Chapitre 15 : l'histoire d'une multitude de vies

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Noël

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Noël. Bordel de Noël. Je suis sûr qu'ils avaient déjà commencé à décorer le village avant qu'Halloween ne déclare la tournée aux bonbons ouverte.

Le sapin est si immense que je me pose sérieusement la question de son origine. Peut-être qu'on l'avait cultivé pendant des générations entières avant d'enfin décider à le sacrifier pour une fête qui ne dure même pas deux jours.

Quel gâchis.

Je rumine alors qu'Heden me tire par le bras vers un restaurant qui laisse échapper des effluves si gustatives que j'en ai l'eau à la bouche. À mon plus grand regret. La dernière chose que j'ai envie de faire, c'est de manger au milieu de toutes les connaissances de la rouquine. Le pire, c'est que maintenant, j'ai peur de savoir ce qui m'attend, car l'ambivalence entre Prescott, cette boule de joie aromatisée à la cannelle et l'armoire à glace qu'est Carsen est juste trop instable.

Je vais me prendre une taulée avant que je ne puisse prendre ma première bouchée.

— J'espère vraiment que mon père ne soit pas là !

Le râle d'Heden me force à sortir de ma contemplation festive et mes sourcils se froncent ironiquement.

— Ton père ? Oh oui, mon Dieu, qu'est-ce que lui pourrait bien penser de toi ! Te voilà à courir dans la neige entrain de tirer un "touriste" par la main comme si tu te préparais pour un tournoi de patinage...

Elle s'arrête, me lâche et me fait volte face. Elle a presque l'air d'une banshee. Avec ses mains profondément enfoncées dans ses hanches qui se dessinent sous sa poigne, ses yeux verts lançant des éclairs et ses lèvres pincées, elle fait naître un frisson d'horreur qui me parsème la peau, comme une seconde fièvre. Génial. Comme si la première n'était pas assez.

— Écoute-moi bien, le sans papiers du ciel...

— "Le sans papiers du ciel" ?

— ... J'en ai ras le cul de tes remarques à la con. Alors soit tu viens avec moi et tu fermes ton claque-merde aussi férocement que possible, soit je te laisse crever sur ce trottoir. À toi de choisir.

J'ai envie de la claquer. J'ai envie de teinter sa peau si pâle d'une teinte rubis qui dépasse le rougissement. J'ai envie d'attraper ses poignets et de les briser jusqu'à ce que j'entende ses os craquer. Car cette mélopée douloureuse, c'est le seul son que j'ai envie encore envie d'entendre de sa part.

Crie mon nom, furie.

Je me contente simplement de grincer des dents et d'enfoncer mes mains dans les poches de ma doudoune. La douleur m'envahit, je sais que je ne pourrai pas rester debout plus longtemps. Mes blessures tirent sur une peau trop fragile et tout ce que je peux faire, c'est passer ma langue sur les coupures qui recouvrent encore mes lèvres. Mon bonnet recouvre les plaies de mon front et encore heureux, car sinon mon mensonge ne passerait devant aucun de ces armoires à glace de bûcherons.

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