Chapitre 61

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Pour fêter le lancement de "Cinderella, the Musical", Disney a organisé une grande soirée promotionnelle dans l'une des plus grandes salles de New York

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Pour fêter le lancement de "Cinderella, the Musical", Disney a organisé une grande soirée promotionnelle dans l'une des plus grandes salles de New York. Tout le gratin est là : les producteurs, les comédiens - dont Nikki et moi faisons désormais partie - et toute une ribambelle d'acteurs et de célébrités liés à l'univers Disney et aux comédies musicales. Je peux voir quelques membres de la troupe qui a interprété Hamilton, un peu plus loin, tandis que Nikki et moi entrons dans la pièce sous les flashs et les caméras.

- Mademoiselle Patterson ! Mademoiselle Patterson ! Par ici !

Je m'arrête devant le journaliste qui m'appelle, muni de son gros micro devant la grosse caméra de son assistant.

- Mademoiselle, reprend-il alors, vous êtes enfin de retour à New York ! Qu'est-ce que ça vous fait d'être ici ? Et pourquoi cette absence si longue et mystérieuse ?

- Je suis très heureuse d'avoir terminé mes projets en Angleterre, lui réponds-je en souriant, et d'être à nouveau là où je me sens le mieux. New York m'avait manqué, et je suis comblée par l'opportunité qui m'a été offerte ici.

Je ne donne ni plus, ni moins. Avec le temps, j'ai appris comment répondre aux questions auxquelles on n'a pas envie de répondre : en éludant, et en souriant.

Nikki et moi finissons par réussir à rejoindre le reste de la troupe, que nous commençons à bien connaître. Ces trois derniers jours, depuis la réunion qui nous a informés que nous étions pris dans la pièce, nous avons tous passé beaucoup de temps ensemble. La production veut qu'on apprenne à se connaître et je trouve que c'est une bonne chose : si nous devons passer les six prochains mois ensemble, alors je veux vraiment pouvoir voir cette troupe comme une seconde famille. C'est pour ça que Broadway, que le théâtre sont magiques : les amis deviennent la famille, très souvent. Regardez Nikki et moi ; un lien s'est créé entre nous et même après des mois d'absence et de silence, nous nous sommes retrouvées comme au premier jour.

Comme nous l'ont demandé les producteurs, mon amie et moi avons mis le paquet : robe de gala, belles coiffures, maquillage impeccable... Je ne m'en plains pas, mais il m'arrive de repenser à la première tenue que j'ai portée au Merry Bar et à la manière dont les choses se déroulaient, à Londres. Ça me semble dater d'il y a des siècles. Pourtant c'était il n'y a même pas deux ans. Les choses ont tellement changé, depuis.

- Amy, me dit Owen en avançant vers moi, tu es splendide. Cette robe est... wow !

- Merci, réponds-je en riant. J'ai essayé d'être à la hauteur.

- Tu l'es !! Bon et maintenant, reprend-il en agrandissant le regard, tu es prête ? Je sais que ça fait longtemps, mais tu as ça...

... dans le sang. Oui, je sais. C'est ce que dirait Danny s'il était là. Alors, je fais à Owen un petit clin d'oeil avant de hocher la tête.

- Je suis prête, Owen. J'ai toujours été prête.

- À la bonne heure ! Alors vas-y, va t'installer. Je vais me préparer aussi, de mon côté. Oh et Nikki, mets-toi là où elle peut te voir !

Suite à ça, Owen part en trottinant sur la droite, pour rejoindre le micro sur pied qui l'attend. Moi, j'enlace Nikki une dernière fois avant de me diriger plus près de la scène et d'attendre mon tour. Ça ne devrait pas tarder.

Sous les applaudissements du public, Owen fait son entrée en souriant.

- Bonsoir ! Bonsoir à tous !

Les applaudissements se taisent, et Owen se rapproche de son micro.

- Tout d'abord, je tiens à tous vous remercier pour votre présence parmi nous ce soir. Merci de partager notre excitation, et notre joie quant à ce grand projet. Maintenant, et afin de commencer cette soirée dans les meilleures conditions, je vais inviter notre future Cendrillon à venir sur scène. Mesdames et messieurs, je vous demande de l'accueillir comme il se doit : Amy Patterson !

Tandis qu'Owen m'appelle et que j'avance sur la scène, des applaudissements et quelques sifflements se font entendre dans la salle. Les appareils photos et les caméras sont braquées sur moi, alors je leur souris en avançant jusqu'au centre de la scène. Ici, je me tiens debout un instant près du tabouret, derrière le magnifique piano installé pour l'occasion. Je regarde devant moi encore une fois, puis, je finis par m'asseoir et les lumières se braquent sur moi.

C'est parti.

J'ai décidé de chanter en français, ce soir. Pour être honnête, ce n'est pas sans signification. Je n'avais rien chanté en français depuis mon départ de Paris, quand nous avons fui mon père, et que j'ai arrêté l'école de mes rêves. Je ne m'en sentais plus digne, plus digne des magnifiques textes de Piaf ou de Brel. Mais aujourd'hui... Aujourd'hui, je veux croire en moi à nouveau. Et je veux finalement renverser toutes les barrières.

Cette chanson me parle. J'écoutais souvent Piaf avec ma mère, quand j'étais enfant. Et j'ai vite compris le sens de ses paroles. Alors quand Owen m'a dit que je pouvais chanter ce que je voulais, même en français, je n'ai pas hésité longtemps. Les Américains connaissent cette chanson, peu d'entre eux en comprennent le sens. Mais moi, je comprends chaque mot. C'est le plus important.

Je suis bien derrière mon piano, concentrée sur les touches. Mais au bout d'un moment, je décide de relever la tête et de regarder la foule. Je croise le regard de Nikki, qui me sourit, puis vers notre troupe. Et alors, mon regard dévie encore et...

Mon coeur loupe un battement. Durant une seconde, une minuscule mais intense seconde, je ne sais plus ni où je suis, ni ce que je fais. Il est là. Il est là, au milieu de la foule, le visage serein. Il me regarde droit dans les yeux et je ne peux plus détacher mon regard de lui. Impossible. Soudain, la chanson prend tout son sens. Et maintenant c'est comme si je ne chantais plus que pour lui. Je ne prends plus la peine de regarder le reste de la foule, j'ai trouvé exactement tout ce que je pouvais chercher dans ses beaux yeux bleus, fixés sur moi.

Si la plupart des gens ici ne comprennent pas les paroles de l'hymne à l'amour, je sais que Tom, lui, les comprend. Ce qui veut dire qu'à cet instant, il sait exactement ce que je ressens. Il n'a qu'à m'écouter pour le savoir. Les semaines, les mois qui se sont écoulés n'ont pas fait disparaître ce qui était déjà bien installé. Mon amour pour Tom ne disparaitra jamais.

Je ne le lâche plus du regard, plus une seule fois jusqu'à la fin de la chanson. Et quand alors, je me lève pour remercier la foule et les applaudissements, je réalise qu'au bout du compte il n'y a qu'une chose pour laquelle je suis personnellement reconnaissante. Et elle se trouve là, juste devant mes yeux.


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Le chant des TourtereauxOù les histoires vivent. Découvrez maintenant