8. L'anti-hôte (1)

56 8 55
                                    

- QUOI ? s'exclama Bell à l'autre bout du fil.

Roulée en boule dans mon lit je pensais à la nuit dernière en me frappant le front. Après la chute définitive de ma voiture, j'étais rentrée chez moi sans passer chez Bell. Apparemment, il venait de remarquer que je n'étais plus là, et la voiture non plus.

- Tu as balancé ta voiture dans l'océan et tu as enterré ta plaque d'immatriculation dans mon jardin !

- Oui...minaudai-je en plongeant ma tête dans mes genoux, téléphone posé à côté de mon oreille.

Il marqua une pause, digérant l'information.

- Et ensuite tu t'es enfuie de chez moi comme une voleuse.

- Désolée, je ne voulais pas te causer plus d'ennuis.

Il soupira.

- Tu vas bien au moins ?

- Mauvaise nuit, mais sinon oui. Pas de flic posté devant ma porte, et ma chambre n'a pas été fouillée.

- Donc personne ne connaît ton identité.

- Apparemment. J'ai eu de la chance.

- A part si on vient fouiller dans les profondeurs de mon jardin.

- Désolée...répétais-je.

- T'en fais pas Tina. On va trouver une solution. En attendant, soigne toi. Ah mince, j'ai un autre appel je dois te laisser.

Je fronçai les sourcils, puis regrettai ma question au moment même où je la posai :

- Qui est ce ?

Ça ne me regardait pas, et pourtant, il sembla pris de court :

- Euh c'est...euh ma mère !

Il raccrocha tandis que je posai mon téléphone en souriant naïvement. J'avais omis de lui dire que ma blessure au flanc avait dû s'ouvrir de nouveau pendant mon escapade nocturne. Le sang avait imbibé le nouveau pansement que je m'étais confectionné, et la douleur m'empêchait de faire le moindre mouvement. Du côté de mon bras, la blessure avait l'air moins conséquente.

J'attendis d'être prête psychologiquement pour aller me faire des pâtes à l'eau. Traverser la cuisine fut une épreuve.

Je m'appuyais sur le plan de travail en gémissant tandis que l'eau chauffait. Trop de questions fusaient dans mon esprit. Une sorte de présence semblait s'y être installée de nouveau, comme si Lara était subitement réapparue. J'avais de nouveau la désagréable impression que quelqu'un d'autre avait le pouvoir de décider à ma place. Et pourtant, un nouveau sentiment prédominait.

Je ne me sentais plus seule.

-Lara ? pensais-je très fort en fermant les yeux.

- Quoi ? railla une voix grinçante qui me vrilla la boîte crânienne.

- Où étais tu passée ?

- Je n'avais pas envie de jouer les pantins et faire des courbettes à ton ami.

- Donc tu t'es cachée.

- Et alors ?

Sa voix résonnante m'agaçait et me martelait les tympans. Je ne répondis rien, mais ce que je savais, c'était que cet hôte était vraiment l'inverse de ce que j'aurais pu imaginer.

-Je t'entends, idiote, dit-elle en guise de réponse.

Je n'osais pas le croire, mais j'avais cru entendre une pointe de déception dans sa voix. En même temps, elle était tellement désagréable, que je me demandais si elle était vraiment prête lorsqu'elle avait quitté le Nuage, ou si elle n'était juste qu'une passagère clandestine qui n'avait même pas terminé sa formation.

L'ANTI-HÔTE [Partie 1] Où les histoires vivent. Découvrez maintenant