Seule, ou presque

V

   Une semaine. Je suis enfermée dans un labyrinthe depuis une semaine. C'est très étrange de dire ça, d'ailleurs.

   Ce qui est vraiment paradoxal, c'est que je passe mes journées dehors mais que j'ai quand même peur de faire une crise de claustrophobie un jour...

   Les gars ont décidé de m'envoyer au milieu des tomates et des salades pour occuper mes journées. Ils avaient hésité avec les cuisines mais certains (dont je ne citerai pas les noms) avaient peur que les empoisonne. Sérieusement.

   Et aussi... Une semaine que je suis là mais il y en a un qui n'est toujours pas là: mon prénom. Oui, oui... Toujours autant le trou noir et toujours autant perturbée par les visions de mon arrivée...

   Là, je suis à l'écart, adossée à un mur du Labyrinthe, perdue dans mes pensées. Tellement perdue que je n'entendis pas Newt s'assoir à côté de moi.

- Ca va, Miss ?

   Oui. Comme personne ne connaît mon prénom, ils m'appellent "Miss" (mais pas tous, faut pas trop rêver...). Ce qui ne me dérange pas, au contraire: ça me fait plutôt rire !

- Ca va. Dis... Tu crois que je vais rester sans nom encore longtemps ?

- Aucune idée. Tu bas tout les records, depuis que t'es arrivée !

   On rigola légèrement. Mais, en vrai, je suis pas bien.

- Imagine... Vous, vous êtes arrivés avec votre prénom et moi, des souvenirs. Quelques peu inutiles, soit dit en passant...

- Ils sont pas inutiles. Grâce à eux, on est sûrs qu'on est surveillés par des fous et qu'on n'est que des cobayes. C'est pas super joyeux mais c'est déjà ça...

   Je pose ma tête sur mes genoux ramenés contre moi. Cette histoire commence à vraiment me prendre la tête et je n'aime pas ça.

   Quelques instants plus tard, je sens le sommeil me prendre...

" - Je suis vraiment heureuse de te montrer enfin les Labyrinthes actifs.

- Je suis assez curieuse, je l'avoue.

   Devant moi, des écrans géants diffusant des images d'un espace entouré de murs géants. On y voit trois garçons dont un qui semble assez gravement blessé au bras. Il était en sang et le garçon devait souffrir au vue de la tête qu'il tirait. Je fis une tête assez dégoutée et me tournai vers la femme blonde à mes côtés.

- Qu'est-ce qu'il lui arrive ?

- Il s'est fait attaqué il y a une demi-heure.

   Elle était si calme que ça en était déroutant.

- Mais... Il va s'en sortir ?

- Le jeune Jake n'est pas immunisé, alors je crains bien que non.

- Comment vous pouvez rester aussi impassible face à ça ? C'est horrible !

- Tu te rappelles ce que je t'ai dis il y a quelques mois ? C'est la seule solution que nous ayons si nous voulons produire un vaccin suffisamment efficace. Et puis, le Labyrinthe n'est pas grand chose comparé au autres tests, crois moi.

   Je ne répondis pas. Je n'étais pas au courant que leurs manières étaient si... Extrêmes ?

- Mais, ne t'en fais pas, ce n'est pas prévu que tu y ailles, toi aussi. Tant que ton travail est aussi satisfaisant que maintenant, tout ira bien pour tout le monde, Thea."

   Je me réveille en sursauts. Qu'est-ce que c'était que ça ?? Et puis...

- Je m'appelle Thea.

- Quoi ? Eh, ça fait dix minutes que t'es en transe, ça va ?

   Je tourne ma tête vers ma gauche et me retrouve nez à nez avec Newt. Je comprends toujours pas ce qu'il m'est arrivé. Ce que je réalise, par-contre, c'est que je me suis endormie à même le sol, sur l'herbe.

- Je... Je sais pas... C'est...

- Tu te rappelles de quelque chose ?

- Euh... C'était vraiment bizarre mais... Je m'appelle Thea.

- Ok... Ben, enchanté, Thea !

   Je commence à ouvrir la bouche pour dire autre chose quand un souvenir me revint en mémoire. Un très mauvais souvenir, même... Face à moi, Newt me regardait toujours, avec une drôle de tête, quand même.

- Si je raconte la suite, je risque encore de passer un moment enfermée ?

- Non, enfin, pourquoi...

- Ok. Parce que je crois que j'ai de nouveaux souvenirs... Je crois... Je crois que je bosse pour WICKED. Une femme blonde me montrait des écrans où on voyait le Labyrinthe et... Un gars, Jake, je crois, s'était fait attaqué. Je trouvais ça horrible mais elle, on dirait qu'elle n'en avait rien à faire... Que c'était obligé. Elle m'a promis ensuite que je n'irais pas si je continuais à bien travailler.

   Il me regarda, droit dans les yeux et je pus y sentir une forme d'émotion perceptible.

- Je... Tu... T'as vu Jake... ? Mais...

   Il sembla soudain apeuré et commença à chercher quelque chose, frénétiquement. Je compris qu'il tentait de savoir où sont les caméras par lesquelles on est surveillés.

- Je crois, oui. Enfin, c'est comme ça qu'elle l'a appelé. Mais... T'étais là, aussi ?

   Il retourna son regard vers moi, pas tellement rassuré. A sa place, je serais sûrement dans le même état.

- Oui...

   Il s'assit et passa une main sur son visage, se ressassant des mauvais souvenirs, très mauvais certainement.

- Jake est le second à être arrivé au Bloc. Moi, je suis le troisième. Quand il s'est fait piqué, qu'il a commencé à dérégler total, on savait pas quoi faire, avec Alby. Quand on a compris qu'on pouvais pas le sauver, on l'a envoyé dans le Labyrinthe, il tenait plus au gnouf et... On l'a plus jamais revu. On a essayé de le cacher aux blocards pendant un moment jusqu'à qu'un autre se fasse avoir, aussi...

   Ça le touchait, ça se voit. Et j'eus de la peine pour lui.

- Désolé...

- C'est rien. C'est normal. Enfin... Normal, tout est relatif, quand on sait qu'on est enfermés au milieu d'un Labyrinthe, plus grand chose n'est "normal"...

   Il esquissa un sourire.

- Bon... Les autres vont commencer à se poser des questions, on ferait mieux d'aller déjeuner. Tu viens ?

   Il me tendit sa main pour m'aider à me relever et on partit vers les tables de pique-nique à l'extérieur.