Chapitre 17

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Oremi organise un repas en l’honneur de la célébration de sa septième année de mariage. Un pagne est sorti et tout le monde doit le porter.

Comme c’est demain la cérémonie, je suis allée lui donner un coup de main. Et heureusement. Oremi nous a annoncé qu’en réalité, elle célébrait aussi son mariage civil.

-pourquoi tu ne nous a rien dit ?

-parce que c’est moi qui ais exigé à Paul de ne pas en parler à sa famille. Je ne pouvais pas courir vous le dire à vous. Ça sera un petit mariage, rien de plus simple.

-mais pourquoi ? Tu as toujours voulu un mariage en fanfare.

-la sorcellerie. Ça fait combien de fois qu’on repousse ce mariage ? A chaque fois il y a un problème. Je voulais un grand et beau mariage c’est vrai, mais la sécurité de mes enfants avant tout. J’ai investi avec Paul pour mes enfants, avec mon mari certes, mais malheureusement ce mariage n’a aucune valeur sur le plan juridique. Le mois dernier encore, mon collègue qui a investi sur le terrain de sa fiancée  a tout perdu après la séparation. C’est soit mon rêve, soit ma sécurité et celle de mes enfants.

Elle était vraiment triste en disant tout ceci.

-dans quelques années, on pourra faire une grande et belle cérémonie pour le mariage religieux. Mais là je n’ai pas le choix. Personne ne sait à part vous, Paul et moi. Tous pensent venir à un anniversaire de mariage.

Dans quelques jours on voyage, c’est un budget. L’opération aussi n’est pas donnée. Mais je ne peux pas laisser ma petite sœur se marier dans ces conditions. Non. Depuis petite elle a toujours parlé de son mariage comme celui de l’année.

Je fais sortir mon téléphone et sur un coup de tête, sans donner le temps à la raison de me faire changer d’avis, je lance l’appel.

-cérémonie idyllique bonjour, ici Laurène à l’appareil que puis-je faire pour vous ?

-Laurène bonjour. C’est Kaya NKOMA.

-bonjour Mme NKOMA, comment allez-vous ?

-tout dépendra de ce que vous me donnerez  comme réponse.

-Oula ! Qu’est-ce qui se passe ?

-ma sœur se marie demain et on a besoin d’une décoratrice.

-demain ? elle manque de s’étouffer. Madame NKOMA c’est trop juste.

-Laurène vous êtes la meilleure ou pas ?

-oui… mais… c’est que… on parle de quel genre de décoration ? Intérieure ? Extérieure ?

-pourquoi vous ne venez pas sur place vu le manque de temps ? Je suis prête à payer le prix qu’il faut.

-je suis là dans une dizaine de minutes.

-je viens d’avoir ma tante qui a une grande concession à Malibé, elle peut nous la prêter pour le mariage. nous annonce Elsa la femme de Junior.

Oremi fend en larmes émue. Lorsque j’informe Armand de la situation, il me fait parvenir deux caisses de champagne et un carton de vin rouge. Il en a plein à la maison de toutes les façons.

Jusqu’à 23h Elsa, Otima et moi sommes debout pour le mariage de notre petite sœur qu’on a envoyée dormir pour ne pas ressembler à un zombi demain. Ça ne sera peut-être pas le mariage de ses rêves, mais au moins ça sera joli.

-on va arrêter pour aujourd’hui, décide Otima. Demain je serai ici à 8h avec les hôtesses, Kaya tu récupères le photographe à 7h et vous allez chez Oremi. Elsa si tu peux venir tôt aidé ça ne sera pas de refus.

Chacun connaît ses tâches. Avant de dormir je mets mes effets et un fer à repasser dans un sac. Les vêtements des garçons sont accrochés et leurs chaussures juste en dessous. Demain ça sera speed.

L’alarme m’arrache du sommeil à 5h. Je n’ai pas beaucoup dormi, je dormirai ce soir. Avant de quitter la maison, je laisse tout le monde propre et nourri. Leur père va juste leur enfiler leurs vêtements et les ramener à la réception.

