Chapitre 2

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Je prends une grande inspiration avant de pénétrer dans leur vaste maison. Il y a déjà tout le monde, et tous nous observent quand on rentre. Je n'aime pas ces regards. Trop de pitié se dégage de ces gens. Ce sont les pires regards que l'on puisse recevoir. Nous nous installons tous dans le salon prêts à commencer cette petite réunion à la mémoire de mon amie. Il y a trop de monde. On dirait une fête. Pas une réception funéraire. Parmi tous ces gens, qui regrette vraiment qu'elle soit morte ? Pas la moitié. Il y a quelques personnes du lycée que je peux reconnaître. Ils m'envoient des regards désolé. Je sais reconnaître ceux qui sont sincères et ceux qui ne le sont pas.

Après quelques discours plus ou moins larmoyants on est invités à aller se servir un verre pour boire à son honneur et fêter son repos. Quel ridicule... Pleins de personnes viennent me voir, me couvrant de condoléances, demandant si je tiens le coup. Venant de ces personnes, rien n'est sincère. Ils n'en ont rien à faire. Je réponds brièvement à leurs questions et fait mine que s'ils continuent de me parler, je vais craquer et pleurer, alors ils se calment sur les questions puis s'en vont. C'est marrant comme ils essayent de venir me réconforter puis dès qu'on rentre dans le sujet des vraies émotions, celles que quelqu'un qui vient de perdre un proche peut ressentir tous fuient.

— Alice ? m'interpelle une voix derrière moi.

Il ne manquait plus que ça. Je n'avais pas prévu cette situation. Je lève la tête vers le garçon qui m'a interpellée. Je sais qu'il n'est pas venu pour elle, il est venu pour moi. Il n'en a rien à faire de sa mort. Ce garçon, Thomas, c'est elle qui me l'avait fait rencontrer. Mais honnêtement je pense qu'il s'est servi de ma meilleure amie pour se rapprocher de moi. Tout était allé étonnement vite entre nous. Peu importe, il est mon futur ex. Je ne lui ai pas parlé ni vu depuis le jour où mon coeur a été émietté.

— Tu tiens le coup pour Pélagie ? On ne s'est pas vu depuis le jour où tu as appris pour son suicide. Et tu ne répondais pas sur ton portable.

Je grince des dents, il faut qu'il parte. Je veux plus le voir. La pitié dans ses yeux me dégoûte encore plus que celle des autres.

— Écoute, je suis désolée. Enfin non je ne le suis même pas. Avant que tu le suggères, il ne me faut pas de temps pour réfléchir, il ne faut pas que je prenne du recul, ce n'est pas un coup de tête. C'est terminé entre nous. Point final. Je ne veux rien entendre.

Il écarquille ses yeux et ouvre la bouche comme un poisson. Thomas essaye de poser sa main sur mon bras mais je bouge avant qu'il puisse le faire.

— Alice, je pense que tout ce qu'il s'est passé t'as...

— Non. C'est fini. Stop. Je ne veux plus qu'on se voie. Ce n'est pas à cause de ce qu'il s'est passé ça vient entièrement de moi. Je me suis rendue compte qu'on ne collait pas.

Il reste bouche bée devant ma déclaration. Puis il fronce les sourcils et écrase son verre en plastique entre les mains. Il part me disant que si c'est ce que je veux alors il respectera ma volonté. Un poids s'enlève de mes épaules. Pas quelque chose d'énorme, un gravier au milieu de roches mais c'est déjà ça. Ce n'est pas tout à fait un coup de tête, c'est juste que les derniers événements ont un peu influencé ma décision. De toute façon, ce n'était pas le grand amour. C'était une amourette sans importance. On était juste de bons amis qui ont fait l'erreur de se mettre en couple.

Je regarde autour de moi. J'ai besoin d'un bol d'air frais. Enfin d'air extérieur sans dix mille personnes dans la maison. Je m'éclipse et part dans leur petit jardin. Une petite table, quatre chaises, un coin d'herbe et des fleurs. Les souvenirs me percutent de plein fouet. Il s'en est passé des choses dans ce jardin. J'ai besoin de boire un verre d'eau mais hors de question de retourner à l'intérieur. Ici il n'y a personne et c'est très bien.

Pour PélagieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant