Sans aucun doute, s'extirper d'une telle banquette me demanderait un énorme effort.

Agathe revint très rapidement, avec un plateau qui supportait deux tasses à café. Pour être aussi prompte, elle avait sûrement dû préparer un café instantané. Cela s'annonçait comme le seul faux pas de cette délicieuse soirée. Toutefois, en portant mes lèvres à ce breuvage, je ne pus qu'admettre que je m'étais trompé tant ce moka était plein d'arômes.

- Comment trouves-tu mon canapé ?

Mon amie voulait-elle l'avis de son invité ou celui de son collègue antiquaire ? Je cherchai une réponse appropriée pour endosser les deux rôles à la fois.

- Elle n'est pas aussi ancienne qu'elle en a l'air, n'est-ce pas ? Son confort est bien trop moderne. Pourtant, ses lignes et surtout sa facture sont celles d'un meuble d'époque. En tout cas, c'est très agréable de se blottir dedans.

- En effet, c'est un canapé très particulier. Une pièce unique même.

Nous continuâmes à déguster notre café. Sans rien manifester de mes interrogations, je me demandais ce qu'elle voulait dire par « très particulier »

Durant plusieurs minutes, notre conversation se porta sur la soirée que nous venions de passer, plaisantant des autres invités. Imperceptiblement, Agathe s'était rapprochée de moi. Elle s'empara des tasses et les posa sur un petit meuble placé à proximité. Ensuite, elle me proposa, en se penchant vers moi pour porter ses lèvres au niveau de mon oreille :

- Veux-tu que je te montre ce que l'on peut faire sur ce canapé ?

Une telle proposition était bien trop alléchante pour que je puisse la refuser. Agathe se redressa et se leva. D'un geste machinale, elle secoua sa robe et ses jupons comme pour les défroisser. Le son provoqué par ces simples gestes fit grimper mon excitation.

Elle s'inclina vers l'accoudoir et souleva la petite culotte qui le recouvrait. Sous la fine pièce d'étoffe se trouvait une sorte de panneau de contrôle encastré dans le tissu du meuble. Elle pressa sur l'un des interrupteurs et le canapé se mit à s'animer. Une extension glissa sous mes jambes, les soulevant du sol, pendant que le dossier s'inclinait. Quasiment allongé à l'horizontal, le confort se fit encore plus ressentir. J'étais comme sur un nuage.

Agathe appuya sur un autre bouton. Du centre du canapé et de l'accoudoir à ma gauche apparurent quatre bras d'apparence humaine qui se saisirent de moi. Deux d'entre eux m'agrippèrent les jambes quand les autres entourèrent mon torse. Ils avaient l'aspect de bras de femmes mais leur force était surhumaine. J'allais ouvrir la bouche pour protester mais Agathe avait déjà appuyé sur un autre interrupteur. Une main se plaqua sur mes lèvres et étouffa toute tentative de protestation. Je ne pus exprimer mon étonnement et mon inquiétude que par le regard. La soirée s'était si bien passée entre nous que je ne m'étais pas attendu à quelque chose de plus intime et plus tendre. Au lieu de cela, je me retrouvais entravé sur ce canapé « très particulier ».

Mon inquiétude grimpa à un niveau supérieur quand je vis son doigt presser un autre bouton. La partie où ma compagne du soir était assise peu de temps auparavant se redressa et les coussins me recouvrirent. J'en étais recouvert de la tête aux pieds. Seule ma tête émergeait des coussins et celle-ci était toujours bâillonnée par cette main artificielle douce mais ferme. Toute fuite était impossible.

Agathe se tenait devant moi en agitant légèrement ses jupons.

- Alors, Hugues ? Que penses-tu de mon canapé ? N'est-il pas particulier ?

Bien sûr, je ne pus lui répondre mais toutefois je parvins à émettre un grondement sourd.

- J'ai tellement envie de faire l'amour, s'écria-t-elle. Pas toi ?

Elle dénoua ses longs cheveux noirs, et pourtant éclatants, puis les secoua afin de les faire tomber sur ses épaules nues.

- Oh c'est vrai, tu ne peux pas répondre... pour le moment.

Agathe pressa de nouveau sur le bouton qui commandait à la main artificielle. Elle disparut dans le dossier du canapé et je pus enfin parler. Étrangement, je n'avais plus envie de protester. Les coussins s'écartèrent de moi, également. Seuls les quatre bras continuaient de me maintenir.

- As-tu envie, toi aussi ? demanda mon étonnante amie.

- Oui, j'en ai très envie, ai-je dégluti d'une voix mal assurée.

- Je le sais. Je sais que ton sexe est tendu, assura-t-elle sans se tromper. Je sais même depuis quand tu bandes.

Son regard plongeait dans le mien. Ses doigts glissaient sur sa jupe écarlate tout en la faisant bruisser.

- Mais avant, tu vas devoir t'en montrer digne, ajouta Agathe. Gagne le droit et je serais à toi.

EnsorceléOù les histoires vivent. Découvrez maintenant