Mon téléphone me notifie un appel entrant. C’est la compagnie de bus qui doit assurer le déplacement des invités du cite initialement prévu pour la cérémonie à Malibé. On règle les derniers détails et se donne rendez-vous à midi. Les retardataires vont se débrouiller car à 13h on est parti. L’invitation disait bien à partir de 10h, 3h c’est largement suffisant.

Le photographe et son équipe sont prêts et n’attendent que moi. Je les prends dans mon véhicule et ensemble on se rend chez Oremi qui se fait encore maquiller. Je laisse la place aux professionnels et vais regarder en cuisine ce qu’il y a à faire.

-Kaya tu ne te changes pas ? Profite de la maquilleuse.

-il y a tellement de choses à faire encore. Je ne sais pas.

-Oremi a dit d’aller t’apprêter.

En effet, les bus démarrent dans une demi-heure. Il me faut une bonne douche car je ne sens pas la rose. La maquilleuse a le temps de me mettre un coup de pinceau. Je ne savais pas que je pouvais m’apprêter en 25mn. Mais ne le dites surtout pas à mon mari.

Les invités montent surpris dans les navettes. On attend le départ de tout le monde avant de nous aussi partir. Oremi a une robe de mariée princesse avec un bustier et raphia et quelques chutes de pagnes. Je l’aide à mettre son diadème, instant immortalisé par le photographe.

-Junior est là.

On était bien obligé de l’informer. C’est lui qui accompagnera la mariée devant le Maire. Oremi va avec lui et moi avec le peu de personnes qui n’était pas encore parti.

Sur place, l’endroit est méconnaissable. Otima et Laurène ont vraiment fait du beau boulot. Moi-même j’avais envie de me remarier sur place. Surtout les compositions florales, Laurène mérite une grosse pub et surtout un gros pourboire. Les invités ne semblent se douter de rien, je m’assoie près de ma petite famille et attends. Otima est juste devant moi, je me penche pour lui parler à l’oreille.

-les parents du marié sont informés ?

-le père et sa tante qui l’a éduqué uniquement, elle me chuchote. Apparemment ils l’ont bien pris. On attend la réaction de la mère et sa famille.

On n’a pas le temps d’approfondir le sujet que le maire fait son entré accompagné des cris de surprise de la foule. Je sens que ça sera méchant ici. Je me repositionne. La marié fait son entré au bras de sa tante paternelle, cette dame qui l’a élevé de sa quatrième année sur terre à ce jour comme son propre fils. Je regarde la mère biologique qui est perdu entre incompréhension, indignation et colère. Otima me fait signe d’approcher.

-la même famille que Grégoire. Tu fais l’enfant, quelqu’un d’autre s’en occupe mais tu veux les honneurs.

Je rigole en me repositionnant. En tout cas la foule est divisée et certaines personnes quittent le lieu. D’autres envoient des textos dont on peut facilement deviner le contenu. Moi tout ça ne m’intéresse pas. J’attends ma sœur et enfin elle arrive. L’émotion est à son comble.

On démarre la cérémonie. Tout se passe plus ou moins bien jusqu’à ce que le maire prononce les mots « bien commun ». La génitrice se lève et pète un câble. Quand je pense que certaines personnes pleurent les enfants, mais c’est aux gens comme ça qu’on donne. Le père se lève et la traîne dehors. Il n’y a pas d’interruption à faire, on poursuit.

-par les pouvoirs qui me sont conférés, je vous déclare maintenant mari et femme. Vous pouvez si vous le voulez, vous embrasser.

Ceux qui aiment sincèrement les mariés se lèvent et célèbrent avec eux. Les autres on s’en fiche. Oremi est ma sœur, ma personne sûre, pourtant c’est la veille que j’ai sû pour son mariage. Quand les raisons sont fondées, vais-je gâcher le plus beau jour de sa vie par orgueil ? Oui ce n’est que de l’orgueil. J’aime ma sœur et même si j’avais appris son mariage le jour J comme les autres, je serai restée pour elle quitte à lui faire la réflexion plus tard car son bonheur est plus important. C’est ça l’amour.

