Chapitre 38 : la vérité et rien que le mensonge

545 93 49
                                    

Il fait déjà nuit noire quand j'arrête la voiture devant la maison de Carsen et Prescott

Oups ! Cette image n'est pas conforme à nos directives de contenu. Afin de continuer la publication, veuillez la retirer ou mettre en ligne une autre image.

Il fait déjà nuit noire quand j'arrête la voiture devant la maison de Carsen et Prescott. Si celle-ci a passé toute la soirée de Thanksgiving clouée à sa chaise pour engloutir plus de nourriture qu'un être humain puisse possiblement avaler, à présent, elle geint comme une biche heurtée de plein fouet. Allongée sur les cuisses de son mari qui lui dégageait ses cheveux de son visage, elle implorait sa délivrance.

— Je vais exploser !

— Tu n'aurais pas dû manger autant, Prescott.

— Et tout laisser ? Hors de question !

— Dommage. Comme ça, d'autres auraient pu manger.

Grogne Carsen en ouvrant la portière sur la nuit froide. Prescott émet un tel cri que même les loups qui errent dans les coins filent se cacher dans leurs tanières, dans les tréfonds des bois de pins. Je souris en claquant la porte derrière eux et accompagne Carsen en venant enrouler le bras de sa femme enceinte autour de mon cou.

L'endroit est bien moins isolé que le chalet d'Heden, mais détient tout de même quelque chose d'unique et de réservé. Un instant privé qui n'appartient qu'au couple et ça se voit déjà que le bonheur en est diffusé. En bordure de la forêt et du village, un peu en hauteur, il donne sur toutes les habitations boisées du comté qui s'illuminent, malgré l'heure tardive, sous les cieux célestes.

Même si je suis ici depuis un bout de temps maintenant, je ne peux m'empêcher de sourire face à cette vue, sortie tout droit d'un roman de Dr. Seuss. Rien à voir avec Manchester, ses ports humides et ses industries qui ne laissent pas toujours voir un ciel bleu.

C'est un havre de paix pour toute personne courageuse, assez de venir la traquer dans les bois enneigés.

Je finis par détourner le regard vers un immense sapin aux basses branches, près de la grange à bois et mon sourire se décuple. Il accueille une balançoire neuve, forgée par les mains devenues expertes de l'ancien militaire. Ils sont peut-être plus prêts d'accueillir leur bébé que n'importe quel parent au monde.

C'est touchant, au plus fond d'un cœur noir.

Je prends une grande inspiration et me glisse à l'intérieur pour continuer à aider Carsen avec sa femme. Prescott se détache néanmoins de nous pour aller s'enfoncer dans un couloir décoré d'un millier de photographies encadrées et d'après le bruit sourd qui s'échappe de l'une des chambres, je devine qu'elle s'est laissé écraser sur le lit.

— Voilà une bonne chose de faite.

Rumine la voix sourde de son compagnon qui a, lui aussi, disparu, mais dans la cuisine semi-fermée, me laissant seul au milieu d'un salon qui comporte bien moins de coussins et de plaids que celui d'Heden. Pourtant, l'aura y est plus chaude. Si chez elle, très peu de biens personnels y résident, ici, tout est une question de souvenirs. Et il n'y a là rien de mélancolique. C'est un petit trophée par-ci, une petite carte de visite par là. L'endroit respire et semble vivre en harmonie avec le couple dont le bonheur précède la réputation.

Winter ✅Où les histoires vivent. Découvrez maintenant