Chapitre I (7) : Dancing Laundry

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J'avais raison. Dès la fête terminée, le quotidien à Babel a repris, gris et fade. Enfin, aussi fade que ça peut l'être quand on est entouré.e de gens aussi hauts en couleur. Et encore, même eux commencent à se ternir. Le train-train quotidien pèse lourd sur le mental de beaucoup, et ça se ressent. On voit beaucoup plus rarement Judicaël, Lan Yue s'est mis à taquiner Benedikt de manière un poil trop agressive et ce dernier y répond tout aussi agressivement, la patience de Theodosia atteint lentement ses limites. Les sautes d'humeur de Michiru s'intensifient, elle passe la plupart de son temps à binge eat. Shun... Il est encore plus détestable. Hibiki aussi. Les seuls égaux à eux-mêmes, c'est Noelle, Eiji et Altaïr. Sans surprise.

J'ai vérifié la date attentivement aujourd'hui, pour une fois. On est le 7 mai. Seulement un peu plus d'un mois qu'on est là, et j'ai déjà l'impression que ça fait un an. Ma famille me manque tellement que j'évite Mao et Ema comme la peste. Les voir ensemble comme ça, ces deux alliés inséparables, ça me fait encore plus réaliser à quel point je suis seul.e ici.

J'aimerais bien que Blue soit là. C'était difficile de s'ennuyer, avec elle. Et puis c'était une des rares qui osait défier ouvertement maman. C'est elle qui m'a coupé les cheveux et qui s'est proposée pour m'aider à faire mon coming-out aux petits.

Sauf qu'elle est partie à Hope's peak. Et depuis, plus de nouvelles.

Elles se sont toutes passées le mot pour m'abandonner, visiblement. Enfin bon.

Je vais me faire un café, peut-être que ça m'évitera de penser à ces conneries.

Ah. Bon bah Sora m'a devancé.e, et iel a pas l'air très frais. Encore un effet de cet endroit : ses cernes, d'ordinaire quasiment invisibles, se creusent petit à petit, au point que même le maquillage ne peut plus les recouvrir.

Je crois que c'est le pire truc. Sora, épuisé, qui me sourit quand même en me demandant si je veux un café. Ça m'énerve. Ça me fait mal au cœur. Je déteste cette expression.

Mais comme je ne veux pas la rendre pire qu'elle ne l'est déjà, j'accepte le café, et le boit sans un mot, en étudiant le monde extérieur par la fenêtre. Les températures se réchauffent à peine, et la neige commence à fondre. J'espère que le soleil reviendra un peu plus souvent au moins. Je suis un.e texan.e de naissance portoricaine, si j'ai pas ma dose annuelle de vitamine D je vais câbler. Pas que je sorte énormément, mais j'apprécie que la météo soit agréable quand je daigne imposer ma présence à l'extérieur.

... Oh bon sang, je détourne les yeux deux minutes et voilà Sora prêt.e à sortir du chalet avec une panière à linge remplie à ras-bord sous le bras. Hors de question que je lae laisse s'en tirer comme ça.

- Hopopop, tu fais quoi, là ?

Sora sursaute, et tourne lentement la tête vers moi, avec un sourire nerveux.

- B-Bah... Je vais faire une lessive ?

- Dans ton état ? Tu te fous de moi ? Je vais y aller, c'est bon. Donne-moi ce panier.

Iel hésite quelques secondes. Puis mon regard semble lae convaincre, et iel me tend le linge avec un petit air contrit.

- Ok. Maintenant, tu vas te recoucher.

- M-Mais-

- Ou te mettre au lit avec un bouquin, j'en sais rien, mais tu vas te poser le cul deux foutues secondes. C'est trop demander ?

Un bâillement échappe à Sora, et iel hoche finalement la tête avec le visage d'un.e gosse qui a fait une connerie, avant de s'éclipser dans sa chambre. J'espère bien qu'iel va essayer de faire une sieste.

Danganronpa : Babel's CurseOù les histoires vivent. Découvrez maintenant