Ceux qui le veulent se dirigent vers le cocktail ou prennent des photos. Ma sœur est mariée, c’est le plus important.

-la parente de Grégoire est revenue, se moque Otima.

-pourquoi revenir si c’est pour tirer la tronche ? s’indigne Elsa.

-qui s’occupe d’elle ? Aller déposer l’enfant chez son père parce qu’il ne veut pas t’épouser et que tu dois faire ta vie à quatre ans. C’est seulement quand l’enfant est allé faire ses études universitaires à l’étranger qu’elle réapparaît avec les grandes phrases « après tout je reste sa mère ».

-vraiment la parente de Grégoire comme tu le dis. Attends, en six ans il n’a jamais cherché le petit ? Kaya c’est vrai ça.

-ni pour son anniversaire, ni pour Noël. Même un SMS. Rien de rien. Et honnêtement on ne s’en porte que mieux. Mon fils est épanoui, il a un père au sens complet du terme. Personne ne le cherche. Si les gens ne le mentionnent pas, je te promets que jamais je ne pense à lui.

On fait la fête jusqu’à 2h. C’est à cause des enfants sinon même 10h nous trouvait là. Je ne sais même pas c’est quand la dernière fois que nous sommes allés en boîte de nuit mon mari et moi.

-les filles merci. Merci vraiment pour tout.

-donc tu allais avoir un mariage bizarre et on allait regarder ? Moi Otima ? Pardon va consommer ta nuit de noce, moi je ne bouge pas si le vin n’est pas fini.

Son mari est là, c’est leur problème. Les NKOMA sont partis. Armand m’aide à mettre les bambins au lit avant de me faire dormir… si vous voyez ce que je veux dire.
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La date du voyage approche et le stresse avec. Je regarde encore sur le net les informations relatives à l’opération. Je veux absolument tout savoir sur les potentiels risques. Est-ce qu’il y a de nouvelles options ? Procédures ? Techniques ? Médicaments ? La science évolue chaque jour, il faut se tenir informée.

-tu as vérifié les vaccins bébé ?

-oui. Tout est à jour.

-qu’est-ce qu’il y a ? Je te sens tendue.

-c’est rien t’inquiète. Je vais acheter des pantalons aux garçons.

Je ferme l’ordinateur, prends mon portefeuille et clé de voiture et sors. Comme le shopping est au programme comme à chaque voyage, je leur prends surtout des pantalons. Le reste on verra sur place.

Le shopping m’aide à oublier, m’évader. Je pense à autre chose en errant dans les rayons. Puis je vais m’assoir en terrasse manger un bout. La vérité est que plus la date approche, plus j’ai peur.
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-on y va ! Tonton Ben est là.

Ils sont tous excités à l’idée de voyager. La dernière fois qu’on l’a fait c’était il y a deux ans pour le mariage d’un cousin NKOMA à Kigali.

Benjamin aide son frère avec les valises, moi je vérifie que leurs sacs soient bien à leurs dos. Mon sac à main et celui de mon ordinateur, le sac à dos d’Armand, je ramasse tout et les suis. Je ne parle pas beaucoup, j’angoisse.

Armand et Ben se rapprochent d’hôtesses qui proposent des services première classe même à nous qui sommes en éco. Elles font enregistrer nos bagages en priorité, nous conduisent à un lounge et quand vint l’heure d’embarquer, elles nous font passer en priorité.

Je laisse Amaël à l’hublot, mon mal des transports ne me permet pas de prendre cette place, son acolyte est entre nous, Lilian et son père sont devant nous.

-bébé ?

J’ouvre les yeux et Armand s’est retourné pour me parler.

-arrête de stresser. Tu dois être positive, les enfants te regardent.

Lilian oui. Les deux autres ont déjà commencé à se battre comme d’habitude. Exceptionnellement en avion, les deux petits ont droit aux écrans. Je leur mets leurs casques aux oreilles histoire d’avoir un peu de paix.

Et c’est parti ! Paris, Toronto et Sydney (Canada). On passe la nuit à Paris, c’est l’escale le plus long.

Qu'est-ce que l'amour Où les histoires vivent. Découvrez maintenant