Chapitre 30

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Le moment des au revoir déchirant est passé. Ma mère n'a pas pleuré mais June si. On revient dans deux semaines. Deux semaines qui nous paraissent tellement longues. Sur le trajet, j'ai demandé à June de ne rien dire au sujet de mon coming out. Heureusement pour moi, ma sœur a beau être bavarde elle sait très bien garder les secrets. Elle a promis, juré, craché de ne rien dire. J'ai essayé d'appeler Félix pour avoir des nouvelles, il n'a pas décroché et m'a répondu par message qu'il allait bien et que sa mère revenait ce soir, gage qu'il sera en sécurité pour quelques jours au moins. Je lui ai rappelé que même s'il ne venait pas en cours il pouvait passer chez moi quand il voulait. Il n'a pas répondu.
Arrivée à la maison, je découvre une voiture que je ne connais pas. Puis ça me revient : Parfaite Cathy est là. Je roule des yeux d'avance.
— C'est trop tard pour faire demi-tour ? Dis-je pour moi-même.
Nous passons la porte, June hurle dans la maison pour prévenir de notre arrivée. Libby arrive et demande sévèrement à June de faire moins de bruit. Elle est toujours moins patiente quand on revient de chez notre mère.
— Vous avez passé un bon week-end ? Demande-t-elle en remettant son masque de belle-mère parfaite.
June commence à lui raconter tout ce qu'on a fait et Libby l'écoute attentivement. Quant à moi je pars à la recherche de mon père que je trouve dans son bureau. Il sourit de toutes ses dents en me voyant.
— Vous êtes déjà arrivés ?
Il me tend les bras dans lesquels je viens me coller.
— J'ai appris pour Lizzie.
Mon cœur manque un battement avant que je comprenne de quoi il parle.
— Ouais, c'est super, dis-je en souriant.
Il précise qu'elle lui a envoyé un message et qu'il lui a répondu qu'il avait hâte de savoir s'il allait avoir un petit fils ou une petite fille. J'étais sûre que mon père allait être ravi à l'idée de devenir grand-père. Libby entre dans le bureau et nous coupe.
— Sacha, je pensais que tu t'étais déjà volatilisée dans ta chambre. J'ai quelqu'un à te présenter.
Je la suis, à contre cœur, jusqu'au salon où se trouve Cathy. Debout, un doux sourire sur les lèvres. Elle est exactement comme sur ses photos, moi qui ai toujours pensé qu'elle les photoshoppait : absolument pas. Sa peau est parfaite, ses dents aussi blanches que celles d'un mannequin pour une pub de dentifrice, ses cheveux blond platine sont tirés en une queue de cheval parfaite que Libby a dû lui apprendre à faire avant même qu'elle ne sache écrire. Elle est grande, plus grande que moi, et très fine. Elle pourrait définitivement être mannequin, et pas uniquement pour du dentifrice.
— Ravie d'enfin te rencontrer Sacha, j'ai beaucoup entendu parler de toi.
Je suis supposée être aussi agréable qu'elle, alors je m'efforce de lui répondre aussi gentiment.
Après ces présentations qui n'étaient pas vraiment nécessaires je m'éclipse à l'étage, dans ma chambre où je peux enfin être tranquille. Je prends soin de bien fermer la porte pour ne pas entendre les rires insupportables de ma belle-mère qui est beaucoup trop guillerette. Je m'allonge dans mon lit et souffle, mon autre maison me manque déjà.

Passons le repas beaucoup trop long où Libby n'a fait que parler de Cathy. Ça doit vraiment finir par être gênant d'être mise en avant en permanence comme sa mère le fait. Quoi qu'elle doive vivre ça depuis sa naissance en fait avec une mère comme Libby. Peut-être que je la plains un peu au fond.
Ma douche prise, je me retrouve en pyjama dans mon lit. J'allume mon ordinateur pour regarder une série quand quelqu'un frappe à ma porte. Je m'attends à voir June qui me dit qu'elle a oublié un truc important chez maman. Mais non, Cathy se faufile dans ma chambre.
— Salut, dit-elle en me présentant son plus beau sourire.
Je ne sais pas ce qu'elle fait là, je ne sais pas de quoi elle a besoin, mais je suis sûre de ne pas l'avoir.
— Ça te dérange si je reste un peu avec toi ? Je m'ennuie toute seule dans ma chambre.
Elle n'a pas des amies à qui parler par messages, un livre à lire, des cours à réviser ? Je ne sais pas, n'importe quoi qui pourrait éviter qu'elle soit avec moi dans ma chambre. Mais j'imagine que maintenant qu'on fait partie de la même famille je dois être sympa.
— Non, pas de problèmes.
Elle regarde tout autour d'elle, prête à complimenter ma décoration inexistante, afin d'être polie.
— Pas trop dur de vivre avec ma mère ?
Alors là, elle me surprend. Est-ce que c'est un piège ?
— Elle fait bien à manger, répondis-je pour plaisanter.
Elle hoche la tête.
— C'est clair que ça, elle sait faire. Le repassage aussi, et les poussières. Je pense qu'elle est née avec des produits ménagers à la main.
Je me surprends à rire, quand il s'agit de se moquer de Libby je suis toujours partante.
— T'es en terminale c'est ça ?
On commence à discuter du lycée, de ses meilleurs souvenirs et des profs qu'on a en commun. Elle me donne tout un tas de conseils pour se mettre certains profs dans la poche et je réalise que la parfaite Cathy n'est pas aussi parfaite qu'elle le prétend et elle est plus cool que ce que je l'aurai pensé.

Fix meOù les histoires vivent. Découvrez maintenant