Pendant les quelques instants où je fus seul, j'hésitai à remettre mes vêtements puisque la dernière métamorphose m'avait laissé nu. Mais comme j'avais encore deux mutations à connaître, je renonçai, me contentant simplement d'enfiler mon boxer.
Agathe revint rapidement dans le salon, la mine insatisfaite.
- Je n'ai rien trouvé qui me convienne, déclara-t-elle. Par contre, nous n'avons pas fait la vaisselle. Tu veux me donner un coup de main ? Je n'ai pas envie d'avoir à la faire demain matin. Si je la lave et que tu l'essuies nous en aurons vite terminé.
Elle m'attrapa par la main et m'attira vers elle pour me conduire dans la cuisine.
- Je suis désolée, je ne suis pas aussi ordonnée que toi, fit-elle pour s'excuser les rangements pour le moins désordonnés de la pièce. Mais je pense que je passe plus de temps en cuisine que toi.
Elle s'empara d'un torchon qu'elle déposa sur mon épaule avec un sourire et un baiser avant de chercher un tablier pour elle, sans me lâcher la main.
- Tu es prêt mon chéri ?
Aussitôt l'étrange sensation qui accompagnait les transformations se fit sentir et je me mis à rétrécir. Je n'avais pourtant pas entendu l'invocation qui aurait du accompagner ce changement. Nul doute n'était permis, elle n'avait plus besoin de formuler le sort à haute voix pour qu'il agisse.
Je n'eus pas le temps d'achever ma réflexion que j'étais devenu un tablier, tenu par le bout des doigts. Je m'examinai pour en savoir plus. J'étais un petit tablier en vichy bleu. Un tablier ordinaire, sans fioriture ni dentelle. Juste un simple accessoire comme on en trouve dans toutes les cuisines.
Agathe me plaça devant elle. Puis elle fit passer les deux parties qui auraient du être nouées entre elles sous la ceinture de sa jupe afin de maintenir le contact nécessaire avec sa peau pour que le sort fonctionne. Je n'étais donc pas attaché mais juste replié.
Je pris un moment de réflexion pour connaître mes éventuelles possibilités. Me serrer tout autour d'elle ? Impossible, j'étais trop petit. Idem pour venir caresser ses jambes. Je ne pus que me résigner. Je n'avais aucun moyen d'agir sur elle. J'étais un simple tablier, une pièce de tissus sans importance. Je compris que c'était une petite vengeance de sa part et une démonstration qu'elle aussi était capable de me priver de tous mes moyens d'agir. Faisant contre mauvaise fortune, bon cœur, j'acceptai mon sort durant les minutes à venir.
Agathe se limita à faire simplement la vaisselle, sans un mot. Elle nettoya chaque élément et les empila sur l'égouttoir ; Puis elle s'essuya les mains sur moi avant que je ne reprenne mon apparence.
- Alors, Hugues, as-tu aimé être un tablier ?
- De toutes les transformations que j'ai eu à connaître, c'est certainement la plus ennuyeuse. J'étais prisonnier entre l'évier et toi, sans pouvoir agir et en plus j'ai du essuyer tes doigts maculés d'eau de vaisselles. Rien de très excitant.
- Je voulais te montrer à quel point c'est désagréable d'être impuissant. Et qu'as-tu pensé de mon choix de tablier, mon amour ?
- Bah c'était un tablier ordinaire, le truc de base sans charme.
Ma petite amie traversa la cuisine pour se placer devant un tiroir dont elle retira une première pièce de tissus.
- Peut-être que tu aurais préféré celui-ci ?
Elle brandit un grand tablier blanc de femme de chambre. Traditionnel mais large, il était garni de dentelle et deux longues bretelles à frou-frous qui se laçaient dans le dos.
Agathe fouilla encore dans le tiroir et fit apparaître une nouvelle pièce de tissus.
- À moins que tu aies préféré être comme celui-là.
Il s'agissait, cette fois, d'une jupe tablier descendant jusqu'aux chevilles, de style victorien. Le devant remontait jusqu'aux épaules pendant que l'arrière était constitué de deux bandes de tissus garnis de volants en dentelle qui se croisaient dans le dos. Le tout se nouait à l'arrière de la taille. D'un geste de la tête, je marquai mon approbation.
- Nous verrons ça une autre fois, lança-t-elle. Pour le moment, je ne suis pas certaine de te faire assez confiance pour te laisser contrôler une tenue aussi grande pour jouer avec moi. Lève les bras, s'il te plaît.
J'obtempérai sans rien dire. Agathe agita les mains et le tablier victorien vola jusqu'à moi. Il s'ajusta au dessus de moi et descendit pour s'enrouler autour de ma taille. Cependant, avant de se placer dans mon dos, les deux liens qui devaient se nouer entre eux s'enroulèrent autour de mes poignets et les entravèrent derrière moi. J'essayai bien de résister, mais cela se montra rapidement inutile. Mes poignets étaient ligotés entre eux par le tablier. La jupe qui constituait tout le bas était bien plus ample que je ne l'avais imaginé. Elle était assez large pour recouvrir une crinoline. Elle s'enroula autour de mes jambes. À cet instant, j'étais fermement maintenu. Agathe s'approcha de moi sans un mot, le petit tablier vichy à entre les mains. Elle l'enroula sur lui même et me bâillonna avec. Il n'y avait aucune magie dans ce bâillon, mais il n'en demeurait pas moins d'une grande efficacité.
La jupe tablier se mit à se mouvoir et m'entraîna avec elle vers le salon. Elle me fit asseoir sur le canapé que j'avais découvert la veille. Agathe suivait en marmonnant des phrases difficilement audibles. Je me doutai que c'étaient ces phrases qui faisaient agir la jupe tablier. Quand je fus installé sur le divan, elle se plaça devant la console qui se trouvait dans l'accoudoir et en retira une petite télécommande. Elle pressa quelques boutons qui firent apparaître les bras articulés dont j'avais déjà fait la connaissance. Rapidement, mes chevilles et ma taille furent agrippées. En même temps que les bras s'emparaient de moi, la jupe tablier relâcha mes jambes et remonta pour recouvrir mon torse et mon visage. Après avoir été empoigné, bâillonné, je me retrouvais avec les yeux bandés. J'ai essayé de concentrer toutes mes forces pour libérer mes mains, mais celles-ci étaient bien trop attachées pour que je puisse défaire les liens du tablier.
- Maintenant, je vais te montrer quelques-unes des autres possibilités que cache mon canapé, souffla Agathe qui s'était approchée de mon oreille.
Sa voix semblait calme mais déterminée. Aucune trace de colère ne se faisait entendre. Mais il était évident qu'elle allait me faire payer mon utilisation des gants. Je l'avais énervée plus que je ne l'avais pensé.

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Ensorcelé
ParanormalHugues et Agathe se connaissent depuis l'enfance. Amis, ils possèdent tous les deux leur boutique d'antiquités dans la même rue. Au cours d'un dîner de gala où ils se rendent ensemble, Hugues va prendre conscience qu'Agathe est bien plus que la "Gir...