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Ça y est, ils étaient partis. Et leur départ s'était abattu comme une masse, laissant un vide et une solitude immense derrière eux, et dans le cœur de la jeune femme.

Elle s'était résignée à les laisser partir, regardant leurs chevaux s'éloigner, se transformant en points noirs à peine distinguables au loin jusqu'à disparaître totalement dans le vaste espace vert qu'était le territoire ennemi, dépourvu de barrières et de protections, les laissant à leur sort.

Sa sœur, actuellement la seule personne lui restant à l'intérieur de ces murs, posa une main délicate sur son épaule, lui montrant silencieusement son soutien.

Elle regarda son épaule, celle où cette main rassurante était encore posée, puis ses yeux divaguèrent, longeant son bras recouvert de bandages pour s'arrêter sur sa main, décorée d'un bijoux sur l'annulaire.

Oui, une alliance au métal doré, forgée de façon à former une torsade lui avait été enfilée la veille, par l'homme qu'elle aimait.

Si d'abord sa demande lui avait enlevé les mots de la bouche, elle avait ensuite accepté dans un élan de joie une fois ses esprits retrouvés. Prise d'une soudaine poussée d'énergie, elle avait même poussé sur les deux accoudoirs de son fauteuil pour se mettre sur ses jambes et l'enlacer.

Pris de court par sa réaction, le major perdit l'équilibre et les deux amants avaient fini allongés dans l'herbe. Mais Élise avait dans un dernier réflexe passé ses mains dans ses cheveux blonds et protégé l'arrière de son crâne dans la chute.

Lorsqu'ils s'étaient rendus compte de la position dans laquelle ils se trouvaient, leur regard s'étaient croisés, d'abord inexpressifs avant d'éclater tout deux d'un rire franc, hilares devant cette situation.

L'espace d'un instant, leurs problèmes s'étaient envolés et leur rire résonnaient au sommet de cette colline déserte. L'espace d'un instant, elle était la femme la plus heureuse au monde.

Puis lorsque leurs spasmes s'étaient calmés, leurs regards s'étaient de nouveau croisés et sous les derniers rayons du soleil, leurs bouches s'étaient tendrement liées dans un doux baiser.

Elle avait encore l'impression d'y être, elle sentait encore ses mains dans ses doux cheveux, le bras d'Erwin entourant son dos et sa main pressée sur sa hanche pour la garder contre lui.

Ce moment faisait peut-être parti des plus heureux qu'il lui avait été donné de vivre, il resterait gravé dans sa mémoire pour l'éternité. Quoiqu'il puisse advenir.

- On devrait rentrer, proposa sa sœur d'une voix douce en pressant légèrement l'épaule de la jeune femme.

Celle-ci acquiesça simplement, incapable de détourner le regard de la grande porte qui venait d'être abaissée. Lorsque son fauteuil pivota, elle fut forcée de laisser cette vision derrière elle, laissant définitivement partir ses compagnons, sans savoir lesquels passeraient à nouveau la porte.





La matinée s'était étonnement vite écoulée, midi approchait et elle n'avait aucunement envi d'avaler quoique ce soit. Alors voyant son refus catégorique, sa sœur avait refermé la porte de sa chambre, comprenant qu'elle avait besoin d'un moment seule.

Qui allait mourir ?

C'était la question qu'elle ne cessait de se répéter. Car elle avait arrêté de se voiler la face depuis longtemps, des soldats allaient forcément périr, il était quasiment impossible que l'entièreté des troupes déployées repasse à nouveau la grande porte.

Mais qui étaient ces soldats qui y resteraient ? À quel point seraient-ils proches d'elle ?

Égoïstement, elle espérait que les pertes ne concerne que des soldats qu'elle ne connaissait pas plus que ça. Car oui, apprendre la mort d'un simple adolescent lui pèserait moins sur le cœur que d'apprendre la mort de son neveu, même si cela entraînerait sûrement la peine d'une autre mère, d'une autre tante. Car oui, apprendre la mort d'une parfaite inconnue lui pèserait moins sur le cœur que d'apprendre la mort d'Hanji. Car oui, apprendre la mort de n'importe quel abruti mal aimable lui pèserait moins sur le cœur que d'apprendre la mort de Levi, même si elle avait tendance à se demander s'il n'était pas immortel en plus d'être insomniaque.

Et car oui, apprendre la mort de n'importe quel homme lui pèserait probablement moins sur le cœur que d'apprendre la mort d'Erwin, même si cela entraînerait sûrement la peine d'une autre femme, d'une autre épouse

Le seul qui pouvait quasiment garantir sa survie dans cette histoire était Eren, cet enfant était l'espoir de l'humanité, il ne pouvait pas mourir. Mais tous n'avait pas la chance d'être aussi important que lui.

















Allongée contre son gré dans ce lit d'hôpital, elle avait perdu la notion du temps et sans même se soucier de l'heure qu'il était,  elle s'assoupit lorsque ses paupières devinrent trop lourdes, ses muscles se relâchant dans les draps blancs une fois la fatigue l'ayant emporté.


Les remords...

La peur...

Les piles de cadavres du passé...

« Abandonne tes rêves Erwin, et je tuerai cet enfoiré de bestial...»

L'angoisse...

Le danger...

Les projectiles de pierre s'écrasant contre les maisons et menaçant de les toucher...

Les combats...

Les titans...

La mort...

« - Promets moi de veiller sur elle...

- Je te le promet...»

Les chevaux galopant à toute vitesse vers l'ennemi...

Un énième tir de projectiles...


Son corps se redressa sur son lit, une horrible douleur traversait tous ses muscles, comme un feu émergeant du plus profond de son être, remontant le long de ses jambes, de ses bras, pour se réunir en un point culminant.

Son cœur.

Oui, son cœur l'assaillait d'un mal qu'elle n'avait jamais ressenti, à tel point qu'elle tomba du sommier, s'écroulant au sol en entourant sa cage thoracique de ses bras, dans l'espoir de calmer les brûlures la rongeant.

Mais cette douleur n'avait aucun lien avec ses blessures.

Lorsque les larmes apparurent aux coins de ses yeux, elle ne put se contenir plus longtemps, et la tête recluse sur elle-même, elle poussa un long cri strident qui retentit à plusieurs mètres à la ronde.

Elle ne se savait même pas capable de produire un son aussi puissant, mais réaliser ce qu'il se passait était bien trop dur sous la pression que son cœur créait dans sa poitrine.

Elle avait l'impression qu'il se déchirait, explosait, se détruisait.

Elle avait l'impression de mourir de l'intérieur, consumée par des flammes ardentes.

Lorsque son cri s'atténua, à bout de souffle, elle ne fut capable de bouger, sa bouche restant béante dans une expression de souffrance, incapable de respirer.

Oui, cette douleur n'avait aucun lien avec ses blessures, mais avec celles qui venaient d'emporter son bien-aimé.

Elle le savait, elle le ressentait.














Erwin venait de mourir.








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Hey !
Bon comme vous l'aurez remarqué j'ai pas l'habitude de faire des notes à la fin de mes chapitres mais je me suis dit qu'il serait peut-être temps de m'y mettre haha !

Je sais que la fin de ce chapitre ressemble fortement à une fin d'histoire mais je vous rassure ce n'est pas le cas, l'histoire est loin d'être finie !

En tout cas j'espère qu'il vous aura plus et le prochain chapitre arrive incessamment sous peu :)

Devoir de mémoire ( Erwin x OC )Où les histoires vivent. Découvrez maintenant