Un flocon de neige par-ci, une hache par là et on obtient la recette parfaite d'une vie sans pépins à New Garden. Car oui, ce petit village perdu au fin fond du Maine a tout d'un véritable havre de paix.
C'est du moins ce que pensait Heden Keye. Si...
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C'est ça, bande de voraces... Prenez tout.
Trempé par une pluie qui gronde depuis des nuages chargés au-dessus de ma tête, je me laisse plonger dans un gouffre, sans forcément tomber.
Figé sur place par un système mécanique inconnu, les mains dans les poches, je regarde des hommes costumés aborder des sourires immaculés aux futurs squatteurs de ma maison.
Pardon.
La dernière habitation d'une génération vouée à l'échec.
Mon cœur tressaute dans ma poitrine, saille sous ma peau déjà à découvert sous le déluge qui se déverse sur moi et pourtant, je n'arrive toujours pas à bouger.
Comme le jour où j'ai découvert les catacombes du crash spatial...
Les traces mortuaires des corps inexistants de Jon et Lev squattent peut-être plus mon crâne que cette vision d'abandon, mais quand bien même, je ne déloge pas.
Mon t-shirt noircit sous l'eau et se presse contre ma peau comme une énième cage qui m'empêche de respirer.
Je suis fait de chair et d'os.
Je suis fait de sang et de larmes.
Je suis l'échec et la survie.
Je ne suis certainement pas fait pour ces conneries.
La constellation d'Orion semble si loin, putain...
Derrière moi, la maison de madame Richards semble scellée, tandis que celle qui avait jadis été le berceau de mon enfance et de mes rêves déchus disparaît à mes yeux comme un grain de sable dans le vent.
Alors, je marche.
Reniflement après reniflement, j'essaye de ne pas me laisser empoisonner par la douleur liquide qui coule à flots dans mes veines.
On dit qu'on peut mourir d'un cœur brisé.
Moi, je meurs parce que les fragments qui le constituent essayent toujours de se souder dans un espoir vain.
Pourquoi est-ce que j'y crois, toujours ?
Pourquoi est-ce que j'ai pensé que revenir ici allait me faire du bien ?
Et puis quoi, maintenant ?
Rejoindre le petit appartement miteux qui ne m'attends pas plus que ça, à Oxford ?
Les doigts cramponnés à la lanière de mon sac, je dérive dans les entrailles brumeuses de cette rue de Manchester, essayant tant bien que mal de trouver mon refuge sous les feuillages mourants des sycomores qui longent la route.
Elle est loin, la période où je pouvais trouver ma haine et pourtant mon réconfort dans les bras d'une pixie aux cheveux de feu et au sourire ambivalent...