Un flocon de neige par-ci, une hache par là et on obtient la recette parfaite d'une vie sans pépins à New Garden. Car oui, ce petit village perdu au fin fond du Maine a tout d'un véritable havre de paix.
C'est du moins ce que pensait Heden Keye. Si...
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J'ai couru. Parce que je ne savais pas quoi faire d'autre. Je n'ai même pas cherché à manger avant, ou même prendre un taxi.
Non.
À la place, j'ai pris mes jambes à mon cou, sans une veste, à travers des rues que je ne connaissais pas, demandant aux passants par où je pouvais bien passer.
Et j'ai crié.
Les maisons se succédaient, identiques, à quelques jardins près, et je m'étais quand même arrêté pour savoir si je devais sonner à leurs portes...
Mais à la place, j'ai préféré crier.
Du haut de mes poumons, j'ai scandé le nom de l'homme qui m'est littéralement tombé dessus. Tout ça pour le voir se retourner en bout de rue, comme s'il était prêt à partir, ses mèches blondes noircies par la pluie, bouclant à peine leur passage au-dessus de ses yeux grandement écarquillés.
Il se fige sur place...
Mais pas pour longtemps.
Alors que mon souffle meurt entre mes lèvres tremblantes, il lâche son sac et court dans ma direction, que pour cueillir mon visage en plantant ses doigts dans mes joues.
Si ses yeux ne me lançaient pas des éclairs, je saurais que son geste est doux. Que la pulpe de ses pouces efface tendrement la pluie de mon visage dans la vaine tentative que je puisse le voir.
— Bordel, Heden, qu'est-ce que tu branles ici ?!
Je repousse doucement ses mains et essaye de sourire dans sa direction.
— Je n'en sais rien. Te rendre la pareille de ce que tu m'as fait ? Je ne suis peut-être pas en parachute et nous ne sommes pas dans un lac, mais...
J'écarte en grand mes bras, toujours à bout de souffle, mais il ne déride pas. À la place, il continue de me toiser, comme s'il cherchait ses mots.
Et je ne suis même plus sûre de savoir ce qu'il pense exactement.
Enfin du moins, jusqu'à ce qu'il entre ouvre les lèvres et ne murmure :
— On... On devrait se mettre à l'abri.
Quoi ? C'est tout ?
***
L'orage se décuple dehors, alors que le vent s'écrase contre les murs en brique d'un café. Et si je souffle sur la fumée de ma tasse bien figée entre mes doigts tremblants, Caleb, en revanche, est bien plus stable.
Il n'a toujours pas cligné des yeux.
Les gouttes d'eau tombent de son front et perlent le long de ses joues, mais il n'est pas différent de ce que j'ai repêché, cette fameuse nuit, dans mon lac.
Il est même aussi silencieux que la première fois que j'ai commencé à agrafer ses blessures qui dégoulinaient sur mes meubles.