16 : Le Cœur et l'Esprit (1)

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Personne ne m'avait vue passer en dessous des barrières. Il me restait encore bien une centaine de mètres à parcourir avant d'atteindre l'entrée. Je me mis à courir, aussi vite que mes jambes fébriles me le permettaient. L'ombre de la tour m'engloutit alors, cachant le soleil de ma vue et me dissimulant plus facilement des regards indiscrets. Il n'y avait plus aucun garde posté à l'entrée, ils avaient tous accourus au moment de la détonation.

C'était ma chance. Je regardais autour de moi avant d'entrer. La plupart des gardes chargés de contrôler les matricules avaient abandonné leur postes, les gens sortaient sans se faire inspecter par le grand portail en fer. De hautes barrières entouraient la Tour et longeaient la cour. Le portail était ma seule issue.

Alors pourquoi étais-je en train de m'aventurer dans cette antre inconnue ?

- Va te cacher le temps que ça se calme, puis tu diras que tu t'es perdue, me souffla Lara.

Mais je le sentais. Tout comme moi, elle avait envie d'en savoir plus. De voir le Cœur de plus près. L'entendre, le sentir vibrer.

Je me décidai enfin à franchir la porte automatique. Lorsqu'elle se referma derrière moi, et que je m'avançais d'un pas à peine, les lumières autour de moi s'allumèrent progressivement. Le hall s'apparentait à la salle de réception d'un hôtel de luxe. Curieuse, je me mis à arpenter les lieux silencieux.

Entre les colonnes de marbres, les fauteuils en velours vermeil, le comptoir en pierre polie, les lustres au plafond, et les peintures colorées, j'avais l'impression de rebasculer dans une autre époque.

Cette tour abritait principalement des bureaux sur la majorité des étages, mais aussi des laboratoires et des salles de science pour pouvoir connecter l'énergie du Cœur directement aux pièces de la tour. C'était aussi le siège du gouvernement où se tenaient toutes les réunions les plus importantes du Président et de ses conseillers.

L'ascenseur ouvrit ses deux portes métalliques pour moi. Seule dans la cage grise, j'appuyai sur le plus haut bouton et l'ascenseur monta en flèche. Il s'arrêta bien trop tôt à mon goût. J'étais loin d'être arrivée tout en haut, au niveau du Cœur.

Le couloir dans lequel je débouchai était vide lui aussi, à mon plus grand soulagement. À pas feutrés sur la moquette rouge qui tapissait le sol, je cherchais désespérément les escaliers.

Ils étaient en face, à l'autre bout du couloir sombre.

Je traversai à la hâte sans me rendre compte que l'une des nombreuses portes qui se trouvaient de part et d'autre des murs du couloir était entrouverte. Je le réalisai une fois devant, lorsque des voix me parvinrent.

- Nous ne sommes pas prêt.

Je m'arrêtais, cœur battant, priant pour qu'ils ne m'aient pas entendue. Mais les deux interlocuteurs semblaient trop absorbés par leur discussion.

- Le projet final de Domoto ne pourra jamais être mis en œuvre sans une nouvelle réforme de la production des hôtes.

- Nous avons déjà tout essayé. Les hôtes sont prêts. Ils obéissent assez pour pouvoir suivre des ordres sans déroger.

Ma respiration était bruyante, trop bruyante. J'entendis l'un d'eux approcher. Je me mis à accélérer le pas en direction des escaliers. J'y étais presque. A tout moment, il pouvait mettre le nez à l'extérieur de la pièce et me voir détaler dans le couloir. J'entendis la porte devant laquelle j'avais attendu se refermer dans un claquement. Les conversations s'estompèrent. Il ne m'avait pas vue.

Une main sur la poignée, je disparus alors dans la cage d'escalier. Le style était bien plus différent à cet endroit là. Les escaliers en colimaçon étaient en métal, lequel faisait un bruit sourd sous mes pas.

L'ANTI-HÔTE [Partie 1] Où les histoires vivent. Découvrez maintenant