50+ Les paroles d'une mère

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Minho

L'énergie commence à me manquer après cette nuit blanche à discuter des histoires de coeur de Ryujin. Dès que ma meilleure amie perd confiance en elle, les dossiers ont tendance à ressortir et mes anciennes bêtises me reviennent en pleine face. Je suis conscient depuis un moment que je n'aurais jamais dû essayer de draguer chaque plan cul qu'elle ramenait, sachant que ça n'aboutissait jamais. Mais je trouvais ça drôle. Résultat, elle a eu peur que j'en fasse de même avec Yeji et a attendu d'être au fond du trou, métaphore pour évoquer cette ville, pour m'en parler. Je n'imaginais pas qu'elle lui avait fait une déclaration digne des plus grands dramas et que son interlocutrice était restée bouche bée. La soirée a donc été consacrée à l'évaluation de la sincérité de Yeji dans son aveu soudain de répondre aux sentiments. Ryujin a passé son temps à y croire puis à les réfuter. Mes paupières en tombent de fatigue alors que je porte ce sac que j'aurais dû faire plus léger, car au petit matin, la jolie prétendante s'est présentée à nouveau devant notre porte et a indiqué que la seule personne qui devait partager sa chambre était elle.

J'ai donc encore une fois été prié de m'en aller et de retourner chez les Park. Je n'ai aucune idée de l'ambiance dans laquelle je suis attendu. Le quiproquo d'hier était surprenant et imprévu. J'ai hésité à rattraper Leah, mais je savais qu'il lui fallait juste redescendre en pression alors que Ryujin vivait une tornade dans ses émotions. J'accepterai le verdict qui me sera donné pour l'avoir fait passer en second, alors que le bon sens est de mon côté. J'espère juste ne pas devoir dormir à même le sol, après cette nuit peu confortable dans le goshiwon.
Je dévie du trajet pour m'arrêter chez un fleuriste pour acquérir des pivoines dont la signification est la guérison. Nous avons gagné une semaine de plus et devons la célébrer à notre manière sans en énerver le Destin. Lorsque je sonne à la porte, je m'impatiente de retrouver les femmes qui comblent mon existence et offre le plus beau des sourires à ma mère qui m'accueille. Je la vois troublée devant les fleurs, comme si elles la touchaient plus que d'habitude et suis invité à rejoindre le trio hétéroclite déjà à table.

— Monsieur et Madame Park, mon coeur, dis-je en les saluant respectueusement.

Là où je m'attends à des rires étouffés ou des rougeurs, je ne trouve que regards vitreux et une peine incommensurable. Je cherche une explication chez ma bien-aimée puis me retourne vers ma mère qui cache très mal son désespoir. L'inquiétude me saisit aussitôt. Il se passe quelque chose d'anormal.

— Qu'est-ce qu'il y a ? Tout va bien, maman ?

De la tête, elle me confirme que cela ne la touche pas elle mais une autre. En suivant son regard, j'observe attentivement Madame Park et sens des frissons me parcourir le corps. J'ai déjà vu cet air abattu il y a plusieurs années qui me donne l'impression de replonger dans l'horreur. Je ne pourrais jamais oublier le visage fatigué qu'affichait ma mère après sa chimiothérapie, et les signes d'une situation parallèle me frappent aussitôt. La chute des cheveux qui commence à s'apercevoir, les plats odorants qu'elle a repoussés jusque là, les passages à la salle de bain après les repas, la coloration de ses ongles. Le retour en Enfer devient si étouffant que j'en oublie comment déglutir. Désemparé pour cette femme, je me penche afin de lui faire comprendre à quel point je suis décontenancé par ce qui se passe et lui offre tout mon soutien. Son attitude est fuyante, comme si elle ne souhaitait pas dévoiler ses émotions et je suis prié de me relever par le chef de maison.

— Il est temps de passer à table, tu as failli être en retard, Minho, m'annonce-t-il comme la chose la plus naturelle dans un désastre total.

Ce reproche dépasse le cadre du déjeuner et désigne le cataclysme qui a eu lieu ici en mon absence. Le remords ne m'épargne pas alors que j'ignorais que ma petite amie pouvait vivre un calvaire plus important que les doutes de ma meilleure amie. Mon choix me revient en pleine face, pourtant celui-ci me paraissait si sensé, raisonné. Je n'hésite pas à me poser au plus près de Leah, la cherchant du regard alors que je ne l'ai pas suivie hier soir. Cela fait-il de moi un honteux petit ami ? Ne suis-je effectivement pas à sa hauteur pour qu'elle me pense capable de la tromper puis de ne pas la retenir. Je bazarderais actuellement ma vie pour elle et bien plus à cause des regrets.
J'avance ma main pour tenir la sienne pendant le service du plat, mais ne rencontre qu'un état manquant de vitalité. J'ai vécu son désarroi, mais je n'étais alors qu'un enfant, inconscient de tout ce que cela engendrait. Je n'ose pas participer à la conversation futile qu'anime ma mère, me faisant réaliser qu'elle savait ce qui se passait dans cette maison. Est-ce la raison pour laquelle elle a insisté pour que je prenne soin de cette jeune femme ? Je me fustige intérieurement en repensant à toutes les crasses que je lui faisais alors qu'un drame se vivait ici. Plus les minutes défilent et plus l'envie de prendre cette porte à cause de la honte est conséquente.

Le Coloc Idéal : dans tes rêves, Lee Minho !Où les histoires vivent. Découvrez maintenant