Chapitre 28 ( partie 2)

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Curieux, je jetai un œil dessus. Des dessins au fusain noir. Des portraits. Je plissai les yeux alors que je reconnaissais mon visage dessinés sur les feuilles avec une extrême précision.

Une à une j'observai chaque dessin. La lueur dans mes yeux lorsque je riais, la petite ride entre mes sourcils épais lorsque j'étais inquiet, mes lèvres pincées lorsque j'étais en colère. J'en trouvai même un de moi sur ma planche de surf, une expression de concentration et de pur bonheur se lisait sur mon visage. Naïa m'avait dessiné de toutes les façons possibles et imaginables. Elle m'observait depuis bien plus longtemps que ce que je pensais.

Je levai la tête et croisais le regard embarrassé de Naïa au dessus de moi, qui jouait avec ses cheveux d'un geste nerveux.

— Je ne voulais pas que tu tombes là dessus, avoua t-elle d'une voix timide.

— Naïa, c'est magnifique. Tu as un talent fou. Regarde tous ces détails, on croirait presque une photographie.

Elle haussa les épaules.

— J'ai eu beaucoup de temps pour me perfectionner disons. Comme nous avions pour ordre de ne pas nous mêler aux humains, quand nous n'étions pas occupés à ... nourrir notre Mère, il fallait bien que je m'occupe.

Je passais les pages l'une après l'autre, m'émerveillant de son coup de crayon. Je tombai sur un dessin me représentant assis sur la plage, mes bras autour de mes genoux fixant l'Océan d'un air soucieux. J'avais l'air si seul et esseulé, comme si personne ne pouvait me comprendre.

— Tu m'observes depuis longtemps, n'est-ce pas ? Alors que je ne me doutais de rien ...

Elle détourna le regard, gênée.

— Tu m'intriguais beaucoup, avoua t-elle. Peu importait l'heure de la journée, tu te trouvais toujours sur la plage ou dans l'eau. Tu n'abandonnais jamais, même si l'Océan te donnait du fil à retordre. Quand tu tombes, tu te relèves aussitôt, tu ne restais pas accroché à tes échecs. D'un côté, je t'enviais beaucoup d'avoir quelque chose qui te motivait à ce point.

Elle s'abaissa pour ramasser d'autres dessins de paysages, de gens inconnus qui se promenaient le long des sentiers dépeint de loin. On pouvait sentir sa curiosité, son envie de découverte et d'appartenir à ce monde dont elle ignorait tout à travers son art délicat et précis.

— Plus je t'observais, plus j'avais envie de te connaître, continua t-elle avec nostalgie. Je voulais savoir ce qui te faisait rire, sourire, même pleurer. Ma curiosité à ton sujet ne cessait de grandir, à tel point que je ne tenais plus en place. C'était plus fort que moi, il fallait que je te rencontre, que je te parle, que je te touche. Pourtant ton sourire a disparu alors que je devais m'acquitter de ma mission.

Un brin de nostalgie s'afficha sur son visage alors qu'elle observait ses propres dessins. Son regard s'assombrit, avec un brin de tristesse et de mélancolie.

— Je ne me voile pas la face, je sais que je suis l'une des raisons qui a fait disparaître ton sourire qui me faisait si chaud au cœur, et je m'en veux pour ça.

Je pris ses mains dans les miennes en les serrant tendrement. Je détestai qu'elle se flagelle avec ce genres de pensées inutiles. Même si l'apparition des trois Sirènes dans ma vie n'ont fait que la rendre plus chaotique, elles l'ont rendue aussi beaucoup plus excitante et exaltante. La présence de Naïa m'apaisait, me réconfortait, c'était la seule chose constante dans ma vie en ce moment qui n'évoluait pas dans le mauvais sens et me donnait envie de me frapper la tête contre les murs.

Je caressai sa joue. Elle sourit et sembla se détendre un peu.

— Je suis heureux de t'avoir dans ma vie Naïa, reste sur cet acquis et ne pense pas plus loin. Penser trop ne t'amènera qu'à un puit sans fond de tristesse et de désillusion. Certaines personnes sont plus heureuses que d'autres parce qu'elles pensent moins. Essayons d'en faire partie.

Le secret de NaïaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant