Chapitre II (20) : Familiar faces watch you, but with a perfect stranger's eyes

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Les minutes défilent, et les larmes d'Ema finissent par se tarir. Lentement, je la vois se redresser, échanger quelques mots avec Hibari, puis retourner à sa place sans accorder le moindre regard à son frère.

J'ai l'impression que ses sanglots se répercutent encore sur les murs de la salle. Comment font les autres pour rester aussi calmes ? Comment il a fait, Hibari, pour venir à Ema sans avoir peur ?

Qu'est-ce qu'il a vu en elle ?

Je n'aurais sûrement jamais la réponse, et de toute façon le silence est total, jusqu'à ce que Judicaël ouvre la bouche.

– Ça va, Ema ? Tu te sens assez calme pour continuer ?

Il n'obtient d'elle qu'un hochement de tête, et soupire.

– T'avais l'air nerveuse bien avant le procès, il fallait bien que ça pète… Désolé, on a dû te mettre une pression monstre.

– … Je me demande pourquoi.

Tiens, je me disais aussi que Noelle était bien silencieuse aujourd'hui. Pas que ça m'aurait dérangé qu'elle le reste encore un peu. Son ton plat ne contient pas la moindre trace d'ironie.

– Pourquoi on lui a mis la pression ? tente Judicaël, l'air confus.

– Non. Pourquoi elle est nerveuse.

Alors. Ça me semble quand même plutôt évident. De un, Lan Yue est mort.e. De deux, on joue nos vies dans ce procès. De trois, Altaïr est pas exactement doué pour mettre les gens à l'aise. Et de quatre, y a clairement des trucs pas résolus dans sa vie qui ont participé au tout. J'imagine que c'est ce qu'elle va dire, de manière beaucoup plus tarabiscotée.

– Il y a plusieurs raisons possibles, et elles ont sûrement toutes leur part de responsabilité. D'abord, des probables traumatismes qui rendent les situations de stress et les attaques personnelles impossibles à supporter de manière rationnelle.

Bah vas-y, dis tout de suite qu'elle ne peut réagir que de manière violente à ce genre de situation. Et même si c'était le cas, pourquoi ça rendrait sa nervosité suspecte ? Je vois pas où elle veut en venir.

– Ensuite, notre situation particulière. La tuerie. Le procès. La mort de Lan Yue. La pression due à l'incertitude, au fait d'être soupçonnée et de devoir soupçonner.

Jure. Tu es la seule que ça rend pas nerveuse, en même temps. Ou bien tu es juste la meilleure pour le cacher.

– Et enfin, le fait de cacher quelque chose.

… Quoi ?

– Ema a refusé de nous dire pourquoi elle avait surveillé d'aussi près les agissements de Sora. Je ne la crois pas nécessairement coupable, mais le fait est que tout dans son attitude indique qu'elle ment pour protéger Sora.

… Non mais je rêve. Bordel de merde, Noelle. Dis-moi que tu es pas en train de dire ce que je crois.

– Tension dans les muscles, auto-censure, pieds mal ancrés indiquant un désir de fuite, regard instable et tics nerveux. Ces signes-là ne trompent pas. Elle sait quelque chose qu'elle refuse de nous dire. En cela, elle est suspecte.

J'ai toujours pensé que Noelle avait un certain don pour toucher juste.

Eh bah on dirait bien que je me suis jamais autant planté.e.

– C'est certainement un mélange de chacun de ces faits qui-

– Mais ferme ta gueule, Vincent !

C'est sorti tout seul. Les regards sont sur moi maintenant.

– T'as pas la moindre foutue idée de ce que tu racontes. Tu sais pourquoi Ema est pas bien ? Parce que Calliope lui a foutu directement ses suspicions dans la gueule dès qu'elle a ouvert la bouche pour exposer des arguments qui sont, je le rappelle hein, pertinents. Mais noooon, c'est le pourquoi qui vous importe. Et en plus t'exposes des trucs hyper intimes sur la psyché d'une gamine devant plusieurs personnes. Tout ça parce que t'es pas foutue de regarder plus loin que les accusations posées sur Sora. Vu la faiblesse de ton alibi, c'est putain de gonflé !!

Danganronpa : Babel's CurseOù les histoires vivent. Découvrez maintenant