Je frappe deux coups légers à la porte. Le grognement qui me répond ne me dit rien qui vaille. Je me décide finalement à entrer en m'annonçant à voix haute.
Comme de juste, alors qu'il devrait être douché et habillé à neuf heures passées, il dort encore. Je commence à m'habituer à ses matins difficiles.
La pièce n'est même pas plongée dans la pénombre, il n'a pas pris la peine de tirer les rideaux en se couchant. Il s'étale en travers du lit, qui fait pourtant une belle largeur, un pied dans le vide. Innocence ou provocation, il dort nu par-dessus les draps. J'aurais dû me douter qu'il n'était pas du genre pyjama. Heureusement, il est allongé sur le ventre ce qui m'évite de lâcher mon plateau de saisissement.
Mon cerveau enregistre tout en une fraction de seconde. Le bras négligemment rejeté au-dessus de la tête, les yeux clos et les lèvres entrouvertes. Le dos noueux sous la peau de bébé. Le bronzage doré qui le détache sur le drap blanc. Les jambes puissantes même au repos, je les avais remarquées l'autre soir sur le ring. Les pieds à la fois roses et halés, presque attendrissants. Et puis, même si j'évite de regarder dans cette direction, des fesses si finement dessinées qu'on les croirait tout droit sorties d'un fantasme de statue grecque.
Il y a des gens comme ça, dont chaque attitude est une œuvre d'art
L'œuvre d'art grogne encore et s'enfonce un peu plus sous l'oreiller.
- Artus, debout ! On est attendus à dix heures !
Il grommelle d'une voix ensommeillée.
- On n'y sera pas !
Je cherche un endroit où poser le plateau du petit déjeuner que je lui ai préparé au buffet de l'hôtel : un café long, un jus d'orange, et deux croissants.
- Tu es rentré tard hier soir ?
Il émerge avec difficulté et s'étire paresseusement.
- Je me suis fait des potes. Ils avaient envie de sortir et ils connaissaient une boite sympa...
Je regarde autour de moi.
- Heureuse de constater que tu as encore assez de bon sens pour ne ramener personne !
Il laisse échapper un petit rire entendu.
- Elle avait la permission de deux heures. Elle est partie juste après.
- Elle...
Il fronce les sourcils avec embarras.
- J'ai oublié de lui demander son prénom.
Puis il rigole plus franchement au fur et à mesure que les souvenirs lui reviennent.
- Mais elle m'a demandé de signer le mien sur sa poitrine !
- Tu ne trouves pas que ça fait un peu cliché, Artus ?
- Je suis une rock star en tournée, non ? dit-il sur un ton désinvolte.
Avant de se redresser sur un avant-bras et de m'observer avec attention.
- Ça a l'air de te contrarier ?
- Pas du tout... Ne dis pas n'importe quoi !
La vérité, c'est que je cache mon trouble. Et peut-être une pointe de jalousie. Pour me donner une contenance, je commence à ramasser ses vêtements éparpillés à travers la pièce et même son caleçon, comme si j'étais sa mère.Il me regarde m'agiter avec un sourire amusé.
- Et puis habille-toi, Artus ! Tu ne vas pas rester à poil ! je dis en désignant d'un geste vague son grand corps confortablement affalé, heureusement recouvert par le drap.
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Il faudra beaucoup m'aimer (Terminé)
RomanceAlix a 28 ans, un fiancé adorable, une vie parisienne assez cool, et un métier passionnant dans l'édition. Tout va pour le mieux jusqu'à ce qu'on lui demande de gérer le premier roman d'un jeune prodige de dix-huit ans. Sauf que le petit génie n'a a...